Le candidat à la présidentielle 2007 – et 2012 ? – devra trouver autre chose contre la délinquance « de BMW venues de Narbonne ».
Instaurer un couvre-feu à 22 heures pour les mineurs de moins de 17 ans dans son village de 441 habitants, voilà l’idée radicale qu’a eu le maire de Mailhac (Aude), Gérard Schivardi. Une décision prise le 19 mai, après plusieurs affaires : des comas éthyliques et un viol.
Seulement voilà, l’arrêté municipal a été considéré comme illégal par la préfecture de l’Aude. La sous-préfète de Narbonne, Marie-Paule Bardèche, l’a fait savoir à Schivardi lundi.
Motif ? En vertu d’une jurisprudence du Conseil d’Etat, le couvre-feu n’est possible que pour les mineurs de moins de 13 ans. Lui trouve cette limite d’âge « stupide ». Et, contacté par Rue89, assume totalement sa décision : « Depuis janvier, des BMW venues de Narbonne tournaient dans le village et ramenaient de la drogue et de l’alcool à Mailhac. Comme il y a beaucoup de surveillance en ville, les dealers se rabattent dans les communes. Puis une fillette de 13 ans a été violée par un adulte extérieur au village. J’ai agi car les enfants, c’est sacré. Il faut les protéger. »
A Mailhac, aucun fait de délinquance de mineurs la nuit
Mais l’ancien candidat des maires à la présidentielle de 2007, alors soutenu par le Parti des travailleurs, n’a pas le droit de son côté. Lui préfère dire qu’il ne savait pas. La sous-préfète a téléphoné au maire pour lui demander d’annuler l’arrêté, sous peine de poursuites judiciaires. Jointe par Rue89, Marie-Paule Bardèche explique pourquoi le couvre-feu de Schivardi était illégal : « Outre le problème d’âge, un couvre-feu doit être limité dans le temps et dans l’espace. Cela n’était pas le cas. Et Mailhac est une petite commune. Des faits de délinquance existent, mais les plaintes enregistrées concernant les mineurs sont peu nombreuses. Et aucun ne s’est déroulé pendant la nuit. Une patrouille de gendarmes circule entre Mailhac et Ginestat chaque nuit. »
Autrement dit, il n’y avait pas de raison valable pour instaurer une telle mesure. Une annulation que Schivardi ne digère pas :
« L’Etat abandonne ses jeunes. Et pourtant la jeunesse d’aujourd’hui, c’est un sacré problème. Il faudrait leur donner des cours de morale. »
Le soutien d’Alain Soral ? « Ça ne me dérange pas »
Schivardi aurait-il viré de bord ? Dans son combat pour la sécurité du village, il a reçu le soutien d’Egalité et réconciliation, l’association d’extrême-droite animée par Alain Soral. Rien d’encombrant pour Schivardi, qui se qualifie d’« homme de gauche » :
« Si des gens de droite et d’extrême droite soutiennent cet arrêté, c’est peut-être que cette idée là n’est pas si mauvaise pour protéger les enfants. A titre personnel, ça ne me dérange pas. J’aurai bien aimé que la soi-disante gauche le fasse aussi. »
Seulement, instaurer un couvre-feu n’est pas une décision banale. Il s’agit d’une restriction des libertés fondamentales. Et le maire a des prérogatives alternatives : il peut convoquer les familles, effectuer un rappel à l’ordre et signaler au procureur les mineurs qu’il estime en danger. La sous-préfète le lui a d’ailleurs rappelé.
Schivardi n’en a cure. Pour lui, c’est « du grand pipeau », une façon de ne pas régler le problème de la sécurité. Il voulait, à l’instar du maire de Mazamet (Tarn), une commune de 10 000 habitants, instaurer un couvre-feu estival. Sauf qu’à Mazamet, l’interdiction de circuler entre 22 heures et 6 heures ne concerne que les mineurs de moins de 13 ans, et est donc légale.
Les habitants de Mailhac étaient plutôt d’accord. Sauf un, qui l’a traité de « facho ». Et quelques jeunes, qui, d’après le Midi Libre, trouvaient ça « chiant ».
« “Depuis le 19 mai, le calme était revenu. L’arrêté a pris fin le 11 juillet à 14 heures. Vers minuit, on m’a signalé l’arrivée d’une première voiture”, s’énerve le maire de Mailhac. Il laisse désormais “ l’entière responsabilité aux parents de surveiller leurs enfants”. »
Futur candidat du Parti ouvrier indépendant ?
S’il jure ne pas avoir eu « d’arrières pensées politiques » en instaurant un tel arrêté, la proximité des échéances électorales laisse émerger un doute. Le 3 octobre, le Parti ouvrier indépendant, qui a succédé en 2008 au feu Parti des travailleurs, se réunit pour décider s’il présente un candidat en 2012. Et Gérard Schivardi est intéressé :
« Je ne dis pas non. Si les militants le souhaitent, j’irai. »
D’ailleurs, il s’empare avec facilité de l’habit de candidat. Rebondissant sur son positionnement politique, il se montre un brin provocateur.
« L’euro, j’étais contre, en 2007. Je constate que le FN a repris cela dans son programme. »
Il considère la crise économique comme la plus grande catastrophe depuis cinquante ans, prédit « une crise énorme à la fin de l’année 2011 », veut sortir de l’Union européenne et décrit les programmes de la droite et la gauche comme « bidons ». Autant de raisons qui l’incitent à vouloir se lancer de nouveau. En 2007, le candidat avait obtenu 0,34% des voix au premier tour.