Alain Soral nous parle du basculement d’un monde régi par la loi du père et l’ordre naturel, vers une société sommée, sous peine de castration judiciaire, de contrevenir aux axiomes moraux et aux rudiments anthropologiques qui ont bâti sa civilisation : imposée sans consultation ni concertation, la transgression de masse est un renversement de paradigme pensé pour produire une onde de sidération collective, étape propédeutique à l’obtention du consentement au changement.
Il s’agit de vendre le désordre, les contre-valeurs, l’inversion normative, l’abolition des hiérarchies, les idéologies clivantes et les pratiques déviantes, comme des alternatives à cette sclérose morale qui fait obstacle à la démocratisation du jouir-pour-tous, à la communion du jouir-ensemble, et au pouvoir de jouir-de-tout. La massification de la transgression serait alors une avancée philanthropique nécessitant de mettre au supplice l’enfance, les résistances éthiques, la discipline religieuse, les évidences biologiques. Les esprits indociles qui interrogent le bien-fondé de cette déconstruction axiologique sont labellisés incarnation du fascisme réactionnaire.
Selon l’ethos luciférien, seules la régularisation de la déviance et la normalisation de l’ignominie délesteraient l’homme des vestiges d’une proto-histoire morale qui l’empêchent d’atteindre son apex divin : les idées en soi de Platon (le beau, le bien, la juste proportion), parce qu’elles sont des concepts limitants qui entravent l’homme dans sa marche ascensionnelle vers sa propre quête de divinité, sont donc promises à l’abrogation.
Si l’élévation du niveau critique est assimilée à du complotisme, c’est parce qu’elle éveille des résistances qui contrarient le programme de flatterie des instincts et des fantasmes qui réduisent le citoyen à une mécanicité pavlovienne du besoin : prévisible, il est facile à dominer.
Toute l’intelligence conceptuelle de Soral consiste à proposer un dépassement de la description classique de « l’ingénierie par le chaos »© : le chaos n’est pas uniquement le modus operandi oligarchique de la manipulation des masses, mais la finalité eschatologique recherchée. Cerise décrit les mécanismes de la manipulation des comportements des masses, tandis que Soral décrypte les inversions paradigmatiques du satanisme imposé aux masses. Alors que l’ingénierie est pratiquée à l’insu des masses, la réinitialisation satanique sollicite leur consentement au remplacement des atavismes culturels.
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