Le groupe jihadiste Boko Haram s’est livré à une démonstration de force, le 14 février, en envahissant pendant quelques heures la ville de Gombe, capitale de l’État du même nom.
Des centaines de jihadistes, tous vêtus de tenues militaires, sont en effet arrivés à bord de pick-up et de motocyclettes et ont progressé jusqu’au centre-ville sans avoir rencontré la moindre résistance de la part des forces de sécurité habituellement sur place. Ensuite, ils ont distribué des tracts appelant la population à ne pas voter lors aux prochaines élections qui auront lieu en principe le 28 mars prochain.
« Quiconque se réclame de l’islam doit s’éloigner des bureaux de vote, parce que nous allons attaquer les bureaux », était-il écrit sur ces tracts, rédigés en haoussa, l’un des langues parlées au Nigéria.
Ensuite, les jihadistes se sont retirés de Gombe, toujours sans avoir eu à livrer de combat. D’après un témoin, ils ont pris la direction de la ville de Dakin-Kowa, située à une quarantaine de kilomètres de là.
Même si un avion militaire a survolé la capitale régionale quand les jihadistes y paradaient, les forces nigérianes ont une nouvelle fois fait preuve de passivité, laissant ainsi une liberté de mouvement à Boko Haram.
D’ailleurs, les autorités nigérianes semblent totalement dépassées et impuissantes devant la menace que représente le groupe jihadiste, qui ne cesse d’étendre le territoire qu’il contrôle sur lequel il a instauré un califat, à l’image de ce qu’a fait l’État islamique en Irak et en Syrie. Ce qui a conduit le Tchad à s’impliquer militairement contre Boko Haram.
En outre, le président nigérian, Goodluck Jonathan, candidat à sa succession en mars, ne sait plus sur quel pied danser. En décembre, l’on apprenait qu’Abuja avait décidé de se passer d’une aide militaire américaine, consistant à la formation d’un bataillon destiné à combattre Boko Haram, les autorités nigérianes ayant mal pris le refus de Washington de leur livrer des hélicoptères d’attaque.
Aux États-Unis, l’aide au Nigeria ne va pas sans poser de problèmes. Ainsi, la loi Leahy interdit toute formation à des unités militaires coupables de violations des droits de l’homme sur des civils. Or, l’armée nigériane est loin d’être irréprochable sur ce point. En outre, elle est gangrenée par la corruption : bénéficiant d’un budget de près de 5 milliards de dollars, ses soldats sont moins bien équipés que les jihadistes qu’ils ont à combattre. D’où les réticences américaines…
Quoi qu’il en soit, 2 mois après avoir mis un terme à la formation d’un bataillon par l’armée américaine, le président nigérian a de nouveau demandé une aide militaire aux États-Unis. Mais, visiblement, ce n’est pas l’envoi, à nouveau, d’instructeurs qu’il souhaite mais une intervention comme celle en cours en Irak et en Syrie.
« Est-ce qu’ils ne combattent pas l’EI [ndlr, l’État islamique] ? Pourquoi ne viennent-ils pas au Nigeria ? », a-t-il en effet demandé lors d’un entretien accordé au Wall Street Journal. « [Les Américains] sont nos amis. Si le Nigeria a un problème, et bien j’attends des Etats-Unis qu’ils viennent nous aider », a-t-il ajouté.
Pour le moment, il est question de mettre en place, sous l’égide de l’Union africaine, une force multinationale de plus de 8 000 hommes et dont les contingents seront fournis par les pays de la commission du lac Tchad.