Dans les années soixante, l’écrivain nord-américain James Baldwin avait , dans un livre alors retentissant intitulé The fire next time, pronostiqué la survenue d’émeutes sanglantes si le mouvement des droits civiques ne débouchait pas sur une nouvelle justice sociale.
L’Angleterre d’aujourd’hui paye le prix de sa politique néolibérale menée depuis trente ans. Régression tout azimut des politiques publiques, ghettoïsation sociale et communautarisme ethnique débouchent aujourd’hui sur une violence incontrôlable.
Particularisme anglais ? En réalité, le présent de l’Angleterre est notre avenir s’il n’est pas mis fin à la politique suicidaire dans laquelle nos gouvernants, aujourd’hui “de droite” , hier ou demain “de gauche” nous enferment.
La crise économique est là, massive, depuis trois ans. Elle est la conséquence du choix stratégique fait par le capitalisme financier depuis trente ans : celui de délocaliser la production, surtout industrielle mais aussi celle des services, dans les pays à bas salaires.
Ceux-ci en ont partiellement profité et c’est tant mieux. Mais ce transfert a eu pour résultat d’assécher l’emploi et la production dans les pays dits “développés”.
Pour maintenir le niveau de vie et la paix sociale, on a eu recours au crédit bancaire massif aux Etats-Unis comme substitut aux salaires. En Europe, cette politique s’est combinée, à des degrés variables, avec le financement par les Etats de la crise sociale : traitement “social” du chômage de masse, soutien des revenus des ménages par la protection sociale. Mais ces politiques, dès lors qu’elles n’étaient plus adossées à une économie de croissance, ne pouvaient que déboucher sur des faillites en chaîne.
La faillite des banques américaines, plombées par des crédits gigantesques devenus irrécouvrables, entraînant tout le système bancaire international, a obligé les Etats à garantir sa survie. Mais du coup, c’est la dette des Etats qui est devenue béante, d’abord dans les économies les plus faibles, comme celle de la Grèce, mais potentiellement dans tous les pays d’Europe et aux Etats-Unis. A la faillite des banques, s’ajoute maintenant la faillite potentielle des Etats.
Mais où ceux-ci trouveraient t-ils les ressources nécessaires alors que la production économique continue à régresser et que le chômage de masse continue ?
A chaque replâtrage de cette spirale sans issue on nous annonce que le système est sauvé ! Aux communiqués de victoire sur la dette grecque répondent le lendemain les menaces d’effondrement des finances portugaises, espagnoles, italiennes. Aux Etats-Unis, le roi est nu. Le déficit colossal de la balance des paiements n’est plus contrôlé. Lundi, on nous annonce que la crise boursière qui a succédé à la dégradation de la note américaine est derrière nous. Aujourd’hui, les bourses replongent, et il apparaît désormais que les banques, hier renflouées par les Etats, sont menacées par la dette de ces derniers.
Et que proposent nos gouvernants ? Nos candidats à la “primaire” socialiste ? Changer de stratégie, relocaliser la production, taxer les importations des productions à bas salaires ? Bien sûr que non !
Entièrement soumis à la logique sans issue de la finance mondiale et des grands groupes industriels, il n’est question pour les gouvernements américains et européens que d’austérité, compression des dépenses publiques, hausse des impôts. C’est la médecine de Molière : traiter l’anémie par la saignée.
Nicolas Sarkozy veut faire de la réduction du déficit public une “règle d’or ”constitutionnelle pour l’après 2012. Que répondent ses pseudo-opposants : qu’il faut le faire tout de suite, car selon François Hollande, suivi par Martine Aubry, la réduction des déficits est une “valeur de gauche” !
L’endettement public n’est évidemment pas une solution s’il se contente de remplir un tonneau des danaïdes. L’action publique est au contraire essentielle si elle vise à relancer la production et l’emploi par des investissements productifs, et si elle repose sur une inversion de stratégie : permettre à nos industries de redémarrer par un protectionnisme raisonnable.
La seule solution pour les Etats européens les plus endettés est de retrouver une marge de manœuvre sur leur monnaie. Il faut donc en revenir à des monnaies nationales en Europe, au sein d’un système commun, pour permettre aux économies de respirer.
Accroché à une stratégie sans issue, n’ayant en tête que les intérêts à court terme des grandes firmes mondialisées, les gouvernements préfèrent aller à la rupture de tout le système.
Désormais, qui peut ne pas voir que le feu est là, dans la société et dans l’économie ? Et qui va payer la note de l’incendie, si ce n’est les peuples ?
La faillite politique et économique des dirigeants occidentaux, de l’Union Européenne, est totale. Il n’y a pas d’autre solution que de changer profondément de cap par une nouvelle politique économique, basée sur un rassemblement républicain de toutes les bonnes volontés.