Le gouvernement fédéral américain a affirmé mercredi son droit exclusif sur les États fédérés du pays à négocier rapidement avec la France des indemnisations de victimes et familles de victimes de l’Holocauste, aujourd’hui américaines, transportées par la SNCF entre 1942 et 1944.
Washington déclare ainsi vouloir garder la haute main sur les pourparlers commencés début février avec Paris et nie aux États fédérés américains le droit de légiférer en la matière. L’État du Maryland a en effet failli demander cette semaine à la SNCF, via un texte de loi, d’indemniser des victimes de la Shoah avant de pouvoir postuler à un contrat ferroviaire.
"Les États-Unis et la France ont entamé des négociations sur l’indemnisation de victimes de déportation par les chemins de fer français vers des camps de la mort et des camps de travail nazis ainsi que pour les familles des victimes", a rappelé dans un communiqué la porte-parole du département d’État, Jennifer Psaki.
"Nous avons pour but commun de conclure ces discussions aussi vite que possible", a-t-elle écrit.
Mais de "récentes initiatives de certains États, comme New York et le Maryland, ont commencé à poser de sérieux problèmes pour atteindre cet objectif" d’accord d’indemnisation, a déploré Mme Psaki.
Dans le Maryland, la SNCF a depuis lundi soir les mains libres pour postuler à un contrat de trois milliards de dollars. De fait, des élus de cet État fédéré ont finalement renoncé à demander à la SNCF d’indemniser les victimes avant de pouvoir postuler à cet appel d’offres portant sur la création et l’exploitation d’une ligne ferroviaire de 25 kilomètres.
Des élus dans l’État de New York (nord-est) ont aussi écrit à la SNCF en mars pour lui dire leur intention de la priver de contrats si elle n’indemnisait pas les victimes. Il existe des initiatives similaires en Californie (ouest) et en Floride (sud-est).
L’État fédéral américain "exhorte avec force toutes les parties concernées à éviter de prendre des mesures qui pourraient saper les discussions d’indemnisation en cours", selon Mme Psaki.
D’après elle, "un troisième cycle de négociations entre les États-Unis et la France se tient le 10 avril et les deux parties sont sérieuses et de bonne foi".
Les gouvernements américain et français sont donc en pleines tractations et d’éventuelles législations locales par des États fédérés compliqueraient ces pourparlers, explique-t-on au sein de l’administration américaine.
Le département d’État estime ainsi que "l’actuel dialogue américano-français représente le meilleur moyen de parvenir à un accord qui réponde aux inquiétudes exprimées par les élus des États" fédérés.
Côté américain, les négociateurs sont l’envoyé spécial sur les questions relevant de l’Holocauste, Douglas Davidson, et Stuart Eizenstat, conseiller spécial sur ce dossier du secrétaire d’État John Kerry. La délégation française est conduite par l’ambassadrice pour les droits de l’homme, Patrizianna Sparacino-Thiellay.
Les négociations entre la France et les États-Unis visent à examiner le cas des Américains qui ne remplissaient pas les critères français de réparation, soit parce qu’ils avaient émigré, soit parce qu’ils étaient arrivés sur le sol français après le 1er septembre 1939.
Les deux gouvernements veulent boucler leurs discussions avant la fin de l’été et le nombre d’anciens déportés concernés est d’environ 250 selon l’association américaine Coalition for Holocaust Rail Justice.
Voir aussi, sur E&R : Racket mémoriel transatlantique !