Nietzsche est un parfait représentant de la culture bourgeoise dont de la culture allemande du XIXe fut la matrice et l’archétype. C’est très bien expliqué par Norbert Elias qui montre comment en Allemagne noblesse et bourgeoisie ne se mélangeaient pas alors qu’elles le faisaient France. En Allemagne, la culture fut le moyen pour la bourgeoisie de rivaliser avec la noblesse, d’affirmer son droit à l’existence, alors qu’en France, la culture de la bourgeoisie fut reçue de la noblesse, c’est-à-dire que la question du droit à l’existence ne s’est pas posée pour elle, c’est tout le contraire, la culture bourgeoise française a critiqué la noblesse décadente au nom de la culture et des valeurs aristocratiques dont elle avait hérité de cette même noblesse. Mais en Allemagne, il ne pouvait qu’apparaître un Nietzsche, un type soucieux de santé et de supériorité (son souci traduit le manque ou au moins le doute, mais le doute suffit), et qui monte facilement sur ses grand chevaux dès qu’il est question de sa place dans le monde (le bourgeois type plein d’incertitudes mondaines et de souvenirs humiliants). C’est pour ça que le romantisme eut autant de succès en Allemagne mais si peu en France, à cause de la généalogie aristocratique de la culture bourgeoise en France : on doute de plein de choses en France, mais pas de notre place dans le monde, et donc nul besoin de s’enfler, de se grandir et de se grossir à se faire péter le cerveau. Stendhal, Balzac, Flaubert, Maupassant, Proust, Céline, des bourgeois pourtant, sont des héritiers de la culture aristocratique. Et Nietzsche est bien l’archétype de la culture bourgeoise.