Le scénario est bien rodé. Des violences commises par des déséquilibrés immédiatement qualifiés de « terroristes » ou de « djihadistes » par le gouvernement, une réaction politico-médiatique entre élans compassionnels, bons sentiments et appels à la « fermeté républicaine » contre la « barbarie », rassemblements en hommage aux victimes… et un tour de vis sécuritaire.
La fusillade de Charlie Hebdo, en raison de la gravité de l’attaque, a sur tous ces points atteint des sommets inédits. Minutes de silence, drapeaux en berne, journées de deuil national, manifestations de solidarité émaillées de « dérapages » anti-Islam, grande marche républicaine symbolisant l’union sacrée des politiques contre « la barbarie et le terrorisme » et à laquelle s’est associée la totalité des partis du système et des organisations de l’antiracisme institutionnel, slogans de soutien omniprésents, déclarations martiales des responsables politiques en dépit des zones d’ombre qui brouillent cette nouvelle affaire, à l’image de celles des attentats du 11 Septembre.
Le parallèle a d’ailleurs été fait, notamment par Plantu qui l’a qualifié de « 11 Septembre de la pensée libre » mais probablement sans penser à cette dimension des événements… ou par d’autres, non sans arrière-pensée belliciste. Il faut dire que les activistes ont visé là l’un des centres névralgiques du système de domination médiatique : Charlie Hebdo, passé du scato-gauchisme au néoconservatisme bon teint, s’est fait une spécialité dans la discrimination antimusulmane sous couvert de « liberté d’expression » (pourtant à géométrie bien variable par les temps qui courent) avec la bénédiction des élites politiques qui n’ont jamais ménagé leurs efforts pour le soutenir, en particulier au moment du procès des caricatures.
Et pour cause… Les colonnes du journal accueillent régulièrement la fine fleur de l’atlantisme dans sa version la plus dure, notamment des journalistes de la mouvance néoconservatrice du Cercle de l’Oratoire : Caroline Fourest, qu’on ne présente plus, Robert Misrahi, Mohamed Sifaoui (lire ici l’article du site Antineocons). Le journal s’est notamment ilustré en publiant un « manifeste des 12 », dénoncé à juste titre par la Ligue des droits de l’homme, sous-titré « ensemble contre le nouveau totalitarisme » qui n’est rien de moins qu’une déclaration de guerre contre la menace islamique assimilée à la barbarie et au totalitarisme :
« Après avoir vaincu le fascisme, le nazisme, et le stalinisme, le monde fait face à une nouvelle menace globale de type totalitaire : l’islamisme. »
On a déjà vu analyse plus nuancée…
La question qui vient inévitablement (à tout esprit sensé) est pourquoi un telle saturation médiatique au risque de provoquer la nausée ? La réponse est dans les bénéfices que les responsables politiques tirent de cette affaire : diversion bienvenue dans un moment de crise de légitimité politique du pouvoir, flicage des populations avec un renforcement du plan Vigipirate et de nouvelles mesures annoncées par Manuel Valls pour répondre à la « menace terroriste », attaques contre certaines personnalités de la dissidence rendues une nouvelle fois responsables du drame et, cerise sur le gâteau, regrets affichés de Hollande « de ne pas être allés en Syrie » avec la volonté à peine voilée de réparer cette faute le plus tôt possible…
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