Le 20 novembre 2015, France Inter diffuse son émission d’investigation Secrets d’info intitulée Daesh, autopsie d’un monstre. Deux journalistes, Jacques Monin et Benoît Collombat, ont enquêté sur les liens entre la nébuleuse terroriste et les pétromonarchies du Qatar et de l’Arabie saoudite. Dans l’extrait que nous diffusons, c’est au bout de 9 minutes que les choses se précisent.
Jacques Monin, chef des informations de France Inter :
« Si l’on en croit des sources bien informées, l’Arabie saoudite continuerait indirectement de financer Daesh en achetant son pétrole au marché noir avec la complicité de la Turquie. C’est ce que soutient en tout cas un fin connaisseur du sujet, l’ancien patron d’Elf, Loïk Le Floch-Prigent, qui a lui-même longtemps travaillé en Irak et en Syrie. »
Sonore de Loïk Le Floch-Prigent :
« Le pétrole de Daesh, ne peut sortir et ne peut être payé, que par des gens qui sont prêts à le payer et à étouffer son existence. C’est forcément un mélange de Turcs et de Saoudiens. Y a pas d’autres solutions.... n’oubliez jamais que ce pétrole a un ADN... Donc ce pétrole n’arrive jamais sur le marché. Ils l’utilisent, plutôt. La laverie s’appelle une raffinerie. »
Sonore de Manuel Valls en Arabie saoudite en octobre 2015 :
« Avec l’Arabie saoudite, nous avançons en confiance, nous approfondissons une relation économique que nous tournons résolument vers l’avenir. Venez investir dans notre pays au cœur de l’Europe, c’est le moment, plus que jamais. »
Jacques Monin :
« Les États-Unis qui ont déstabilisé l’Irak, les pays du Golfe qui ont financé des mouvements djihadistes, la France qui a joué les rebelles contre le pouvoir syrien sans voir qui elle avait véritablement en face d’elle et la Turquie qui laisse prospérer les trafics sur son territoire. Bref, pour Hocham Daoud qui est anthropologue au CNRS, les responsabilités sont multiples. »
Hocham Daoud, anthropologue au CNRS :
« Tout le monde a joué avec Daesh, tout le monde voulait jouer à travers Daesh pour s’imposer. En fait, on a créé un Frankenstein, aujourd’hui tout le monde essaye de trouver est-ce qu’il y a un moyen pour l’arrêter. Oui, il y a des moyens... s’il y a une volonté politique. »
Sonore de l’ancien officier de renseignement français Alain Chouet :
« On ne pourra pas continuer éternellement dans une politique schizophrène qui consiste à vouloir imposer la démocratie dans certains pays en maintenant une alliance entre nos démocraties et la démocratie qui est la plus grande du monde, et les états théocratiques les plus réactionnaires de la région. On a fermé les yeux sur l’idéologie prônée par ces pays, parce qu’on ne la voyait pas, parce qu’on n’en voyait pas les effets. On n’en mesurait pas les effets parce que rien ne se passait chez nous, où s’il se passait des choses on ne les voyait pas, eh bien maintenant on les voit. »