1968, la télé de papa, la politique de papa, la femme de papa, le fils de papa, la fille à papa, le boulot de papa, tout part en vrille, le monde bascule, les Stones aussi. Après leurs disques mâtinés de blues noir, de reprises et d’hommages, voilà qu’ils pondent un magnifique et inattendu Beggars Banquet, le banquet des mendiants, avec une pochette au niveau.
Faut savoir qu’à l’époque, souvent, on achetait les disques sur la pochette, n’ayant pas de moyens d’écouter les chansons à l’avance, à moins de les choper sur Radio Caroline qui émettait d’un bateau ou, plus tard, sur les radios libres françaises, pour ne parler que de chez nous.
Le disque des Stones dégouline de pépites, un véritable Eldorado musical, un sommet du rock, et ils ne feront jamais mieux. Dans le genre, personne ne fera mieux, d’ailleurs.
Jean-Luc, un cinéaste suisse issu de la Nouvelle Vague aura l’idée – le bienheureux ! – de poser sa caméra espion au cœur des séances d’enregistrement du mythique Sympathy for the Devil, que nous ne traduirons pas, par sympathie pour Dieu.
I stuck around St. Petersburg
When I saw it was a time for a change
Killed the Czar and his ministers
Anastasia screamed in vain
I rode a tank, held a general’s rank
When the Blitzkrieg raged and the bodies stank
Naturellement, Godard nous refourgue sa compagne en date, Anne Wiazemsky, sur laquelle on va s’arrêter 5 minutes. Tout vient de Wikipédia mais il faut aussi chercher un peu :
Anne Wiazemsky est la fille de Claire Mauriac (1917-1992), elle-même fille de François Mauriac, et du diplomate Yvan Wiazemsky (1915-1962), issu d’une famille princière russe, émigrée en France après la Révolution russe de 1917. Ses parents se sont rencontrés à Berlin où sa mère, qui s’était engagée à la Croix-Rouge, travaillait au service des personnes déplacées : elle a donné naissance à sa fille Anne dans le quartier de Berlin-Charlottenbourg. La rencontre et le mariage de Claire Mauriac et Yvan Wiazemsky sont racontés dans son livre, Mon enfant de Berlin. Elle est la sœur de Pierre Wiazemsky, dessinateur de presse connu sous le pseudonyme de Wiaz.
Wallah, une princesse russe née en Allemagne juste après la war, la classe. En plus ça résonne étrangement avec les paroles de Sympathy for the Devil. Ceci explique peut-être quelques prises de positions politiques sensibles chez Jean-Luc, on dit ça comme ça, on jette le truc en l’air, savoir où ça retombe...
Aujourd’hui, Jean-Luc n’est plus, Anne non plus, ni son frère le grand dessinateur Wiaz, Mai 68 a coulé, et déçu, mais il en reste le meilleur, la musique, l’extraordinaire créativité musicale de la tranche 1965-1975. Justement...