1ere partie :
Dans cet article, j’expose l’aspect trompeur qui est malheureusement inhérent à certaines idéologies antiracistes. Je reviendrai sur le rôle de l’antiracisme dans le maintien à la fois du sionisme et du discours de gauche.
« Nous ne voyons pas les choses comme elles sont, nous les voyons comme nous sommes. » (Anaïs Nin)
Il n’y a pas besoin d’être un génie pour se rendre compte que les gens qui sont identifiés comme étant sionistes et juifs sont en quelque sorte surreprésentés dans les affaires du monde d’aujourd’hui. Les pro-guerres et les think tanks néoconservateurs ont été massivement saturés de juifs sionistes tout comme le sont les défenseurs de « l’interventionnisme moral » au sein des médias. Les « cerveaux » derrière la soi-disant doctrine de Bush. c’est-à-dire « la guerre contre le terrorisme », étaient Paul Wolfowitz et Scooter Libby, et si cela ne suffisait pas, au cœur de la tourmente financière nous trouvons aussi des personnes juives, ainsi que des institutions financières qui sont clairement reconnaissables comme juives - comme Lehman Brothers, Goldman Sachs, Alan Greenspan, Bernie Madoff, et bien d’autres.
Il faut ici se poser une question évidente - pourquoi est ce que les Juifs du monde entier devraient se sentir concernés en aucune façon par ces faits ? Pourquoi est ce qu’ils devraient se sentir concernés par des actions ou des idées avec lesquelles ils n’ont sans doute rien à voir ? Pourquoi mon voisin juif, également soumis à la crise financière et qui n’a aucun lien avec Madoff, Wolfowitz, David Aaronovitch ou Lord « cash point » Levy, devrait se sentir concerné par les bévues financières ou impériales actuelles pour lesquelles il n’a aucune responsabilité ? Pourquoi mes amis musiciens juifs qui n’ont pas de liens avec Israël, l’AIPAC, la FCI, HNC, Nick Cohen ou Alan Greenspan devraient se sentir coupables de crimes ou de mesures prises par d’autres tout simplement parce qu’ils se trouvent également être juifs ?
Est-ce qu’un Français ou un Irlandais en Amérique se sentirait menacé ou potentiellement discriminé en raison de révélations concernant quelques-uns de leurs compatriotes qui auraient été impliqués dans un scandale majeur colossal ? Par conséquent, la question que je soulève ici est simple : pourquoi des Juifs devraient se sentir coupables de crimes commis par d’autres personnes ? D’autres personnes qu’ils ne connaissent pas et avec qui ils ne sont pas affiliés ?
Et la réponse est tout aussi simple - des juifs en tant qu’individus n’ont aucune raison d’assumer la responsabilité d’actes commis par d’autres Juifs. Mais la vérité sur ce sujet, c’est que beaucoup de Juifs sont extrêmement préoccupés par ces maladresses actuelles : certains se sentent coupables et beaucoup – tout du moins potentiellement - se sentent menacés. Je dirais qu’une telle réaction mérite toute notre attention.
Parmi mes autres péchés, je scrute régulièrement les médias juifs, et il me paraît évident que les institutions juives sont mises en alerte par n’importe quel scandale même si celui-ci n’est que légèrement associé avec à des protagonistes ou des institutions juives. Les médias juifs donnent l’impression que chaque bévue associée à un Juif est très susceptible de se transformer en une vague d’antisémitisme.
Nous sommes donc amenés à nous demander si la peur juive de l’antisémitisme est effectivement justifiée, ou si elle est simplement conduite par un « fantasme de destruction. »
Dans mon dernier livre "Quel Juif Errant ?", je prétends que la peur juive de l’antisémitisme est en grande partie auto-infligée et a très peu à voir avec la réalité environnante. Les Juifs ont tendance à se considérer comme une tribu et la plupart des Juifs sont soumis à un degré d’endoctrinement culturel racialement motivé. D’une part, la religion du judaïsme enseigne à ses disciples que « tout les Israéliens sont responsables les uns envers les autres »(Kol Yisrael areivin zeh l’zeh), tandis que d’autre part, les non religieux, les laïcs et les Juifs émancipés qui s’identifient politiquement, idéologiquement et socialement en tant que Juifs, évoluent aussi au sein de cadres juifs ethno-centrés.
Même au sein du mouvement de solidarité palestinien, nous trouvons des Juifs qui opèrent au sein de cellules juives telles que JBIG (Juifs pour le boycott des produits israéliens) et IJAN (Réseau international des Juifs antisionistes). D’une certaine manière, ils se sentent également principalement « responsables les uns envers les autres. »
Cette lecture des communautés juives contemporaines peut révéler pourquoi beaucoup de Juifs sont alarmés par les crimes commis par d’autres Juifs - des Juifs qu’ils ne connaissent même pas.
Je peux penser à trois raisons pour une telle situation :
1/ Projection : Parce que certains Juifs se considérant comme appartenant à une tribu racialement exclusive, ils tendent à croire que d’autres - les non Juifs - les considéreront aussi comme tels. En d’autres termes, beaucoup de Juifs projettent leurs propres symptômes ethnocentriques sur les goyim. Ils pensent que les goyim sont aussi racialement motivés qu’ils le sont eux-mêmes.
2/ Culpabilité : Parce que certains Juifs ayant tendance à se considérer comme appartenant à une tribu racialement exclusive, ils se sentent coupables de ne pas arrêter les membres de la tribu qui sont impliqués dans des bévues majeures.
3/ Conjonction : à la fois 1 et 2. Il devient alors de plus en plus clair, qu’au cœur de la peur juive de l’antisémitisme et de l’intolérance anti-juive on trouve une orientation raciale juive, qui se manifeste sous diverses formes de projections et de culpabilités. Bien qu’il soit clair que les Juifs ne forment pas une race, il y a peu de doute que la judéité - et particulièrement le discours laïc juif – soit racialement, ou tout du moins tribalement motivée. Peu de gens sont conscients de la tension raciale qui existe entre les différentes communautés juives, les juifs ashkénazes et les juifs séfarades. En Israël, le don de sang des citoyens noirs d’origine éthiopienne est interdit pour des « raisons médicales ». Le système juridique d’Israël est saturé de lois discriminatoires racistes et suprémacistes contre la population arabe et non juive.
Dans une certaine mesure, la crainte de l’antisémitisme, inhérent au discours politique laïc juif et sioniste, est alimentée par la conviction que « l’autre », c’est à dire le goy, pourrait bien être tout aussi motivé par une idéologie raciste de même nature.
Il faut dire que certains Juifs pourraient offrir des raisons de rejeter l’explication ci-dessus : ils pourraient faire valoir que l’histoire juive (c’est-à-dire la chaîne sans fin de Shoah), prouve que « les fils d’Israël » ont raison d’être en état d’alerte constant. Ils pourraient dire que les Juifs doivent être constamment conscients du fait que leurs voisins pourraient se retourner contre eux à un moment donné.
Je suggère que nous avons affaire ici à une situation similaire à celle de « l’œuf et de la poule » : alors que certains Juifs seraient d’accord entre eux pour dire que l’antisémitisme est en grande partie une « maladie irrationnelle », quelques historiens comme Bernard Lazare* ont été assez courageux et honnêtes pour se demander exactement pourquoi et comment, les Juifs ont réussi à s’attirer tant de douleurs sur eux-mêmes.
Lire le dernier ouvrage de Gilad Atzmon :
*Lire "L’Antisémitisme, son histoire et ses causes" de Bernard Lazare, disponible sur Kontre Kulture :