Le 17 août, la Cour constitutionnelle de Colombie a invalidé l’accord de défense signé le 30 octobre 2009 entre la Colombie et les Etats-Unis. Celui-ci autorisait l’armée américaine à opérer à partir de sept bases militaires colombiennes dans le cadre de la lutte contre la « narcoguérilla ». Selon la Cour, l’approbation d’un texte qui touche à la « souveraineté nationale » relève d’une décision du Congrès de la République. Or, concocté en secret, l’accord avait été signé par le ministre des affaires étrangères colombien, M. Jaime Bermúdez, et l’ambassadeur américain, M. William Brownfield.
En février 2010, Maurice Lemoine soulignait, dans Le Monde diplomatique (« “Basus belli” en Colombie »), la disproportion entre l’objectif stratégique annoncé et la force militaire que les Etats-Unis se proposaient de déployer en Colombie : « Le Pentagone investira 31,6 millions d’euros pour l’aménagement de Palanquero, au bord du río Magdalena. L’installation disposera d’une piste de trois mille cinq cents mètres pouvant accueillir des avions C-17 (Galaxy) capables d’emporter soixante-dix tonnes et possédant une autonomie de plus de huit mille kilomètres sans réapprovisionnement en carburant. D’Apiay opéreront des appareils de reconnaissance et des Awacs (radars volants de longue portée). »
Un document (PDF) du département américain de la défense publié en mai 2009 suggère une autre utilisation des bases : la mise en œuvre d’« un spectre complet d’opérations dans une sous-région critique de notre hémisphère où la sécurité et la stabilité sont sous la constante menace d’insurrections narcoterroristes, de gouvernements antiaméricains, d’une pauvreté endémique et de constants désastres naturels ».
Lors du sommet de l’Union des nations sud-américaines (UNASUR) du 10 août 2009, plusieurs chefs d’Etat latino-américains avaient exprimé leur inquiétude. La décision de la Cour constitutionnelle colombienne ne les rassurera peut-être pas totalement, puisque tout suggère que le Congrès – où le nouveau président colombien, M. Juan Manuel Santos, dispose d’une majorité – ne verra pas d’objection à valider l’accord (lire « Continuité à la tête de l’Etat »). La voie (légale) s’ouvrirait alors à ce que Maurice Lemoine décrit comme des « missions de renseignement militaire sur l’ensemble de l’Amérique du Sud » et le « déploiement de troupes américaines » lors « d’éventuelles opérations ouvertes et/ou clandestines, en Colombie et dans la région ».