DSK mis en examen, de Maistre en prison, en quelques jours, plusieurs rebondissements ont eu lieu dans des dossiers secouant le landerneau politique. Mais, est-ce totalement un hasard si ces affaires ont lieu en pleine présidentielle ? En 2002 et 2007, des affaires avaient également marqué la campagne.
DSK n’en a pas fini avec la justice. Alors qu’il s’apprête à être jugé au civil aux USA dans l’affaire Diallo, il a été mis en examen lundi pour « proxénétisme aggravé en bande organisée » dans l’affaire du Carlton et placé sous contrôle judiciaire. Il a notamment pour interdiction de s’exprimer publiquement sur cette affaire et a dû payer une caution de 100 000 euros. Ses avocats ont déjà demandé l’annulation de sa mise en examen et réclament le statut de témoin assisté pour leur client. L’ex-patron du FMI a en revanche échappé à la mise en examen pour « recel d’abus de biens sociaux ». En février, il avait déjà passé deux jours en garde à vue auprès de la PJ lilloise.
Parallèlement, l’affaire Bettencourt a aussi rebondi jeudi dernier avec le placement en détention provisoire de Patrice de Maistre, le financier de l’héritière de L’Oréal. Comme l’a révélé Marianne, la justice lui reproche d’avoir faire venir de l’argent liquide de Suisse vers la France entre février 2007 et octobre 2009 sous le nez du fisc. En tout, ces retraits atteignaient la somme de 4 millions d’euros. La justice s’interroge sur le lien entre ces retraits de liquide et un éventuel financement occulte de la campagne 2007 de Nicolas Sarkozy.
Après un certain silence médiatique autour de ces affaires, les dossiers DSK et Bettencourt font leur retour en pleine présidentielle. Mais ce n’est pas inédit, la justice ne connaît pas de trêve électorale lorsqu’elle met en cause des personnalités politiques. En mars 2007, dans le cadre de l’Affaire Clearstream, Jean-Louis Gergorin, proche de Villepin, et Imad Lahoud, mis en examen depuis juin 2006, étaient une nouvelle fois entendus par les juges d’instruction. Idem, en 2002, Hubert Védrine et Pierre Moscovici, alors ministres de Jospin, étaient entendus comme témoins dans l’affaire de l’Angolagate, respectivement le 21 mars et le 2 avril, toujours en pleine présidentielle.
Un complot contre DSK ?
Pour autant, le calendrier de l’affaire du Carlton relève-t-il du complot politique ? L’UMP n’a jamais hésité à utiliser cette affaire pour attaquer Hollande. Me Henri Leclerc, avocat de DSK, s’est contenté de « constater une coïncidence » : « L’affaire dure depuis longtemps, la mise en examen arrive à quelques semaines d’une échéance électorale mais je n’en tire aucune conclusion », a-t-il déclaré dans une conférence de presse ce mardi.
De même selon l’avocat, il y aurait un peu trop de fuites autour de ce dossier : « Je ne sais pas qui est à l’origine de ces fuites partielles et partiales », a-t-il déclaré dans une conférence de presse. Il note pourtant : « Les infos sortent alors que le dossier est entre les mains de la police, du parquet ou du juge. Mais je ne pense pas que ce soit le juge », sous-entendant ainsi que les fuites viennent du parquet ou de la police… sous le contrôle de l’exécutif. Me Leclerc a également dénoncé une « mobilisation incroyable de la justice » pour « deux ou trois réunions libertines par an ».
Mais au delà des risques judiciaires, c’est le contexte médiatique et le règne de la rumeur qui font peur aux avocats de DSK. Me Malka, l’autre avocat de DSK, a ainsi regretté que son client n’ait « pas le droit de se défendre devant le tribunal de l’opinion ». D’ailleurs, l’audition de l’intéressé en vue de sa mise en examen initialement prévue mercredi, premier jour de son procès civil dans l’affaire Diallo, a été avancée à hier pour éviter le « barnum » selon Me Leclerc. Et comme un symbole, les trois avocats de DSK, Me Leclerc, Malka et Beaulieu, ont organisé leur conférence de presse en présence de Anne Hommel… la conseillère presse de DSK.
Tant pis pour Sarkozy
Si la thèse du complot anti-DSK est tentante, on oublie de dire que le calendrier de l’affaire du Carlton s’est accéléré ces tous derniers mois et que l’affaire met en cause de nombreuses personnes. L’enquête préliminaire a été ouverte le 2 février 2011, l’information judiciaire le 28 mars de la même année.
Les principaux protagonistes de l’affaire, qu’il s’agisse du commissaire Lagarde, de René Kojfer, le chargé de relations publiques du Carlton ou de l’entrepreneur Fabrice Paszkowski, ont été mis en examen en octobre dernier. C’est seulement à cette époque que le nom de DSK apparaît dans la procédure. Ses avocats ont alors demandé que leur client soit entendu, il sera finalement placé en garde à vue en février dernier.
Même raisonnement dans l’affaire Bettencourt, la mise en détention de De Maistre, accusé de financement politique illégal, arrive aussi en pleine campagne. Est-ce encore un coup politique ? En fait, si coup politique il y a, il vient d’un magistrat proche de la droite. En 2010, le procureur Philippe Courroye, faisant sans doute preuve d’un sarkozysme un peu trop zélé, a longtemps freiné des quatre fers avant d’ouvrir une information judiciaire et de confier les dossiers à un juge indépendant.
Résultat la procédure traîne et il faudra attendre décembre 2010 et un dépaysement de Nanterre vers Bordeaux pour que cette affaire tentaculaire soit confiée à des juges. Le volet du financement politique étant confié au juge Jean-Michel Gentil. Au vu de la complexité du dossier, Eric Woerth n’a été mis en examen qu’en février 2012. Comme l’a révélé Marianne, la commission rogatoire internationale sur les comptes suisses de Lilianne Bettencourt n’est revenue que début mars. Tant pis pour Sarkozy si cela trouble sa campagne. Le temps long de la justice est prévu pour protéger les intérêts des parties, pas ceux des candidats.