La police congolaise a dispersé samedi à Kinshasa des manifestants hostiles à tout projet qui permettrait au président Joseph Kabila de briguer un troisième mandat en 2016, interpellant plusieurs personnes dont un journaliste vidéaste de l’AFP.
Vendredi, les autorités avaient vivement « déconseillé » de se rassembler, arguant que d’autres opposants se réunissaient samedi et qu’il était « difficile (...) d’encadrer les deux manifestations », a expliqué le ministre de l’Intérieur, Richard Muyej, à l’AFP.
Certains initiateurs avaient renoncé à manifester mais samedi matin des dizaines de personnes, surtout des jeunes, ont tenté d’atteindre la Gare centrale, point de départ de la marche.
Ils se sont retrouvés face à des policiers dont une centaine est intervenue pour disperser les manifestants regroupés près de l’hôtel Memling, dans le nord de la capitale, ont constaté trois journalistes de l’AFP. Au moins une grenade lacrymogène a été tirée.
Forces de l’ordre et opposants ont joué au chat et à la souris mais l’opération s’est déroulée sans incident majeur, selon ces journalistes. Les organisateurs affirment toutefois dans une déclaration qu’il y a « des blessés » et des personnes « conduites vers des destinations inconnues », exigeant leur libération.
Un vidéaste de l’AFP a été violemment interpellé par la police avec un confrère de la télévision privée Sango Malamu alors qu’ils filmaient.
Ils ont été relâchés à distance de la manifestation après avoir été forcés à monter dans un véhicule de la police pendant une quinzaine de minutes.
Les journalistes de l’AFP ont par ailleurs vu quatre autres personnes être interpellées et emmenées dans des véhicules de la police.
M. Muyej a expliqué qu’en tout « huit personnes », « dont un député de l’opposition », avaient été interpellées.
Il a ajouté que « toutes » avaient été « libérées » après une « cure de redressement » de la police : elles ont reçu des « conseils » pour ne plus se retrouver dans pareille situation. Mais cela n’a « rien à voir avec la dictature », a-t-il dit.
Parmi les principaux organisateurs de la manifestation figurent des responsables de l’Union pour la Démocratie et le Progrès social (UDPS, première force d’opposition au Parlement) et de l’Union pour la Nation congolaise (UNC, troisième parti d’opposition).
Ils dénonçaient toute tentative de modification constitutionnelle qui permettrait à M. Kabila, au pouvoir depuis 2001, de se représenter en 2016 et réclamaient la libération des détenus politiques – dont le député Jean-Bertrand Ewanga, le secrétaire général de l’UNC condamné jeudi à un an de prison ferme pour offense au chef de l’Etat.
Cet élu avait été arrêté le 5 août, au lendemain d’un rassemblement autorisé qui avait réuni à Kinshasa des milliers d’opposants à tout maintien au pouvoir de M. Kabila au-delà de son second mandat.
Samedi matin à Butembo (Nord-Kivu, est), une autre marche de l’opposition a été « dispersée » sans violence par la police, malgré des « jets de pierres », a déclaré à l’AFP un responsable de la société civile sur place.
Le président de l’UNC, Vital Kamerhe, ex-meilleur allié de M. Kabila, et Bruno Mavungu, secrétaire général de l’UDPS, ont promis d’organiser d’autres marches à une date non encore fixée.
« Les gens ne veulent pas de la révision de la constitution, le mandat pour le président actuel, c’est le dernier : il se termine le 19 décembre (2016) à minuit, et nous voulons de bonnes élections », a plaidé M. Kamerhe samedi devant la presse.