Le fait n’est pas nouveau. Depuis que l’empire déclinant a passé la vitesse supérieure, au début des années 2010, dans ses ingérences (Ukraine, Syrie) pour contrer les géants eurasiatiques, le continent-monde a lui-même accéléré son intégration, ce que ce blog a montré à maintes reprises dès ses débuts. Ce bras de fer, essence même du Grand Jeu et dont Washington ne peut que sortir finalement perdante, a été le témoin ces derniers jours d’événements intéressants.
L’Union économique eurasiatique – on se rappelle que c’est la possible adhésion de l’Ukraine à cette organisation qui entraîna le putsch du Maidan – continue son bonhomme de chemin. L’année dernière, nous prévenions :
L’Eurasie se rapproche inexorablement, encouragée en ce sens par les gesticulations américaines. Un accord préliminaire en vue de la création d’une zone de libre échange a été paraphé entre l’Union économique eurasiatique (UEE) et l’Iran, ce qui permettra d’adoucir les éventuelles sanctions amréciaines. Inutile de dire que les échanges ne se feront pas en dollars mais en roubles.
Chose intéressante, la signature a eu lieu quelques jours après la décision unilatérale de Donaldinho sur le nucléaire iranien. On a là un énième exemple du savoir-faire de Vladimirovitch : sans bruit, sans vagues, prendre une décision susceptible d’aider considérablement un allié tout en déminant les effets de l’agitation impériale.
Nous y sommes. L’accord commercial a été paraphé et doit entrer en vigueur fin octobre. Au-delà des bénéfices immédiats, qui seront peut-être d’ailleurs relativement modérés dans un premier temps, c’est surtout la mise en place du fameux anneau eurasien qui se concrétise encore un peu plus.
Si la bombe que nous avions rapportée, selon laquelle les Russes établiraient des bases en Iran, fait toujours débat, la connivence entre Moscou et Téhéran est sans équivoque. Le sémillant Lavrov s’est même lâché en descendant en flèche les « provocations absolument inacceptables » des États-Unis envers l’Iran.
À 10 000 km de là, le Premier ministre indien Narendra Modi est l’invité d’honneur du Forum économique de Vladivostok (l’année dernière, c’était Xi Jinping). Au programme, coopération avec la Russie dans de nombreux domaines, dont l’énergie, un même discours sur la nécessité d’un monde multipolaire et bien sûr un sommet avec Poutine. Dans le grand Est sibérien, diplomates et compagnies russes, chinois et indiens se retrouvent sous l’œil inquiet des stratèges américains.
Sur le chemin, Vladimirovitch s’est arrêté à Oulan Bator et en a profité pour renvoyer les petits génies de Washington à leurs chères études. En réponse aux hypothétiques et quelque peu irréelles tentatives américaines de gagner les faveurs de la Mongolie afin d’enfoncer un coin entre la Russie et la Chine, un traité d’amitié perpétuelle a été signé entre l’ours et le pays de Gengis Khan. Pompeo et Bolton peuvent ranger leurs affaires...