Dans ce fil de commentaires on voit quelques uns, d’origine turque ou non, défendre Erdogan.
Je pense que la question pour un anti-impérialiste, n’est pas là.
La question c’est : quid de l’après-Erdogan ? Car Erdogan va léguer un pouvoir immense, une présidence monarchique, un Parlement soumis, une armée aux ordres, des médias aux ordres, un État moderne tutélaire, et une société désormais habituée à cette tutelle et au confort moderne.
Alors les AKPistes et d’autres répondront : oui, et tant mieux, car c’est pour le bien, c’est pour la grandeur de la nation, la grandeur de l’islam et du combat antisioniste !
Sauf que voilà, gagner une élection présidentielle, ça demande de l’argent, des soutiens dans les médias. Un jour ou l’autre, l’AKP ne gagnera plus (d’ailleurs elle vient de perdre sa majorité au Parlement).
Et le pouvoir qui aujourd’hui s’accroit "au nom du petit peuple", demain pourra l’utiliser contre lui. L’islamisme et l’antisionisme n’auront été qu’un moment prétextuel à la croissance de l’État et du marché. Erdogan n’a-t-il pas fait campagne sur l’augmentation du PIB ? Et si, demain, il fallait abandonner l’islamisme et le nationalisme pour augmenter le PIB ?
C’est là le sens de la phrase extraordinaire de Pierre Lellouche en 2004 : « que la rivière de l’islam se noie dans l’océan de la démocratie et des droits de l’homme ». Sous Erdogan, entre 2003 et 2023, les citoyens turcs n’ont pas cessé de s’entendre dire qu’ils devaient accepter le résultat des élections, et accepter les réformes. Francis Cousin l’avait très bien vu en comparant le "putsch raté" turc de juillet 2015 au "putsch raté" espagnol de février 1981.
Voilà pourquoi l’OTAN s’est servie des Frères musulmans : pour les piéger dans la "démocratie" libérale.