On nous demande de suivre l’exemple italien, ces super confineurs. Oui, on a vu ça : au bout de 2 jours, il paraît que le respect des consignes commençait à tanguer. C’est pourquoi les forces de l’ordre sont intervenues avec de plus en plus de sévérité. Chez nous les 100 000 policiers et gendarmes censés mater les rebelles ne sont pas encore très visibles. Une petite résistance anti-Macron ? L’occasion de prendre des vacances après 66 ou 67 samedis éprouvants de répression ? Un manque d’envie de faire la chasse aux Français qui ont juste envie de respirer un peu ? On ira leur demander, après tout ce sont des humains comme les autres, ils peuvent donner leur version des faits.
En attendant de choper une patrouille pour la cuisiner un peu sur l’humeur du moment, on a visionné pas mal de vidéos de Français qui se sont échappés de France à vélo. Du sport, du grand air, de la nature, des pays étrangers, on sait que nos compatriotes aiment le vélo et le voyage, alors ils sont de plus en plus à prendre des bécanes, se charger de matos et partir sur les routes, qui avec des sponsors, qui avec un financement participatif (la liste de donateurs en fin de vidéo en général), qui avec 5 euros en poche.
On s’est intéressé aux motivations de ces coursiers, pistards, fugueurs qui ont eu la bonne idée de quitter depuis un an ou deux notre pays transformé en gigantesque prison. On a été humer l’air de liberté qui montait de leurs vidéos Facebook, Instagram ou YouTube. Coincés dans notre appartement de futurs pestiférés, on a apprécié les ciels bleus, les montagnes, les forêts, tout ce qui va nous manquer pendant 15, 30, 40 ou 60 jours. Et comme on peut pas s’empêcher de chercher la petite bête immonde partout où on fourre notre nez, on a constaté un truc assez intéressant, vous allez voir.
D’abord, ces cyclistes du bout du monde mettent leurs vidéos en ligne. Qui les monte ? Quand on part en bécane à travers les Andes avec 40 kg de matériel, où trouver un banc de montage ? Les rushes sont-ils envoyé en France chez des potes ou des pros ? Les vagabonds à vélo montent-ils directement sur iPhone ou Samsung ? Faudra qu’on le leur demande... Mais parfois, on a des épisodes tellement bien foutus qu’ils pourraient passer à la télé. Image 4k, montage nerveux, musique choisie, voix off à point nommé, cartes et explications, inserts de photos et stats... On est loin des randos à l’ancienne. La technologie peut s’allier avec l’esprit voyageur, on va pas jouer les rétrogrades. Mais on a remarqué un truc original : le voyage autour du monde étant devenu une sorte de must, surtout pour les 20-30 ans, une belle ligne à insérer dans le CV, de plus en plus s’adonnent à ce sport panoramique. Le résultat ? La plupart des vidéos qu’on a regardées n’avaient pas 300 vues... en un ou deux ans. C’est donc un trip personnel qui pourrait se passer de vidéos, ou alors de spectateurs.
Et puis il y a ces sponsors, qui sont partout, et qui paraît-il permettent le voyage. Ce qui est faux, puisqu’on a trouvé Houpheng, un Hmong qui traverse l’Europe à vélo et, tenez-vous bien, sans sponsor ni idéal caritatif ! Parce que tous les autres ont un objectif caritatif ou écolo. Les uns posent avec des sacs poubelles en Asie, genre on dénonce la pollution, les autres font ça « pour » le climat... Au bout du compte, avec ou sans fric, tout le monde pédale, en chie un max, mais se taille de bons muscles longs.
« One Bike » ne pipeaute pas, il roule et filme, y a presque pas de montage, on remonte avec lui, le petit Asiatique moustachu basané, chez le géants blonds du Grand Nord :
Dans les autres vidéos, on exalte l’aventure – mais avec des sponsors –, l’humanisme – on s’invite chez des pauvres – et les valeurs, voir les poubelles et le climat. C’est dans l’air du temps, mais nos SDF ou nos routards font ça tous les jours sans le vélo, le matos, le fric de l’industrie ou des donateurs. L’expérience est à portée de tous ! On se rend rapidement compte qu’on peut vivre sans argent, et quand on en a besoin (pour bouffer, fumer ou changer ses pompes), on peut bosser ici ou là pour trouver du cash. Il y a toute une économie sous les radars qui permet de vivre avec un peu de cash... Espérons que la coronacrise bancaire ne va pas le supprimer.
Ce qui nous a plu chez Houpheng, c’est qu’il a compris que le truc entier avait été perverti, que ceux qui fuyaient le consumisme, la société occidentale étouffante, le manque d’espace ou de contacts humains véritables, étaient retombés dans ces mêmes travers avec leurs calculs de sponsors, de publicité, de participation presque directe au Marché, au grand méchant Marché, surtout avec les salades de l’économie verte.
