Depuis 1903, un mur de trois mètres de hauteur coupe en deux une plage payante de Trieste pour « ménager la décence ». Hommes et femmes se dorent au soleil et se baignent séparément dans la mer adriatique. Jamais abandonnée, cette « tradition » est devenue une curiosité locale dont les habitants de cette ville italienne semblent s’accommoder, malgré le sexisme évident du dispositif.
Un journaliste de Libération qui s’était rendu sur place décrivait ainsi la plage de la Lanterna, surnommée « El Pedocin » par les Triestins, dans les colonnes du journal en 2014 :
« Un édifice bétonné, assez classique, typique des plages italiennes aménagées. Avant de passer au guichet, les familles et les groupes d’amis se disloquent, les filles d’un côté, et les garçons de l’autre. Voilà la spécificité des bains publics de la Lanterna : ils ne sont pas mixtes, fait unique sur une plage européenne. »
Cet été, une journaliste italienne, Micol Brusaferro, a publié un livre consacré à cette incongruité. Interviewée par le quotidien allemand Süddeutsche Zeitung, elle explique que les Triestines apprécient particulièrement la présence de ce mur qui sépare à la fois la plage et la zone de baignade :
« La séparation entre les sexes rend plus libre, en particulier du côté des femmes. Les Triestines aiment cet endroit car elles peuvent s’y baigner de manière décontractée. 90% des femmes sont seins nus et on voit des strings très échancrés sur la place, ce que les femmes n’oseraient jamais porter dans des bains public mixtes. »
[...] Les habitants ne se plaignent pas de cette séparation. Micol Brusaferro rapporte en effet qu’un sondage a été organisé il y a quelques années et que « l’immense majorité s’est prononcée pour le maintien de la traditionnelle séparation des sexes ».