Le débat télé idéal doit réunir un juge de paix LICRA, une shoatiste hystérique, un député analphabète, un artiste aligné, une avocate inutile, un postillonneur prudent, un pleurnichard perdu, un écrivain jaloux, et un authentique intellectuel. C’est exactement ce qu’a préparé Frédéric Taddeï le 10 janvier 2014 sur France 3 : Agnès Tricoire, Hector Obalk, Jean-François Kahn, Jean Bricmont, Eduardo Rihan Cypel, Émilie Frèche, Marc-Édouard Nabe, Alain Jakubowicz et Gérald Garutti ont fait péter l’audimat. La résistance, incarnée par Bricmont, secoué de toutes parts, sort malgré tout gagnante de ce chemin de croix.
Jean Bricmont : « Si vous voulez savoir qui a réellement le pouvoir, demandez-vous de qui on ne peut pas parler. Sans commentaires. »
Jean-François Kahn : « C’est une phrase antisémite. »
Bricmont : « Pourquoi c’est antisémite ? »
Agnès Tricoire, avocate, membre de la Ligue des droits de l’homme : « Les interdictions préalables c’est très dangereux surtout quand elles sont basées sur des concepts aussi mous que la dignité humaine. »
Alain Jakubowicz, avocat de la LICRA : « Écoutez, une interdiction c’est jamais une victoire, c’est toujours une défaite pour la démocratie. »
Eduardo, c’est le nouveau venu chez les comiques politiques. Une sorte de Richard Anthony de l’indignation unilatérale, qui mêle démonstrations tordues et concepts nébuleux. Avec lui c’est l’assurance de glissades syntaxiques créatives, d’envolées lyriques foireuses, qui mettent son camp dans l’embarras et le public en joie. Un benêt fabuleux, le plus sûr ami des antisionistes. Si le lobby en est à faire entrer sur le terrain ce genre de plouc, c’est qu’il n’a plus de banc, comme on dit au foot.
Eduardo Rihan Cypel : « Et je n’ai aucune inquiétude contre la liberté en général et encore moins contre la liberté d’expression. »
« Il y a eu un homme, Dieudonné, qui a déjà récidivé… Y a eu des phrases que vous avez vous-même citées, sur Patrick Cohen, qui sont comme vous l’avez dit, un regret de l’existence des chambres à gaz pour pouvoir cramer et exterminer monsieur Cohen et peut-être d’autres encore. »
« La liberté d’expression n’est pas aujourd’hui menacée dans notre pays, la preuve, on n’aurait pas le débat ce soir ! »
« La liberté d’expression elle est profondément, euh, protégée. Et je pense que ce sont des gens comme des professionnels de la haine comme monsieur Dieudonné M’Bala M’Bala qui nient la liberté puisqu’ils nient la possibilité même d’un certain nombre de personnes de pouvoir exister parce qu’ils sont juifs ou parce qu’ils viennent d’autres races. »
« En revanche Dieudonné quand il va sur le terrain de l’antisémitisme il nie la possibilité d’un certain nombre d’êtres humains d’exister puisqu’il veut les conduire dans des chambres à gaz ! Donc il est dans la négation même de ce qui permet la liberté ! »
Jean-François Kahn a reniflé le boomerang derrière la victoire écrasante du lobby sur Dieudonné. Il essaye de prévenir les vainqueurs, qui ignorent ses gesticulations. JFK crie au loup, mais à des sourds. Le loup le croquera aussi.
JFK à Rihan Cypel : « C’est l’échec total de la méthode ! Depuis 20 ans, vous employez monsieur, contre le fascisme qui est un danger terrible, contre l’antisémitisme qui est un danger terrible… Vous avez imposé vos méthodes, vos tactiques, vos stratégies, c’est un échec total, ça fait le jeu du fascisme, ça fait le jeu de l’antisémitisme ! »
« Moi personnellement… je pense que rien n’est comparable à la Shoah, que la Shoah est un massacre en soi insupportable et que toute banalisation est scandaleuse… Cela étant, vous allez voir si l’interdiction est maintenue… Mais vous imaginez la pub que ça fera pour les autres qui diront, qui diront deux poids deux mesures… Vous n’êtes pas conscients du mal que fait dans la tête l’argument deux poids deux mesures ! »
Hector Obalk : « Qu’est-ce que vous répondez à ceux qui disent deux poids deux mesures ? »
Alain Jakubowicz : « Deux poids deux mesures à quoi ? Où y a-t-il deux poids deux mesures ? »
On pouvait attendre d’un homme de théâtre qu’il défende légèrement Dieudonné, au moins par confraternité. Hélas, Gérald Garutti a monté Haïm, une pièce sur le violoniste du ghetto sauvé de l’enfer par la musique. Injouable.
