La présidente du Projet Aladin, une association internationale basée à Paris qui œuvre à faire connaitre l’histoire de la Shoah dans le monde musulman, et dont le travail est aujourd’hui internationalement reconnu, demande aujourd’hui au président Hassan Rohani de mettre un terme au négationnisme et à la banalisation de la Shoah, de faire cesser les déclarations antisémites des instances officielles iraniennes et d’arrêter le blocage gouvernemental depuis l’Iran, du site en persan du Projet Aladin.
« Les interviews du président Rohani, en septembre dernier à New York, nous avaient laissé espérer que l’Iran allait arrêter de nier et de banaliser la Shoah et cesserait ses déclarations antisémites véhiculées par les médias officiels », précise Anne-Marie Revcolevschi. « Mais, deux mois plus tard, il n’y a malheureusement rien qui montre que cette politique a été inversée. »
Pour Anne-Marie Revcolevschi, « derrière l’offensive de charme du président Rohani, on ne constate aucun changement pour ce qui concerne le négationnisme et l’antisémitisme officiels » :
Le site web gouvernemental Monazereh.ir, qui appartient à « Islamic Republic of Iran Broadcasting (IRIB) [1] » vient de publier le 11 novembre un article antisémite visant le ministre français des Affaires étrangères, Laurent Fabius :
« Selon l’historien français, Robert Faurisson, Fabius est un juif qui lorsqu’il était président de l’Assemblée nationale, a préparé l’adoption de la loi Gayssot-Fabius en 1990 en se servant de la profanation d’un cimetière juif dont les sionistes eux mêmes étaient les auteurs. Selon cette loi, toute personne qui met en doute l’existence des chambres à gaz ou le nombre exagéré de six millions de juifs tués pendant la Seconde Guerre mondiale sera passible d’emprisonnement, devra payer une amende, perdra son travail et verra sa vie, comme celle de ses enfants et de sa famille, devenir insupportable… Voici l’un des services rendus par Fabius au sionisme en France. »
Le Projet Aladin a relevé la liste des 204 livres exposés à la Foire du livre de Téhéran de mai 2013 dont les contenus étaient soit ouvertement antisémites, soit négationnistes, soit banalisant l’holocauste. À ce jour, le président Rohani n’a donné aucune instruction aux agences gouvernementales responsables de ces publications de cesser la publication et la diffusion de ces livres.
Le site du Projet Aladin en persan, qui présente des informations historiques sur l’histoire de l’holocauste et sur les relations entre juifs et musulmans, en arabe, persan, turc, anglais et français, vient d’être bloqué par le gouvernement iranien. Auparavant, il recevait des milliers de visites, chaque mois, d’internautes à travers l’Iran.
L’agence Fars vient de publier cette semaine un article de 1500 mots qui fustige le Projet Aladin, l’accusant d’être une initiative du sionisme international cherchant à convaincre les pays musulmans de « reconnaître la version sioniste inventée de l’Holocauste, afin de présenter la création du régime sioniste comme légitime et nécessaire ».
L’agence iranienne accuse le Projet Aladin d’être l’une des initiatives les plus importantes du sionisme international destinée à séduire les musulmans du Moyen-Orient et à influencer les opinions publiques dans les différents pays islamiques.
« Cette agence gouvernementale, en se livrant à de telles attaques, cherche à discréditer le Projet Aladin auprès des internautes, lecteurs et téléspectateurs iraniens qui consultaient notre site, lisaient nos livres ou ont pu regarder, sur des télévisions satellitaires, le film Shoah de Claude Lanzmann, que nous avons sous-titré en persan », s’indigne Anne-Marie Revcolevschi.
Elle rappelle que le Projet Aladin a été lancé sous le parrainage de l’UNESCO en 2009, avec le soutien du gouvernement français et un très grand nombre de personnalités politiques, religieuses et de la société civile musulmanes, afin de rejeter le négationnisme, de combattre l’antisémitisme et toutes les formes de racisme, de développer une éducation à la paix, et de renforcer les relations entre juifs et musulmans sur la base d’une connaissance et d’un respect mutuel à travers des programmes uniquement culturels et pédagogiques.
« Ce n’est pas ainsi que le président Rohani va nous convaincre qu’il a rompu avec son prédécesseur », ajoute la présidente du Projet Aladin. « S’il veut que nous ayons confiance dans ses propos, il doit nous le prouver par des actes. Et jusqu’ici, ce n’est pas le cas ! »