Le Sinaï a été une source de tensions entre l’Égypte et Israël depuis 1948. Ainsi, dans le cadre de l’intervention franco-britannique à Suez, en 1956, l’armée israélienne en profita pour envahir la péninsule afin de mettre un terme au blocus égyptien du port d’Eilat. Sous la pression des États-Unis, de l’Union soviétique et des Nations unies, le territoire fut démilitarisé et rendu au Caire.
Mais, en 1967, l’Égypte revint sur les accords passés et y déploya des troupes pour bloquer à nouveau Eilat. Mais cette situation prit fin lors de la guerre des Six Jours, en juin de cette année-là. Et cette fois, Israël décida de se maintenir dans le Sinaï et d’en faire une zone tampon, qui lui servira lors de la guerre du Kippour, six ans plus tard.
Finalement, la péninsule redevint égyptienne après les accords de Camp David de 1978 et surtout la signature, un an plus tard, d’un traité de paix entre l’Égypte et Israël à Washington. Et une Force multinationale et observateurs (MFO, Multinational Force and Observers) y fut déployée – elle l’est encore actuellement – pour surveiller la frontière entre les deux pays. Afin de se prémunir contre une éventuelle attaque surprise, Tel-Aviv avait obtenu que ce territoire soit largement démilitarisé.
Depuis, la frontière entre le Néguev et le Sinaï est restée relativement calme. Du moins jusqu’à la chute du président Moubarak, la police égyptienne ayant désormais de plus en plus de difficultés à contrôler cette vaste péninsule désertique. Les trafics en tout genre ont augmenté, de même que l’immigration illégale et les attaques contre le gazoduc qui traverse ce territoire.
Et les activistes palestiniens en profitent pour faire passer des armes vers Gaza, voire même pour tenter de frapper le territoire israélien, comme cela a été le cas le 18 août 2011. Ce jour-là, l’attaque de véhicules civils et militaires israéliens près d’Eilat avait fait 8 tués et 40 blessés.
À cela s’ajoute l’apparition de nouveaux groupes jihadistes, dont certains se réclament d’al-Qaïda et revendiquent la création d’un État islamique dans le Sinaï. Le nombre de leurs militants est estimé à environ 1 200. L’un de ces mouvements, appelé Ansar Jerusalem, est à l’origine de la mort d’un soldat israélien en septembre dernier. Leur implantation dans la péninsule leur permet ainsi de se rapprocher de leur cible, à savoir Israël.
Du coup, pour tenter de reprendre la main dans la région, l’armée égyptienne a été autorisée à y déployer temporairement des renforts militaires. Cela a notamment été le cas après la mort de 16 gardes-frontières égyptiens, lors d’un assaut d’un commando islamiste. Ce dernier a ensuite été neutralisé alors qu’il tentait de pénétrer en Israël avec un char volé.
Aussi, le gouvernement israélien a fermé les yeux à cette entorse au traité de paix signé à Washington, comptant même sur le succès des opérations militaires égyptiennes contre les groupes jihadistes, à condition qu’elles ne s’éternisent pas, l’État hébreu redoutant d’être mis devant le fait accompli et de retrouver la situation qui prévalait avant 1967.
Quoi qu’il en soit, les responsables israéliens ont pris des mesures pour faire face à la situation dégradée du Sinaï. Tout d’abord en décidant de construire une clôture électronique de sécurité le long des 240 km de frontière pour tenter d’empêcher l’infiltration éventuelle de commandos jihadistes et de multiplier les patrouilles aux endroits névralgiques.
Et puis l’armée israélienne a annoncé, le 27 décembre, le renforcement de ses effectifs militaires dans le secteur de la ville balnéaire d’Eilat, avec l’envoi d’une brigade supplémentaire.
Cette unité régionale « a été officiellement établie mercredi pour renforcer la sécurité autour d’Eilat et viendra en aide aux brigades Sagui et Arava » a précisé le communiqué diffusé à cette occasion.
« Nous vivons une période de changements et de bouleversements. La menace émanant du Sinaï est désormais significative » a affirmé le général Tal Rousso, le commandant de la région militaire sud d’Israël, au cours de la cérémonie officialisant le déploiement de la nouvelle brigade, qui forme avec les deux autres le bataillon Adom.