Chinois et Européens ont affiché leurs divergences monétaires au cours d’une série de rencontres achevée mercredi 6 octobre, Pékin refusant de réévaluer le yuan alors que la zone euro s’inquiète de la montée en flèche du taux de change de sa devise. La discorde a dominé trois jours de visite à Bruxelles du premier ministre chinois, Wen Jiabao, pour un sommet Europe-Asie lundi et mardi, puis un sommet UE-Chine mercredi.
Dès lundi, M. Wen s’est montré ferme, en demandant que les taux de change des principales monnaies restent "relativement stables" entre eux. Une façon de rejeter les appels à une réévaluation du yuan des Européens qui, comme les Etats-Unis, soupçonnent Pékin de faire de la dévaluation compétitive pour doper ses exportations et sa croissance.
PRESSIONS SUR LE YUAN
Mardi, ce sont les Européens qui sont passés à l’offensive. Les trois principaux responsables économiques de la zone euro ont demandé une appréciation "significative" du yuan au chef du gouvernement chinois.
Enfin mercredi Wen Jiabao a contre-attaqué de nouveau. Lors d’un forum économique, il a demandé aux Européens d’arrêter de "faire pression pour une réévaluation du yuan". A ses yeux, une appréciation brusque de la monnaie "conduirait beaucoup d’entreprises chinoises à la faillite" et créerait "des troubles sociaux". Une telle crise "ne serait pas une bonne chose pour le monde dans son ensemble", a-t-il mis en garde.
Peu après, le président de l’Union européenne, Herman Van Rompuy, a déclaré qu’il avait demandé au premier ministre chinois d’agir en faveur de la réévaluation du yuan. Le cours de la monnaie chinoise sera l’un des sujets centraux du prochain sommet du G20 à Séoul, les 23 et 24 octobre, a quant à lui estimé le ministre allemand de l’économie, Rainer Brüderle. "Nous devons parler de ce sujet avec nos partenaires chinois", a-t-il déclaré, tout en appelant à "un apaisement verbal" dans ce débat qui tend à s’envenimer.
APPRÉCIATION DE L’EURO
Ces échanges aigre-doux surviennent alors que l’euro ne cesse de s’apprécier sur le marché des changes, ce qui risque de peser sur les exportations européennes et de brider la fragile reprise économique du Vieux Continent. La monnaie unique est montée mercredi au-dessus du seuil de 1,39 dollar pour la première fois depuis huit mois. Et l’Europe a le sentiment de faire aujourd’hui les frais des efforts des autres grandes zones économiques pour pousser leurs monnaies à la baisse.
L’inquiétude grandit, y compris au sein du FMI, face à l’atmosphère de "guerre des changes" entre grandes puissances pour affaiblir leurs devises respectives afin d’exporter davantage. Si la Chine est réticente à laisser le yuan se réévaluer, le Japon est aussi intervenu pour affaiblir le yen, le Brésil a pris des mesures pour limiter l’entrée de capitaux dans le pays et la hausse du real, tandis que les Etats-Unis ne font rien pour faire remonter le dollar.
Ajoutant à l’atmosphère de discorde, le FMI, dont l’assemblée annuelle se tient ce week-end à Washington, a estimé mercredi que la Chine devait réévaluer sa monnaie pour dépendre moins des exportations et plus de la demande intérieure.