Il serait incrédule de croire les versions des faits véhiculées par les différentes factions de l’insurrection syrienne sur ce qui se passe en général et s’est passé dans la localité de Houlé, (que tout le monde appelle désormais Houla).
D’innombrables fois, celles-ci ont fait preuve de mensonges ou d’omissions, comme ce fut flagrant dans l’affaire des Libanais kidnappés par l’ASL.
Concernant le carnage horrible de Houlé, très peu de données sont sures et certaines. Seule une enquête peut trancher. La donnée la plus certaine reste le bilan final de ses victimes : 114 personnes massacrées d’une façon horrible, dont 32 enfants de moins de 10 ans. Mais qu’en est-il du quand et comment ils ont été tués : très peu en parlent. Quoi de plus facile d’accuser le régime, comme c’est le cas dirigeants occidentaux et arabes, relayés par les agences et les medias, à la veille de la visite du responsable onusien Kofi Annan et d’une réunion du Conseil de sécurité.
Les observateurs ne manquent pas de le constater qu’à chaque fois qu’il y a une échéance onusienne, il faut s’attendre à une escalade sécuritaire imputée au régime.
Tués à bout portant et non dans des bombardements
Or, une autre donnée est aussi sure qu’apparente, celle montrée à travers les images des victimes présentées par les chaines de télévision et sur la toile et que très peu tentent de décortiquer : l’horreur des images étant à elle seul dissuasive.
Ainsi, la majeure partie des victimes, surtout les enfants montrent des traces de balles dans la tête et le visage, un peu mois dans la partie supérieure du corps. L’un d’entre eux pourrait laisser croire qu’il a été égorgé. Mais l’éventualité d’une balle tranchante est aussi plausible. Un bébé semble quant à lui avoir été assommé d’une hache à la tête aussi. L’une des photographies montrent des traces de sang sur le mur.
Il en découle que la plupart des martyrs ont été liquidés à l’arme à feu, à bout portant.
Ces images affreuses sapent la version disant « qu’ils ont péri dans des bombardements intensifs des forces gouvernementales », version véhiculée par l’Organisation syrienne des Droits de l’homme (OSDH) à travers les agences internationales à longueur de la journée de vendredi 25 mai puis du samedi.
Lorsqu’il y bombardement, cela veut dire que les maisons sont détruites ou endommagées et que les cadavres ne peuvent qu’être délabrés et poussiéreux. Ce qui n’est pas du tout le cas dans le carnage de Houlé. Les maisons sont intactes, on voit à peine les traces de coups de feu sur les murs ou les sols. Les victimes semblent avoir été abattues une à une, dans les chambres, dans les couloirs ou sur les étages...
Même les observateurs onusiens dépêchés sur les lieux du massacre n’ont pas distingué cette nuance. Après avoir imputé aux forces gouvernementales la responsabilité du massacre, ils ont observé que la ville a été bombardée aux obus de char.
Les images sapent aussi la deuxième version des faits, différente de la première, mise en exergue par des journaux arabes financés par l’Arabie saoudite comme dans le journal arabophone publié à Londres Al-Hayat, et dans lequel Il est question de « voyous du régime (chabbiha) qui ont investi les périphéries de la ville après des manifestations, puis ont ouvert le feu dans ses rues, ont perquisitionné ses maisons et ont égorgé la plupart des femmes et des enfants à coups d’armes blanches ».
Elle avance l’assassinat aux armes blanches de la plupart des victimes. Ce qui est aussi inexact. Constats : cette version évite de constater qu’elles ont été tuées à bout portant. De plus, elle évite de signaler que des bombardements intensifs ont eu lieu. Il est vrai que ceci aurait sapé leur logique des évènements, sachant qu’il est incompatible de bombarder intensivement une région et de l’investir en même temps.
Cette diversité des versions a même été constatée par le site en ligne syrien Syria Truth (opposition de gauche hostile au régime et à l’insurrection en même temps) et qui avait évoqué dans son numéro de samedi « un massacre commis par les forces gouvernementales lors de bombardements intensifs contre la région de Houlé dans le cadre d’accrochages avec des dizaines d’homme armés takfiris ».
