Il est inutile de critiquer François Hollande : d’abord il s’en fout, ça fait 20 ans que tout le monde lui tire dessus, et il a eu le temps de se cuirasser, et du coup les balles à blanc rebondissent sur son armure. C’en est même dangereux pour ses détracteurs. Tout le monde aura noté un regain d’optimisme chez ce président déchu, probablement dû à son envie de refaire un mandat, un petit CDD de 5 ans. Pourquoi pas, on a bien eu Sarkozy comme président. On n’est plus à ça près. Ce qui est intéressant avec ce type, c’est sa communication.
Prenez sa sortie du jour : il a promis, devant les forces de l’ordre réunies à Calais, de démanteler définitivement la jungle du même nom. Il faut savoir que cinq jours plus tôt, l’autre démago de service, son alter ego à droite, Nicolas Sarkozy, avait déjà fait le voyage dans le Nord (ça change du yacht de Bolloré hein) pour rafler les voix identitaires au FN.
Il faut savoir lire le "françois" : il y a ce qu’il dit, et ce qu’il faut comprendre, qui sont toujours deux choses différentes, et souvent contradictoires. On se doute qu’en décidant de vider la baignoire sale de Calais, il veut tout simplement mettre du migrant partout ailleurs. Même s’il affirme le contraire :
« Nous n’allons pas, pour démanteler un campement de 7 000 personnes, multiplier d’autres campements partout sur le territoire. Il s’agit de véritables centres, en dur, limités en nombre, 40 à 50 personnes, capables de fournir un appui pour des procédures administratives. Voilà ce qui est digne, ce qui est ferme, pour que la France puisse assurer ses devoirs. »
Hollande, le roi de l’euphémisme, ne ment jamais, mais il faut savoir le traduire. Il précise son annonce : on va pas multiplier les « petits Calais », juste faire des centres en dur. Ce qui est pire. Certes, il y a l’alibi humanitaire, mais on comprend vite qu’il va être compliqué de bouter ces vrais clandestins mais douteux réfugiés hors du royaume de France. Capable de dire une chose et son contraire dans la même (courte) phrase, Hollande est un acrobate de la rhétorique. On sent la bonne note à l’oral de l’ENA. Un bon point pour lui, un mauvais pour la France.
Au lieu de paralyser la police et la gendarmerie avec le cas des faux migrants, mais vrais envahisseurs – sur ordre oligarchique –, Hollande aurait dû envoyer l’armée pour rétablir l’ordre à Calais. Cependant, ce n’est pas le boulot de l’armée.
- Les riches sont bien gardés
« Quand on regarde les spots de recrutement de l’armée de terre, on a l’impression d’un métier qui bouge, mais on déchante rapidement »
D’aileurs, les militaires de l’Armée de terre en ont marre de Sentinelle, cette opération de communication pour faire croire aux Français qu’ils sont en sécurité. On dirait que Sentinelle est là pour pallier les « failles » du renseignement en matière terroriste. Les soldats en ont plein le dos (ça évite de dire « le cul ») de faire les cons dans les rues, à attendre la sortie des écoles privées juives, au détriment des autres communautés. Sentinelle, c’est la privatisation de la protection civile, au bénéfice d’une minorité très agissante, et très influente.
La hiérarchie miliaire, qui fait remonter la grogne des randonneurs en uniforme, s’est heurtée à la hiérarchie communautaire en question, qui a demandé des assurances à ce sujet. Et comme tout le personnel politique gouvernemental est à la solde de la même communauté, les soldats ne sont pas prêts de reprendre leur vrai travail. C’est à se demander si toute cette opération de poudre aux yeux n’est pas, au fond, une opération de neutralisation de l’armée française. La garde nationale arrive, mais là aussi, il y a manip : 10 000 bénévoles pour assurer la sécurité des Français, alors que l’antiterrorisme a toujours un attentat de retard...
- Le rap « non communautaire » de Kery James
Heureusement, il y a Mouloud. Mouloud, c’est le survivant des pires années Canal, celles qui suivent le départ des dirigeants historiques, soit une bonne décennie. Depuis, la chaîne cryptée ne fait que descendre, hormis la parenthèse Méheut-Denisot. L’OPA de Bolloré a fait fuir les animateurs historiques, trop chers, et ceux qui restent sont d’ambitieux et piètres chroniqueurs montés en grade pour la forme. Résultat de la normalisation, une fuite ininterrompue d’abonnés, et les nouvelles propositions choc d’abonnements à tarif réduit viennent trop tard : le temps de la télé payante est passé. Il fallait faire ça il y a 20 ans, quand le cash dégoulinait de partout. C’est très français, de niquer la poule aux œufs d’or, ça rappelle l’histoire du Minitel, qui aurait pu cartonner s’il n’avait pas été aussi surexploité. Mais ne refaisons pas l’histoire, et revenons sur le Gros Journal, le nom de la petite émission de Mouloud, la caution immigrée de Canal. Ou ce qu’il en reste.
Ce soir, Mouloud reçoit Kery James (de son vrai nom Alix Mathurin), le rappeur qui a peur. Peur de franchir la ligne rouge. On s’attend à une grosse attaque de l’oligarchie, et on finit par une phrase anti-Cahuzac. Le caillou sur l’ambulance qui a perdu une roue... Kery a souffert de la discrimination, et il pense que c’est parce qu’il est noir. Il oublie que les pauvres en bloc, les paysans, les beaufs, sont discriminés en France depuis, tiens, 1984, l’année de la naissance de Canal+ et de SOS Racisme. Sûrement une coïncidence socialiste !
Kery : « On a été manipulés depuis la marche qu’ils appellent la marche des Beurs... Certains se sont présentés comme nos amis comme nos alliés... »
Mouloud : « Tu parles de SOS Racisme, du PS... »
Kery : C’est comme ça qu’ils aiment les Arabes, les Noirs, asservis... Aujourd’hui on a besoin de notre indépendance. »
Vis-à-vis des Blancs ? C’est pas très clair, là. Kery nous explique alors qu’il hésite à acheter une maison (déjà, il a les moyens de s’en payer une alors que nous, on a déjà du mal à payer le loyer) :
« Je me pose la question si je vais acheter ou pas... Quel est le sens d’acheter dans un pays qui m’a discriminé... Et aujourd’hui on me discrimine en tant que musulman. »
C’est vrai que noir et musulman c’est pas le meilleur moyen d’intégrer une école de commerce, de nos jours, en France. On voudrait rigoler un peu, on dirait que Kery n’a qu’à changer de religion et de couleur de peau.
Mouloud : « Y a une chose que tu as affirmée, c’est ta négritude. »
- La négritude, c’est le contraire de la blanchitude ?
Cependant, il y a une solution qui fonctionne pour tous, quelle que soit sa couleur de peau et sa religion, une solution par le haut, qui consiste à échapper à son essentialisme, à ses déterminismes, qui sont si réconfortants. La pensée, c’est l’inconfort, Kery.