Le cinéaste est en passe d’être mis en liberté conditionnelle. L’occasion pour les représentants de l’élite intellectuelle française d’en remettre une couche, de se féliciter de la libération de l’un des leurs, creusant encore un peu plus le fossé qui les sépare de Français — qui, eux, considèrent que les faits reprochés à Polanski sont graves.
Deux mois après son arrestation en Suisse, Roman Polanski va être libéré sous condition, a-t-on appris hier. Aussitôt, ses plus fervents défenseurs se sont répandus en congratulations diverses. De Jeanne Moreau à Luc Besson en passant par Mathilde Seigner (la belle-soeur de Polanski) qui en a profité pour remercier Nicolas Sarkozy, sans qui rien de tout cela n’aurait été possible, on se serait cru à une remise des Césars. Avec, en maître de cérémonie, un Bernard-Henri Lévy plein d’ardeur. Pour lui, Roman Polanski est une victime. Un « homme de 76 ans, père de famille », comme il l’expliquait sur l’antenne de RTL jeudi 26 novembre au matin, dont il dépeignait le calvaire de deux mois dans une « geôle » scélérate...
Libéré sous caution avec un bracelet électronique, le cinéaste avait très tôt été défendu par les intellos français qui se sont succédés à la radio pour hurler leur indignation. L’indignation du public contre une justice qui aurait fait une exception dans une affaire de viol ? Non : l’indignation d’une élite qui n’aime pas qu’on s’en prenne aux siens.
UNE ERREUR DE LA JUSTICE AMÉRICAINE COMPARABLE POUR BHL À LA PEINE DE MORT...
Ce qui émeut Bernard-Henri Lévy, c’est qu’on ait lâché ce grand cinéaste qu’est Roman Polanskiaux mains de la justice ! Plutôt crever que de laisser un tribunal décider s’il y a ou non prescription après 30 ans pour attouchements sexuels sur mineurs quand il s’agit d’un artiste ! « Lorsque la loi américaine pratique la peine de mort, on est tous les premiers à se dresser pour dire que c’est de la barbarie », a ainsi asséné BHL. Comme si la rétention préventive de Polanski sur ordre de la justice américaine pouvait être comparée à la chaise électrique !
Bernard-Henri Lévy pousse même jusqu’à dire que les intellectuels ne se sont pas assez mobilisés pour venir en aide au réalisateur ! « Je me rappelle de la réaction de Daniel Cohn-Bendit. Je ne voudrais pas être grossir ou être mauvais camarade m’enfin il était pas le mieux placé pour venir le lendemain de l’arrestation. » Très grande classe dans le box du tribunal de l’élite !
Là où le bât blesse, c’est que Polanski n’est pas un journaliste kidnappé par une milice en plein reportage de guerre ou un militant de la paix prisonnier d’une junte : c’est un justiciable parmi des millions d’américains. Et là où BHL voit une « faute » datant de 30 ans, beaucoup jugent que c’est un crime et considèrent que la justice seule peut statuer. « Y’a des tas de gens qui se sont manifestés sans qu’on leur ai rien demandé ! », déplorait le philosophe sur RTL. En effet.