Il rapporte entre autre la version avancée par le Comités de coordination de la révolution qui évitent quant à eux d’accuser l’armée régulière et accusent les habitants alaouites : « la région de Houlé est habitée par une majorité sunnite, alors que les villages situés au sud sont habitées par une minorité alaouite et ce sont ceux-là qui ont attaqué les villages ... », relate le CRC.
Des accrochages : pourquoi personne n’en parle
Hormis cette diversité, un cordon ombilical relie ces versions des différentes factions de l’insurrection syrienne : elles évitent toutes d’évoquer qu’il y a eu des accrochages entre les forces de l’ordre et les insurgés. Il s’agit là d’une leur ligne éditoriale, depuis l’éclatement de la crise syrienne, qui veut laisser croire que les forces de l’ordre ouvrent le feu contre les civils et non contre les hommes armés. (Quoique les images vidéos mises en ligne ne montrent jamais ceci). Ce qui aurait pour effet d’alléger ses torts au regard de l’opinion publique.
Ces accrochages ont par contre été évoqués dans la conférence de presse du porte-parole du ministère des affaires étrangères Jihad Makdessi. « Des centaines de personnes, armées de différentes sortes "d’armes lourdes" ont lancé l’assaut contre la localité de Houlé après s’être rassemblées en groupes dans plusieurs régions,..., les forces de sûreté et du maintien de l’ordre n’ont pas quitté leurs positions et étaient en état de légitime défense », relate Makdessi. Lequel a tenu à notifier qu’aucune char n’était entré à Houlé et que l’artillerie n’était pas du tout pointée sur la zone du massacre.
Selon lui, les hommes armés s’étaient rassemblées vendredi à 14heures puis ont mené leur attaque à bord de pickups transportant des armes lourdes dont des mortiers, des mitrailleuses lourdes, des projectiles anti-char. (Des armements acheminés dernièrement via la frontière libanaise, selon les aveux des chefs de l’insurrection au quotidien Al-Akhbar)
Il a ajouté que les forces gouvernementales dans cette région ne se trouvaient que dans cinq positions, "toutes en dehors de la zone du massacre", et que l’offensive entamée à "14heures s’était poursuivie jusqu’à 22h , faisant trois martyrs parmi les éléments des forces de l’ordre, et 16 blessés dont les blessures de certains sont fort graves. Il a aussi fait état de corps carbonisés du fait des armes lourdes employées. (Samedi, les autorités syriennes avaient organisé les obsèques de 23 soldats et éléments des forces de l’ordre tués vendredi.)
Makdessi reconnait aussi, que certaines régions sont désormais sous le contrôle des insurgés. Le gouvernorat de Homs est sans doute le plus concernée.
Régions incontrolables et zone tampon
L’aveu est soutenu par les témoignages des rescapés de Houla qui ont quant à eux fait état de pressions monstres qu’ils subissent de la part insurgés, les sollicitant à se rallier à l’insurrection et demandant aux hommes de rejoindre leurs rangs. Et comme ils ont refusé, on leur a dans un premier temps incendié leurs champs agricoles. Ainsi que l’hôpital public.
Autre indice de ce contrôle : ce sont, comme le montrent le vidéos sur la toile, les insurgés qui ont organisé les obsèques des martyrs de Houla. Les éléments des forces de l’ordre étant totalement absents.
Plus encore, samedi, d’autres massacres ont été perpétrés dans les villages de Shoumariyé et de Tel Do, dans la province de Homs et qui semblent s’inscrire dans le prolongement de celui de Houla. Dans le premier, ce sont les 8 membres de la famille Abdallah et deux autres de la famille Ello qui ont été massacrés. Une vingtaine de maisons y ont été incendiés. Alors que dans le deuxième village, les insurgés ont tué trois hommes, une femme et trois enfants de la famille Sayyed.
Au fil de ces massacres, une conclusion est incontournable : après avoir vidé le gouvernorat de Homs des chrétiens, et des alaouites, il s’agirait maintenant de le vider des musulmans sunnites, qui soutiennent encore Bachar el-Assad. Ce qui rime d’ailleurs avec les évènements de la ville libanaise du Nord, Tripoli, limitrophe de Homs, visant à l’évacuer de l’armée libanaise...
Le tout pour y instaurer la zone-tampon...