Il n’y a plus une feuille de papier à cigarette entre la communication du pouvoir militaire israélien et l’article du Monde.
Parfois, les plus grands succès militaires doivent demeurer confidentiels pour être complets. Plus de onze ans après la destruction lors d’un raid aérien d’un réacteur nucléaire syrien situé dans la région de Deir ez-Zor, Israël a enfin décidé de s’attribuer l’opération, surnommée « Hors de la boîte » (Outside the box). L’armée a partagé un dossier sur ce sujet avec un groupe de journalistes israéliens et étrangers – qui ont dû soumettre leur article à la censure militaire, en vertu de la procédure sur les questions de sécurité nationale.
L’intérêt principal, pour Israël, est d’envoyer un message d’actualité à la communauté internationale. Confronté à l’implantation iranienne en Syrie et au développement d’un arsenal sans précédent entre les mains du Hezbollah, l’État hébreu n’hésitera pas à agir militairement, seul si nécessaire, pour assurer sa sécurité.
« La puissance de notre armée, de notre aviation et de nos capacités de renseignements s’est fortement renforcée par rapport à 2007. Cette équation, chacun au Moyen-Orient a intérêt à en tenir compte », a prévenu Avigdor Liberman, ministre de la défense israélien, dans un communiqué mercredi.
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Le secret sur cette opération, entretenu par Israël et le régime syrien, guère désireux de confirmer l’existence de son programme clandestin, était en réalité éventé de longue date. Le raid près de la localité d’Al-Kibar a eu lieu dans la nuit du 5 au 6 septembre 2007. Dès les semaines qui ont suivi, la presse américaine avait fait le récit des discussions confidentielles depuis le début de cette année-là entre le gouvernement d’Ehoud Olmert et l’administration Bush, qui ne voulait pas assumer cette opération. Le 25 avril 2008, dans un télégramme diplomatique, qui sera par la suite révélé par WikiLeaks, la secrétaire d’État Condoleezza Rice confirmait qu’Israël était bien l’instigateur de ces frappes.
Production de plutonium
Les services américains ont cherché à recouper les informations fournies à l’époque par leurs homologues israéliens. Le réacteur visé était « du même type que celui construit par la Corée du Nord » à Yongbyon et « il n’était pas configuré à des fins pacifiques », expliquait le télégramme. Le site devait permettre la production de plutonium. Le document précisait par ailleurs que le réacteur « aurait pu se trouver à quelques semaines » d’un état opérationnel. Israël a pris seul la décision de frapper, même si les Etats-Unis comprenaient ses préoccupations sécuritaires.
Israël avait déjà eu l’expérience d’un raid semblable en 1981, contre le réacteur d’Osirak, en Irak. Il avait illustré la « doctrine Begin », du nom de l’ancien premier ministre, selon laquelle il fallait empêcher tout pays hostile à l’existence d’Israël d’acquérir la capacité nucléaire.
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Le raid sur Osirak en 1981 :
« Osirak était le nom d’un réacteur nucléaire expérimental de 70 MW en cours d’installation en Irak au sud-est de Bagdad, construit par la France et dédié à des recherches civiles sur le nucléaire.
Le 8 septembre 1975, le journal libanais El Oubsou El Arabi publie une déclaration du président irakien Saddam Hussein : L’accord avec la France est le premier pas concret vers la production de l’arme atomique arabe. Le 18 novembre 1975, un accord de coopération nucléaire franco-irakien est signé à Bagdad (Irak). Le texte précise qu’il s’agit d’une utilisation pacifique du nucléaire1.
Le 30 septembre 1980, au début de la guerre Iran-Irak, deux chasseurs-bombardiers F-4 Phantom iraniens ont attaqué avec des missiles le centre de recherches de Tuwaitha à Bagdad mais sans toucher directement les deux réacteurs Osiraq et Isis.
Le réacteur a été détruit lors d’un bombardement mené par Israël qui craignait que l’Irak n’accède à l’arme nucléaire par 8 F-16 et 6 F-15 avec 16 bombes d’une tonne, le 7 juin 1981.
Ce fut l’opération Opéra. Un français fut tué dans ce raid.
La décision de doter l’Irak de technologies nucléaires ayant été prise par le Premier ministre français de l’époque, Jacques Chirac, le réacteur est ironiquement surnommé Ô Chirac par les Israéliens et une partie de la presse francophone.
Auparavant, le Mossad avait détruit en 1979, à La Seyne-sur-Mer (Var), une partie du matériel qui y était destiné.
La France a finalement décliné la demande de reconstruction du réacteur en 1984 après avoir donné une aide technique initiale.
En 1991, durant Tempête du désert, plusieurs raids massifs de F-117 et de F-111 détruisirent le complexe qui était l’un des plus fortifiés d’Irak. » (Source)