« Je pense que la liberté d’expression ne va pas jusqu’à la liberté d’extermination. »
« Il se trouve que sur ce sujet-là, sur la Shoah, je viens de passer 5 ans à raconter l’histoire d’un homme qui a survécu à Auschwitz ! »
« L’antisionisme est le cache-sexe moderne de l’antisémitisme. Il s’agit pas de ne pas critiquer Israël. On peut critiquer Israël et d’ailleurs les Israéliens le font très bien eux-mêmes. Les autres aussi le font. Simplement à un moment il y a des limites. Et la démocratie périt de ne pas se fixer de limites. »
À peine Caroline Fourest, notre Femeniste heureusement habillée, disparaît des radars, qu’apparaît Émilie Frèche, dont le rôle consiste à hurler « antisémite ! » aux invités un peu trop lucides. Son livre courageux et le film à venir sur la mort d’Ilan Halimi lui offrent ses galons démocratiques et la propulsent sur les plateaux.
« Alors on parle de liberté d’expression mais d’exprimer quoi ? Son antisémitisme ? »
« Aujourd’hui en France l’antisémitisme tue. »
« Faut-il lui accorder une tribune, faut-il accorder une tribune aux antisémites ? Faut-il faire la place à des gens qui incitent à la haine raciale, qui dressent les communautés contre les autres et qui portent des mots qui amènent à une violence physique et à la mort ? »
Frèche lance à Bricmont : « Monsieur en a marre de la Shoah, en fait. »
D’un geste, Jakubowicz, surnommé affectueusement Jaku par la fausse opposante Agnès Tricoire (avocate de la Ligue des droits de l’homme), peut ruiner la vie d’un artiste ; d’un autre, lancer une carrière. Comme le commandant Amon Goeth du camp de concentration de Plaszow, héros négatif de La Liste de Schindler, il a le pouvoir de pardonner. Sauf que Jaku n’est pas chrétien pour trois sous. Il offre néanmoins une porte de sortie honorable à l’esclave affranchi Dieudonné : la soumission. Ou la mort.
Jaku parle des spectateurs de Dieudonné : « Ces gens je crois que nous avons la possibilité de leur parler, et de leur faire comprendre qu’ils sont dans l’erreur. Y a une discussion, démocratique, celle-là elle doit avoir lieu, et c’est le rôle de ce, d’associations citoyennes comme la nôtre de mener ce travail pédagogique pour leur montrer que non, Dieudonné M’Bala M’Bala n’est plus un humoriste ! »
« C’est un spectacle qui est de A à Z un monceau d’antisémitisme et de délits. »
« S’il change son spectacle, la jurisprudence ne s’appliquera pas à l’interdiction, et à ce moment-là évidemment, il pourra se produire comme tout humoriste. »
« On a fait un mauvais sort au Conseil d’État. D’abord, s’agissant de la forme. C’est vrai que nos concitoyens sont très surpris que la justice puisse être aussi rapide… À une situation exceptionnelle la jurisprudence a appliqué une décision exceptionnelle. Je voudrais rappeler qu’à juste titre, ce très haut magistrat de la plus haute juridiction administrative de notre pays, qui évidemment n’est pas suspect d’une quelconque partialité, ce juge a rappelé un certain nombre d’évidences. »
Seul contre tous, Jean Bricmont, pourfendeur des imposteurs intellectuels et banni par l’intelligentsia pour ce crime, ne disposera pas du quart du temps de parole de Jaku, que tout le monde écoute religieusement, dans un silence de synagogue, sans jamais oser l’interrompre. On appelle ça le charisme.
