Dernier volet de notre enquête sur le financement des partis : après avoir analysé les transferts financiers multiples entre l’UMP et ses partis "frères", et les mouvements de fonds occasionnés par les alliances électorales à gauche, Le Monde.fr se penche sur la situation des "micro-partis", ces partis politiques de moindre envergure qui permettent de multiplier, indirectement, les dons d’une personne à la même famille politique.
Dominique Paillé, porte-parole de l’UMP, a appelé, samedi 31 juillet, le PS à "éviter de jouer les chevaliers blancs" au regard de son budget de fonctionnement.
C’est pourtant l’UMP qui utilise le plus largement le système des micro-partis : le total des budgets des satellites du parti présidentiel atteint 4 938 451 euros. Une somme très supérieure à celle de l’ensemble des petits partis proche du PS, dont les budgets cumulés atteignent 796 964 euros.
Un système qui contourne la légalité.
En 1990, on comptait 23 partis politiques en France. En 2008, la commission nationale des comptes de campagne et pour le financement de la vie politique en recense 283. La loi sur le financement des partis politiques impose un plafonnement des dons à 7 500 euros par personne et par an, dans une limite de 20 % des revenus imposables. Le système des micro-partis permet à de riches sympathisants de donner une fois au parti, puis une seconde fois à un micro-parti affilié, tout en déduisant ces deux dons de leur feuille d’impôts.
"Il est possible, en toute légalité, à une même personne de donner une, deux, cinq ou dix fois des sommes qui reviendront au même parti", indique-t-on à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques.
Une pratique révélée à travers l’affaire Woerth-Bettencourt, dont les écoutes ont montré que la milliardaire avait multiplié les dons auprès du parti présidentiel et de micro-partis créés par des ministres du gouvernement (Valérie Pécresse, Eric Woerth).
François Logerot, premier président honoraire de la Cour des comptes, estime qu’il s’agit d’un "détournement de l’esprit de la loi". "La commission [des comptes de campagnes] dénonce cette utilisation du système et réclame une réforme depuis 1995", rappelle-t-il.
L’UMP, champion de la création de micro-partis.
Parmi tous les "micro-partis" recensés, il faut cependant faire le distinguo entre ceux au service d’un homme ou d’une femme politique (Nouvel Oxygène de Laurent Wauquiez, par exemple), qui constituent la majorité des cas, et quelques rassemblements d’élus constitués pour des besoins spécifiques ("Aimer Angers", par exemple, sert aux élus de la majorité socialiste à collecter leur cotisation pour le parti).
Et, malgré les propos de Dominique Paillé, qui citait notre enquête de façon tronquée dans un communiqué récent, le parti présidentiel est bien le champion de la création de micro-partis dévolus à ses ténors, avec pas moins 123 formations satellites, soit plus de 58 % de l’ensemble des partis français.
Presque chaque personnalité de la majorité présidentielle possède le sien :
des ministres (François Fillon, Laurent Wauquiez, Eric Woerth, Christian Estrosi, Jean-Marie Bockel, Brice Hortefeux, Jean-Louis Borloo...)
aux députés (Jean-François Copé, Patrick Balkany, Claude Goasguen...), en passant par les anciens premiers ministres (Jean-Pierre Raffarin, Edouard Balladur, Alain Juppé).
Et surtout de Nicolas Sarkozy lui-même, dont deux micro-partis portent le nom (Association nationale des amis de Nicolas Sarkozy et Association de soutien à l’action de Nicolas Sarkozy).
Le total de leurs budgets atteint la somme de 4 938 451 euros. Une addition qui ne prend pas en compte les budgets du Nouveau Centre d’Hervé Morin (ministre de la défense) et du Parti radical de Jean-Louis Borloo (ministre de l’écologie). Deux partis membres de la majorité qui ont reçu de l’UMP, en 2008, 200 000 euros pour le premier et un million d’euros pour le second.
Une technique peu utilisée par le PS.
Loin derrière, les partis satellites du PS cumulent toutefois, en 2008, 796 964 euros de budget. Une large part de cette somme se trouve dans les comptes de Désirs d’avenir, l’association de Ségolène Royal.
En 2008, celle-ci avait encore le statut de parti politique, et composait la plus importante part du budget (386 180 euros) des partis associés au PS. Depuis 2009, Désirs d’avenir n’est plus un parti politique, mais une association, et par conséquent ne reçoit plus de financement public.
Vous trouverez en lien une infographie représentant tous ces partis en fonction de leur poids financier et de leur affiliation partisane. Elle a été réalisé à partir des données publiées par la commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques.