Pierre Milza, dans sa biographie consacrée à Voltaire en 2007, écrit :"Voltaire éprouve un immense plaisir à voir le misérable bourg de Ferney se transformer sous ses yeux en une agglomération prospère, avec ses quatre fabriques de montres, ses trois autres petites manufactures et ses nouvelles maisons abritant des artisans cossus. Tout cela est fort éloigné de mes préoccupations ordinaires, écrit-il en 1770 au marquis de Laborde, mais j’ai le plaisir de décupler les habitants de mon hameau, de faire croître du blé là où il croissait des chardons, d’attirer des étrangers, et de faire voir au roi que je sais faire autre chose que " L’histoire du siècle de Louis XIV et des vers".
En 1770, Voltaire était âgé de 76 ans... A cet âge fort respectable, il aurait pu vivre retiré, en simple rentier. Ce n’est pourtant pas le choix qu’il fit. Témoignant d’un certain mépris, dans sa jeunesse, pour le bas peuple qu’il qualifiait volontiers de "canaille", Voltaire au fil de l’âge s’est rapproché du peuple et l’expérience tout à la fois économique et philanthropique menée à Ferney en apporte la preuve tangible. Selon l’adage commun, il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas d’avis, et si une chose est bien certaine concernant François-Marie Arouet, c’est qu’il était tout le contraire d’un imbécile...
Par ailleurs l’auteur de l’article fait le procès bien injuste à Voltaire de ne pas avoir su assurer sa succession à la tête de son entreprise manufacturière de Ferney. Est-ce sa faute si son neveu et sa nièce ne furent pas à la hauteur de l’enjeu ? La succession entreprenariale a de tout temps été un problème difficile à régler et elle le demeure toujours, alors pourquoi donc faire ce mauvais procès à Voltaire ? Quant à son legs, il est en premier lieu bien entendu littéraire et philosophique. L’édition des œuvres complètes de Voltaire effectuée à sa mort à Kehl , rassemble 70 volumes de 500 pages chacun...Une œuvre protéiforme, évolutive qui comporte des écrits de jeunesse et des écrits rédigés à l’âge mûr donc empreints d’une sagesse toute autre...
Qui dit mieux ? Combien de ces ouvrages ont lu l’auteur de l’article et ceux qui ont la dent si dure vis-à-vis de Voltaire ?