Alors que les dirigeants politiques et économiques maintiennent leur confiance en une politique de rigueur, le FMI ose prôner l’inflation pour relancer l’économie. Une analyse iconoclaste décryptée par Laurent Pinsolle.
À la surprise générale, c’est le chef économiste du Fonds Monétaire International, Olivier Blanchard, qui vient de lancer le débat, qui a été repris dans de nombreuses publications. Mieux, on note parfois une certaine ouverture à un idée qui aurait été autrefois écartée sans considération.
Devant la pyramide de dettes que constituent l’ensemble des pays développés depuis deux ans et pour encore quelques années, il est finalement assez logique de se poser la question d’une légère relance de l’inflation pour en faciliter le remboursement. Olivier Blanchard propose un autre angle d’analyse, à savoir que le faible niveau d’inflation actuel limite la marge de manœuvre de la politique monétaire. Pour lui, relever l’objectif de 2 à 4% pourrait donner une certaine souplesse.
Il faut dire que le cas du Japon apporte de l’eau au moulin de son analyse. En ayant un niveau d’inflation très faible, il est difficile de relancer l’économie en baissant les taux d’intérêts. Il est donc clair que si le rythme d’inflation était un peu plus élevé, la banque centrale pourrait agir de manière plus importante, ce qui permettrait peut-être de soulager le levier budgétaire… En outre, on ne peut pas dire que le passage de 3 à 2% d’inflation dans la zone euro ait eu un impact très positif sur l’économie…
MIEUX VAUT 3-4% D’INFLATION QU’UNE CROISSANCE FAIBLE
Même s’il faut se féliciter que le Monde termine son premier papier sur une note positive, en citant un maître de conférence de Paris-Dauphine qui affirme « mieux vaut 3-4% d’inflation qu’une croissance faible et du chômage », nous en sommes encore aux prémices d’un véritable débat. Il suffit de constater que l’idée est rapidement qualifiée de « loufoque » en Allemagne. D’ailleurs, au moindre signal statistique, beaucoup agitent trop rapidement le spectre du retour à l’inflation aux Etats-Unis.
Pourtant, il est très peu probable que l’inflation s’emballe outre-Atlantique : avec 10% de taux de chômage, les salaires ne risquent pas de « déraper ». Et ces inquiétudes excessives font perdre de vue un débat pourtant pertinent : la cible d’inflation actuelle n’est-elle pas trop basse ? En outre, l’argument selon lequel l’inflation serait « le vol des petites gens » est faux puisque c’est depuis que l’inflation est très basse que les inégalités salariales ont explosé, au contraire des périodes de forte inflation.
S’interroger sur le niveau adéquat d’inflation est un vrai débat. Il est heureux que les médias s’en fassent aujourd’hui l’écho, même s’ils démontrent encore une trop grande fermeture à toute politique différente de celle menée par la BCE aujourd’hui.