Avant que le cinéma français ne devienne clairement un outil de formatage des jeunes dans les mains du pouvoir, les stars avaient encore la tête sur les épaules. Le talent était inversement proportionnel à son étalage.
Mais si Gabin surgissait aujourd’hui, les médias ne lui laisseraient aucune chance. Pensez donc : français, patriote, média-sceptique, fumeur, bon vivant, pas corporate pour deux sous, légèrement agoraphobe, lourdement misanthrope, dégoûté de la caste politique, anarchiste tendance Céline… tout faux, le gros ! C’est pas de la nostalgie, c’est du brutal.
Sophia Aram contre « les connards »
On s’est réjoui trop vite de la disparition tragique de Pascale Clark, la muse gravosse de la gauche paléolithique. Même voix crispante, même sous-culture politique, même désir de revanche psycho-sociale, Sophia Aram reprend le flambeau de l’idiote utile qui voit des « connards » partout. Elle en profite pour attaquer (elle ne fait qu’agresser les gens différents d’elle) Eugénie Bastié, la nouvelle Natacha Polony, qui a elle aussi disparu de nos écrans. Périco Legasse l’a peut-être enfermée dans sa cuisine.
La différence entre une vedette populaire et une vedette fabriquée par la hiérarchie
Il y a 50 ans, en France, les vedettes parlaient peu, mais bien. Aujourd’hui, on parle beaucoup, et mal. Et puis, il faut faire le tri entre fausses et vraies vedettes. Car depuis la croissance du pouvoir des médias (qui est plus que le quatrième du nom), l’information est remodelée par le haut avant d’arriver en bas. Ces messieurs nous disent (dit la chanson) que untel ou unetelle est une vedette, et ils enfoncent le clou, jusqu’à ce que ce soit le cas.
La méthode Goebbels n’a pas été perdue pour tout le monde. Ainsi, on nous présente Sophia Aram comme une « humoriste », alors qu’elle n’est qu’une rageuse de base. Une mauvaise âme, pour parler plus correctement. Ou la fille de Vanessa « Grosse Tête » Paradis et Johnny « Booze » Depp comme une actrice et une mannequin, alors que c’est une adolescente déjà tourmentée par son look, son poids, et sa réputation (son poids médiatique). Une camisole dont on ne se sort pas facilement. Et quand on en sort, c’est en lambeaux.
Les vessies ne sont pas des lanternes ni les torchons des serviettes
Les médias, cette machine à juger qui remplace tranquillement la Justice, fabriquent des réputations, positives ou négatives, au gré de leurs besoins. Qui ne sont que des commandes. Justement, « les médias », c’est qui ? Eh bien pas tant de monde que ça, si on ne garde que les directions des journaux (les journalistes obéissent et ne comptent pas), des télés et des radios, puis leurs actionnaires et propriétaires, sans oublier les associations de maîtres-chanteurs ou les groupes de pression. Ça fait une petite caste qui décide de qui a le droit de dire quoi et comment. Le grand public, peu soupçonnable de malice et encore moins de vice, suit en général les oukases venus d’en haut. La majorité joue et gagne... à tous les coups.
Il est cependant une partie du public qui dénonce ou résiste à cet ordre des choses. On retrouve ces salopards à mauvaise image dans ce qu’on appelle la réinfosphère. Ils ne l’entendent pas de cette oreille, et le font savoir : non, Sophia Aram n’est pas drôle, c’est une énième propagandiste de la dominance déguisée en drôlesse. Et les masques tombent vite, de plus en plus vite. La vilenie ressort derrière les vannes, le ressentiment pas beau disgracie le discours. Eh non, Lily-Rose Depp-Paradis n’est pas une actrice. Seulement une petite fille paumée par ses parents. La lancer dans le show-biz à cet âge ne vaut pas mieux que de l’abandonner en forêt. Tout ça pour du pognon et une gloire incertaine.
La véritable information est celle qui change l’ordre des choses
Mais ne focalisons pas sur ces victimes-profiteuses de la Machine à fausser le jugement. Les médias servent à altérer les opinions du peuple, à les neutraliser ou les retourner, au gré des besoins ou des craintes de la dominance. L’appareil informatif a perdu son rôle de relais entre haut et bas, élite et peuple. Il est devenu une entreprise délibérée de remodelage de la vérité. Tout pue le faux. Les seules vérités qui y sévissent encore sont sans conséquences politiques. Des semi-vérités pasteurisées : Julie Gayet a imposé Audrey Azoulay à son amant président de la République, Jérôme Cahuzac a planqué du fric socialiste en Suisse, DSK est un cochon récidiviste... Ce qui ne change pas notre vie. C’est le critère déterminant.
Pour finir cette chronique désolante sur une note sexy positive, voici le teaser, pardon, le donneur d’envie, de la prochaine émission d’Énora Malagré – la chienne (de garde) de Cyril « 250 Briques » Hanouna – baptisée En vrac : plus de pouf, de fun, plus de poufun (le slogan est de nous).
Gabin, va te rhabiller, gros.