Aussi incroyable que symptomatique, l’affaire défraye la chronique outre-Atlantique : Rachel Dolezal, blanche, vivait grimée en métisse. Un mensonge sur lequel elle avait construit une carrière de militante antiraciste pour finalement devenir l’interlocutrice auprès des pouvoirs publics de la lutte pour les droits des noirs dans l’Etat de Washington, aux États-Unis.
Mais le 11 juin dernier, ses parents, Lawrence Dolezal et Ruthanne Schertel, avertissent les médias locaux. Ils ne comprennent pas pourquoi leur fille prétend être noire et s’est enfermée dans le mensonge depuis 2007. Certificat de naissance et photos d’enfance de leur fille à l’appui, ils démontrent que Rachel Dolezal est bel et bien blanche.
Agée de 37 ans, Rachel Dolezal, déguisée en métisse, enseignait à temps partiel les études africaines à l’Eastern Washington University, occupait depuis 2014 un poste de médiateur auprès de la police de la ville de Spokane (Washington) et présidait l’antenne locale de l’Association nationale pour la promotion des gens de couleur, la NAACP, la plus importante et plus ancienne organisation pour les droits des afro-américains aux États-Unis. Par neuf fois elle s’était présentée comme la victime de haine raciale.
Le lendemain de la révélation de la supercherie par ses parents, quand un journaliste de la chaîne de la ville de Spokane demandera à Rachel Dolezal « Êtes-vous noire ? », cette dernière restera bouche bée, répondra timidement « Je ne comprends pas votre question », avant de finalement fuir le champ de la caméra. Depuis, la vidéo fait le buzz et Rachel Dolezal a démissionné de ses fonctions au sein du NAACP le 15 juin dernier.
Les Dolezal sont une famille multiraciale : en plus de leurs deux enfants biologiques, Rachel et Joshua (39 ans), ils ont adopté plus tard quatre enfants noirs, trois afro-américains et un Haïtien, prénommés Ezra, Izaiah, Esther et Zach. En 2010, avec le consentement de ses parents, Rachel Dolezal a obtenu la tutelle de son frère adoptif, Izaiah Dolezal, alors âgé de 16 ans. Son autre frère adoptif, Ezra Dolezal, accuse Rachel, depuis le déclenchement de l’affaire, d’avoir « lavé le cerveau » d’Izaiah pour qu’il « haïsse les Blancs ».
- La famille Dolezal en 2000.
En haut et de g. à d. : Ruthanne Dolezal, Kevin (premier mari de Rachel Dolezal, divorce prononcé en 2004), Rachel Dolezal, Lawrence Dolezal et ses parents ; en bas : Ezra, Izaiah, Esther et Zachariah.
Absent sur la photo, le frère biologique, Joshua Dolezal, sera jugé en août prochain pour agression sexuelle présumée sur un de ses frères adoptifs. Un procès qui ferait suite à des dénonciations de Rachel Dolezal, ce qui expliquerait les récentes révélations des parents sur la véritable identité de leur fille.
Quoi qu’il en soit, l’affaire, qui fera certainement l’objet d’un film hollywoodien, en dit long sur l’obsession, aussi malsaine que tabou, de l’Occident sur les questions réciproques de la race et de la victimisation. Dans le Daily Mail (14 juin) l’éditorialiste Dominic Lawson a livré cette analyse intéressante :
« Rachel Dolezal est simplement l’exemple le plus spectaculaire d’un phénomène croissant de personnes se présentant comme des victimes, conséquence même d’une culture qui met en scène la victimisation comme une forme de supériorité morale. »
Une question reste en suspens. Depuis quand, comment et par qui a été importée en Occident cette « culture » de la jouissance victimaire procuratrice d’ « une forme de supériorité morale » ?