Notre Hmong s’est dépouillé de tout ce qui avait rattrapé ces aventuriers de plus en plus équipés, de plus en plus publicités, de plus en plus connectés (alors que l’aventure est déconnexion !), et il roule sans but, même si son but est évidemment de se connaître et d’essayer d’être libre. Mais ne jetons pas la pierre à ceux qui font ces nobles efforts, c’est mieux que de bouffer du KFC – livré par un coursier à vélo payé des clopinettes par une plateforme Uber – devant sa télé avec un jeu vidéo de dégommage de zombies. On ne va pas chier sur tout quand même !
Pendant que ces chanceux traversent des régions magnifiques, mais aussi désolées parfois, nous on entame notre 3e jour de grève des autres, et on se demande comment certains tiennent le coup : les couples de bobos sans autorité qui ont 3 garçons dont 2 hyperactifs, la famille africaine dans un F10 (ils ont double F5 en général) avec 3 épouses, 17 enfants dont 9 infibulées-excisées, 3 abonnés à la taule, 2 dealers et 4 dingos ? Et le jeune cadre bancaire homosexuel qui avait l’habitude de courir 3 heures le vendredi soir pour se vider la tête des saloperies néolibérales de la semaine puis d’aller en backroom pour se faire remplir l’oignon ? La convivialité, ça doit lui manquer un max !
Ce reportage distrayant nous montre deux communautés, les gays et les juifs, confinés dans 2 km2 au cœur de Paris, deux groupes humains sociologiques qui n’ont pas du tout l’air de souffrir. Au contraire, ils se sentent bien entre eux, et le Marais est devenu une attraction, une sorte de fête foraine (mais sans les Gitans du type Campion, considérés comme trop ploucs) permanente dans la ville. Tout ça pour dire qu’il y a des Français – ici les gays – qui aiment le confinement (il y a un jeu de mots mais on n’a pas fait exprès, juré), on les qualifie de communautaires ou communautaristes. Vivre les uns sur les autres ne les gêne pas, au contraire.
Heureusement, comme les gays ne peuvent pas faire d’enfants (la Nature le leur a interdit par contrat léonin, c’est vrai que c’est dégueulasse, mais que voulez-vous), sauf s’ils s’en achètent (30 000 dollars le môme en moyenne et encore, les prix baissent sur ce nouveau marché), eh bien ils n’ont pas de risque de consanguinité. C’est quand même un sacré avantage : par exemple si deux cousins gays s’accouplent ils ne risquent rien (le sida c’est encore un autre sujet, on va pas tout mélanger, on vous rappelle qu’on est sur le confinement).
On va terminer cette rubrique qui part de plus en plus en sucette (à cause des gays) par une étude éthologique sérieuse. Il s’agit de petits animaux qui vivent dans le confinement le plus absolu et qui en ont fait une force.
Pour les humains qui ont des puces de lit, c’est moins sympathique. Pour les humains confinés avec des puces de lit, c’est encore plus dur. Et pour les gays confinés avec des puces de lit, on vous raconte pas...
Bonus : y a-t-il 6 milliards d’îles désertes dans le monde ?
« Il vit là gratuitement depuis 30 ans, peut-être même plus ! »
Avertissement : Journal du confinement, attention aux contrefaçons !
Le Monde a lancé son Journal, mais tout le monde se moque déjà :
Salut les pauvres. Ça se passe bien dans votre 15m carré à trois ? Pour passer le temps et descendre la pression du confinement, vous pouvez toujours lire le journal de bord d'une écrivaine dans sa maison familiale à la campagne hein. On est pas bien là ? https://t.co/mAJNW9kLIE
— Nicolas Quénel (@NicolasQuenel) March 19, 2020
L’extrait poignant (Slimani n’arrive pas à dormir) et glaçant (l’herbe est verglacée) !
« Jour 1. Cette nuit, je n’ai pas trouvé le sommeil. Par la fenêtre de ma chambre, j’ai regardé l’aube se lever sur les collines. L’herbe verglacée, les tilleuls sur les branches desquels apparaissent les premiers bourgeons. Depuis vendredi 13 mars, je suis à la campagne, dans la maison où je passe tous mes week-ends depuis des années. Pour éviter que mes enfants côtoient ma mère, il a fallu trouver une solution. Nous nous sommes séparés, sans savoir dans combien de temps nous nous reverrions. Ma mère est restée à Paris et nous sommes partis. D’habitude, nous remballons le dimanche soir. Les enfants pleurent, ils ne veulent pas que le week-end se finisse. Nous les portons, endormis, dans la cage d’escalier de notre immeuble. Mais ce dimanche, nous ne sommes pas rentrés. La France est confinée et nous restons ici. »
Confinée au château... Vous êtes priés de pleurer et de ne pas rire !