Contribution de Denis Charbit, Professeur de Sciences politiques à l’Université Ouverte d’Israël, lors de la Convention du CRIF, dimanche 20 novembre 2011.
Au lendemain de sa Convention Nationale « Demain les Juifs de France », le CRIF vous propose de découvrir les contributions écrites des intervenants qui ont bien voulu nous en proposer une version écrite. Se présentant sous la forme d’un verbatim, d’un texte synthétique, ou d’une tribune en fonction du choix de leurs auteurs, elles sont publiées sur la newsletter au rythme d’une par jour. Vous pouvez aussi retrouver en vidéo l’intégralité de ces interventions sur le site de notre partenaire AKADEM. Bonne lecture !
Plutôt que d’essayer de reconstituer mon propos, il me paraît plus judicieux de le livrer sous forme de points et d’y intégrer les questions qui m’ont été posées.
1) Actuellement, ce sont toujours les Etats-Unis et l’Union Européenne qui dominent l’arène internationale. D’un côté, ils nous reprochent les violations du droit international et notre réticence à régler le conflit israélo-palestinien une fois pour toutes, mais de l’autre, ils sont les seuls à tenir compte dans la formulation de leur politique étrangère la mémoire de la Shoah. Demain, ce sera, nous dit-on, le tour de la Chine, du Brésil, de l’Inde et de la Russie à dominer le monde. Il faut pour cela qu’ils se décident à avoir une réelle politique étrangère qui pèse sur le monde et pas que sur leur région. La Russie de Poutine a déjà commencé. Pour ces pays, il n’y a que l’intérêt et la force qui primeront et les droits de l’homme seront le cadet de leurs soucis. Israël sera donc bien vu à leur table, jusqu’au jour où Israël ne correspondra plus à leur intérêt et alors, leur indifférence à la Shoah explique qu’ils n’hésiteront pas à nous lâcher.
2) Ni l’Europe ni les USA ne feront, actuellement et dans les années à venir, de pression sur Israël. Leur effort a peu de chances d’être couronné de succès. Autrement dit, l’avenir des territoires est l’affaire d’Israël et des Israéliens On pourra poursuivre la colonisation, mais le prix à payer est une dégradation progressive d’Israël dans l’opinion publique internationale et la délégitimation qui ira en s’aggravant. On peut rester dans les territoires mais n’attendons guère de surcroît qu’ils nous aiment. (Attention, ce n’est pas pour qu’ils nous aiment qu’il faut se retirer de tous les territoires).
3) Pas d’accord de paix possible avec les Palestiniens si on y inclut des affaires de mémoire et d’histoire, qui est coupable ? Qui a commencé quel est le but du sionisme ? Etc. Le traité doit rester technique ou il ne sera pas ;
4) Concernant l’exigence adressée aux Palestiniens de reconnaître Israël comme Etat du peuple juif, je vois bien de quel fond venu de notre histoire tragique nous puisons cette demande. Mais il faut également nous avouer à nous-mêmes que notre soif de reconnaissance restera toujours inassouvie : les Palestiniens reconnaîtraient-ils Israël ainsi que nous le demandons qu’aussitôt nous leur présenterions une nouvelle exigence - soit par cynisme (reculer l’échéance pour ne jamais avoir à céder un pouce de territoire) soit par méfiance qu’aucune concession de leur part n’entamera jamais. La seule raison d’être de cette revendication, c’est qu’en la retirant du traité de paix, on réclame également le retrait de la reconnaissance du droit au retour des Palestiniens.
5) Retour sur l’Hexagone : Pas de vote juif aux prochaines présidentielles autour du rapport à Israël, car Hollande et Sarkozy représentent l’aile pro-israélienne dans leur camp respectif. Il en eut été autrement si Aubry avait affronté Sarkozy ou encore si Hollande avait eu en face de lui Juppé (ou de Villepin).