Les députés du Parlement japonais vont débattre de la manière adéquate de célébrer les 70 ans de la fin de la Seconde Guerre mondiale, écrit mardi le quotidien Nezavissimaïa gazeta.
Les experts y voient un sujet crucial car en effet, les législateurs doivent examiner en parallèle la participation éventuelle de l’armée japonaise à des combats hors du pays.
Une nouvelle session du Parlement japonais s’ouvre aujourd’hui à Tokyo. Bien que l’opinion publique soit plus focalisée sur le sort des otages capturés par les extrémistes de l’État islamique, cette question va céder sa place aux initiatives législatives du premier ministre Shinzo Abe. Ces dernières devraient permettre aux forces armées japonaises de participer à des conflits militaires à l’étranger pour aider les États-Unis et d’autres alliés du pays.
Shinzo Abe ne sera non plus pas en mesure d’éviter un autre sujet sensible : les 70 ans de la fin de la Seconde Guerre mondiale. D’après le Japan Times, le Premier ministre réfléchit déjà sur son futur discours du mois d’août. Il « signale » que les propos tenus en 1995, pour les 50 ans de la défaite du Japon, pourraient changer. À l’époque Tokyo s’était excusé pour son agression en Asie.
« Au lieu de répéter encore une fois ces discours, je voudrais faire une déclaration expliquant la position du gouvernement sur cette question », a-t-il annoncé à la télévision. Ces paroles peuvent être interprétées de plusieurs manières mais quoi qu’il en soit, les pays asiatiques tout comme les États-Unis suivront de près cette déclaration pour comprendre si elle correspond au discours du Premier ministre Tomiichi Murayama prononcé le 15 août 1995. Ce dernier a notamment indiqué que la colonisation et l’agression japonaises avaient causé des dégâts et des souffrances énormes aux peuples de l’Asie et d’autres pays.
De toute évidence, Shinzo Abe n’a aucune envie de répéter les propos de Tomiichi Murayama. En évoquant ses projets le Premier ministre a expliqué que sa déclaration comprendrait trois éléments : il regrettera l’agression militaire, soulignera que le Japon a suivi la voie démocratique pendant ces 70 dernières années, et évoquera les plans du gouvernement pour la prospérité dans le monde et dans la région.
Viktor Pavliatenko, directeur de recherches à l’Institut de l’Extrême-Orient auprès de l’Académie des sciences de Russie, fait remarquer qu’après Tomiichi Murayama « tous les autres Premiers ministres ont répété littéralement ses propos. Shinzo Abe n’apprécie pas cette approche. Il veut transformer le Japon en force militaire et politique importante dans le monde. Une repentance publique contredirait cette politique. Il lui faut ainsi trouver une autre formule qui conserve les excuses pour le passé, mais justifie en même temps les prétentions japonaises au leadership dans la région. »
Shinzo Abe pourrait donc tenter de diminuer la responsabilité japonaise dans la guerre et mettre en avant que le pays a lui-même été victime du bombardement nucléaire, a participé à des opérations de paix et contribué aux programmes humanitaires de l’Onu – ce qui correspond parfaitement à la nouvelle stratégie japonaise de sécurité nationale. « Le gouvernement a déjà adopté une loi permettant à l’armée d’aider ses alliés hors du Japon en cas d’agression. Il ne reste qu’à faire adopter cette législation au Parlement », conclut Viktor Pavliatenko.