Agnès Tricoire de Bricmont : « Laissez-le parler. On n’a pas interrompu Jaku qui a été très long… »
Bricmont : « J’espère qu’on décompte les arrêts de jeu. »
C’est le revenant de la semaine. Déjà qu’il avait mal digéré les 300 000 ventes de Houellebecq, mais alors là, la couverture médiatique de Dieudonné, plus le succès du site et des livres de Soral, c’est à en retourner sa veste ! Malheureusement, la tentative de Nabe, boycotté comme un pestiféré par la bande à Jaku, finira mal : il aura d’un côté le déshonneur du traître, et de l’autre la guerre avec ses vieux ennemis. À vous dégoûter de trahir la Cause.
« Le vrai fléau, c’est le conspirationnisme… C’est un travail néfaste et satanique, qu’ils diraient eux-mêmes d’ailleurs les complotistes, sur la vérité. Alors évidemment on peut trouver quelques excuses parce que les médias en particulier ont tellement menti ou plutôt ont atténué certaines choses et valorisé d’autres, qu’il y a une soif de vérité. Alors c’est un peu comme des gens qui sont dans le désert tout à coup ils trouvent un puits alors ils se jettent sur le puits et ils boivent l’eau qui est empoisonnée. Et le puits c’est Internet. Les sources d’Internet sont le plus souvent empoisonnées. »
Nabe de Dieudonné : « Et je voudrais qu’on voie son dernier spectacle car il est très faible… Il a fini par se prendre au sérieux ce qui est vraiment un grand drame pour un humoriste… Ce qu’il veut c’est finalement des rêves de petit Blanc, il veut un palais, se faire construire un palais au Cameroun, exploiter les pauvres gens qui le croient. »
La touche finale : « Dieudonné et Soral sont aujourd’hui les criminels de l’esprit, sont les propagandistes les plus importants en France et c’est pour ça qu’il faut absolument les combattre ! »
Aussitôt après sa tirade dans le dos, Nabe se fait exécuter par son « nouveau » camp. C’est Frèche qui s’en charge, menaçant l’animateur au passage.
Frèche à Taddeï : « Quelle est votre responsabilité de terminer un débat sur cette question de la liberté d’expression et d’inviter un antisémite sur ce plateau ? Parce que Marc-Édouard Nabe a publié, il n’a même plus d’éditeur, tellement ses textes sont antisémites ! Et vous donnez la parole et une tribune donc y a une part de responsabilité comme Soral, comme Renaud Camus, tous ces gens-là ! Je peux pas ne pas vous le dire ! »
Après la parenthèse enchantée de Nabe et la rafale Frèche, Jaku, ironique, lance à Taddeï : « En fait l’antisémitisme est quelque chose de tout à fait secondaire, qui est parfaitement tolérable, en réalité le vrai problème, le seul vrai problème, c’est le conspirationnisme ! »
Jaku de Nabe : « Effectivement nous n’avons jamais estimé devoir le poursuivre. Honnêtement, pas beaucoup d’intérêt. Franchement ce serait beaucoup apporter un intérêt démesuré à quelqu’un et à un pseudo écrivain qui ne le mérite certainement pas.
– Mais qui décide qui sont les écrivains en France, qui décide ? crie Bricmont.
– S’il met au sommet de tout le conspirationnisme, c’est bien pour happer effectivement tout le reste, et effectivement pour nier tout le reste. »
Bricmont : « Vous voyez de l’antisémitisme partout, même dans le fait que on fait venir Nabe, qui tape sur Dieudonné et Soral du début à la fin, qui s’attaque au conspirationnisme, on dit qu’il s’attaque au conspirationnisme pour ne pas s’attaquer à l’antisémitisme ! C’est-à-dire que dès qu’on dit quelque chose aujourd’hui en France, on est automatiquement suspect d’antisémitisme parce que on n’attaque pas l’antisémitisme !
– Ne soyez pas paranoïaque monsieur Bricmont, dit Cypel.
– C’est qui le paranoïaque, c’est vous qui êtes paranoïaque ! Vous voyez de l’antisémitisme même dans le fait de parler d’autre chose ! »