On peut se demander pourquoi en France, ni les pouvoirs publics ni les médias ne prêtent d’attention aux affrontements militaires qui de préparent inévitablement dans le Pacifique Ouest entre une coalition menée par les États-Unis, avec le Japon, les Philippines et même l’Australie, d’une part, la Chine d’autre part.
Même si la Chine n’a pas hésité à renforcer sa présence dans la mer de Chine sud, en construisant des bases dans les atolls Spratly et l’archipel des Senkakus, elle ne dispose pas de moyens militaires suffisants pour peser sérieusement en cas de conflit avec les États-Unis et le Japon. Nous avons publié plusieurs articles relatant cette situation.
Par contre depuis 5 mois les risques s’accroissent. Après 20 ans d’absence, l’Amérique militaire est de retour. Washington met en place des systèmes antimissiles dans les Philippines, couvrant la Corée du Sud et le Japon (U.S. Theater High Altitude Area Defense ou THAAD). Comme nous l’avions indiqué en ce qui concerne le réarmement de l’Ukraine, ces missiles peuvent très facilement prendre un rôle offensif et porter des têtes nucléaires. Le rapport dit « Air Sea Battle strategy » ou « Joint Concept for Access and Maneuver in the Global Commons », que nous avions cité, propose différentes façons de neutraliser les défenses côtière de la Chine, voire de frapper au cœur de celle-ci. D’ores et déjà l’US Navy a déployé deux porte-avions avec leurs groupes de bataille dans la zone. Elle en possède 8 autres non loin. La Chine n’y dispose que d’un petit porte-avions.
Le gouvernement chinois a appelé les États-Unis « à la prudence » selon les terme du ministre de la Défense Yang Yujun. Le journal gouvernemental Global Times a prévenu que les actions militaires américaines élevaient le risque d’une « confrontation physique avec la Chine ». Rien n’a été dit cependant concernant les réactions chinoises concrètes. Mais vu l’extrême inégalité des moyens conventionnels en présence, dont souffre la Chine, l’escalade devrait logiquement dériver en confrontation nucléaire.
Le Japon
De son côté, et c’est tout aussi inquiétant, le gouvernement japonais actuel, ayant repris les traditions offensivement nationalistes de ses prédécesseur avant 1945, a laissé entendre que lui non plus ne céderait pas aux « intimidations » de la Chine. Le 2 août, le ministre japonais de la Défense a accusé la Chine de s’engager dans « des actes dangereux pouvant avoir des conséquences non voulues ». Le Premier ministre Shinzo Abe milite en ce qui le concerne, avec l’appui des États-Unis, pour une levée des accords internationaux interdisant au Japon de se doter de forces offensives significatives. La plupart des incidents entre avions et navires de guerre se produisent à l’initiative du Japon. Ils n’ont pas encore dégénéré, mais ils peuvent le faire à tout moment.
On peut se demander pourquoi les États-Unis courront de tels risques. Une des réponses présentées par les experts est qu’ils sont effrayés de voir la Chine, selon le FMI, être devenue depuis 2014 la première puissance économique mondiale. Compte tenu de sa population, elle pourrait les supplanter dans leur rôle traditionnel de chien de garde (big dog) dans le Pacifique. Les États-Unis ne pourront résister à cette évolution inévitable qu’en continuant de s’efforcer de mettre en place l’équivalent d’un OTAN regroupant tous les pays asiatiques soumis à leur influence. Ceci quels que soient les risques de guerre mondiale.
Pour l’Europe, le Pacifique est loin et elle a d’autres soucis. Jupiter aveugle ceux qu’il veut perdre.