Au Vélodrome d’Hiver à Paris, en juillet 1942, plus de 13 000 Juifs ont été arrêtés par les autorités allemandes et françaises avant d’être déportés.
Dimanche 22 juillet 2012, le président François Hollande a procédé à une commémoration officielle et prononcé un discours dans lequel il nous a rappelés à tous, Français de souche ou issus de l’immigration, à quel point notre pays est une infamie et notre histoire une insulte à la mémoire.
Le vocabulaire absolutiste employé par François Hollande est univoque : « crime », « irréparable », « abjection », « fanatisme », « logique de la haine »... Le postulat du président et, d’une manière générale, de toute la presse reprenant en chœur ses déclarations – parfois même sans feindre une certaine admiration émue, comme Annette Lévy-Willard dans Libération – est finalement assez simple : c’est en raison de leur haine irrationnelle des juifs que des Français ont participé à la rafle du Vel d’Hiv, et pour nul autre motif.
Dans l’agenda politique de plus en plus transparent des puissances impériales dans leur lutte contre les nations, cette déclaration est parfaitement logique. En France, le président est chargé d’une mission : rendre les Français coupables, honteux, méfiants à l’égard de leur propre histoire, suspicieux du pire en eux comme en leur voisin, hôtes constants d’une bête immonde susceptible de sortir à chaque instant pour persécuter des boucs-émissaires et, par là, à jamais incapables de se sentir appartenir à une nation vertueuse, unie et pérenne.
C’est pourquoi Hollande le bien nommé n’hésite pas à dire que la « rafle » fut « un crime commis en France par la France », ni à faire le lien bien entendu avec la tuerie de Toulouse en mars dernier, où « des enfants mouraient pour la même raison que ceux du Vel d’Hiv ».
L’aboutissement – tragique – de cette posture et de ces déclarations est un accroissement de l’immunité morale et politique d’une communauté en France.
Dans un pays rendu historiquement coupable du pire contre les Juifs et désigné comme contenant une haine inextinguible à leur égard, aujourd’hui de la même manière qu’hier, chacun – Juif ou non-Juif – peut désormais exercer à l’égard de tout adversaire politique un très efficace chantage à l’antisémitisme.
Mais le résultat est clair et déjà palpable : en même temps que se développe cette victimisation/culpabilisation et que s’accroît l’immunité des « victimes », augmente aussi l’exaspération presque instinctive des Français à l’égard de l’injustice, de l’immoralité et du piétinement quotidien de la raison et du bon sens où cette pente les entraîne. Et, donc, leur ressentiment à l’égard des « victimes » éternelles.
Un effet si évident et prévisible qu’on en vient à se demander s’il ne s’agit pas là d’une volonté délibérée de le provoquer.
Ce qu’on retiendra enfin de ce discours, c’est que François Hollande s’est aussi engagé à lutter contre l’antisémitisme avec "la plus grande énergie". Affirmant que "la Shoah n’est pas l’histoire du peuple juif mais l’Histoire, notre Histoire", il en a naturellement conclu que l’antisémitisme n’est pas "une opinion" mais "une abjection".
Attendu au tournant par des témoins de première main, Serge Klarsfeld, président de l’Association des fils et filles de déportés juifs de France, et Richard Prasquier, président du Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF), il rappela qu’"il y a quatre mois (à Toulouse), des enfants mouraient pour la même raison que ceux du Vel d’Hiv : parce qu’ils étaient juifs".
Dès lors il pouvait conclure : "La République pourchassera avec la plus grande détermination tous les actes et tous les propos antisémites qui pourraient amener les juifs de France à se sentir inquiets dans leur propre pays. Rien en la matière n’est indifférent. Tout sera combattu avec la dernière énergie".
Toutes les critiques du sionisme, de la religion juive ou de la politique israélienne risquent dès lors de tomber sous le coup de la sentence présidentielle. Message reçu ! Mais pas nécessairement suivi.