Derrière l’affaire Leroy Merlin/Castorama, on ne trouve que des perdants et un seul vainqueur.
Parmi les perdants : la classe politique dans son ensemble. Et plus particulièrement le PS et l’UMP.
En voulant encadrer le travail dominical et refuser sa généralisation (à raison), le PS est accusé par l’UMP de façon fort malhonnête de vouloir "empêcher les Français de travailler et de les appauvrir" et d’un autre côté on reproche (à juste titre) aux sociaux-démocrates de céder aux caprices des grandes boîtes en organisant une réunion d’urgence dès le lendemain des ouvertures illégales pour trouver notamment une solution concernant ces deux géants du bricolage ainsi que pour d’autres entreprises qui souhaitent élargir le travail au dimanche.
L’UMP est également coincée. En chantre du libéralisme débridé (euh... des libertés économiques pardon !), la formation "de la droite et du centre" ne sait plus sur quel pied danser afin de satisfaire ses maîtres (les grands dirigeants de l’économie française) sans s’aliéner une partie non négligeable de son électorat, en l’occurrence les catholiques, toujours attachés pour une bonne partie d’entre eux au repos dominical.
Ce qui prouve une nouvelle fois le caractère irréconciliable entre libéralisme et conservatisme. Les deux ne cessent de se télescoper. Et malheureusement dans 99% des cas le premier l’emporte sur le second. La loi d’airain de l’économie prenant presque toujours le pas sur les valeurs.
Autre victime dans cette affaire : les syndicats.
Ils ont été dans leur rôle. Ils ont rappelé un certain nombre d’éléments : l’importance du repos hebdomadaire, que la loi devait être respectée, qu’ils sont là pour défendre les droits collectifs, qu’il ne faut pas compter sur eux (ou pour une bonne partie d’entre eux) pour accompagner le détricotage du modèle social français et que le principe du volontariat dans le travail du dimanche est très largement une fumisterie puisqu’on sait qu’en dernier lieu c’est le patron qui décide.
Et pourtant, ils ont subi les mêmes attaques que le PS dans cette affaire. Fillon s’est très largement illustré avec ses diatribes sournoises et perfides.
Mais les plus grands perdants demeurent évidemment les salariés. Il est indéniable qu’en cas de fermeture dominicale brutale nombre de salariés subiront une perte de pouvoir d’achat substantielle.
Ce qui pose la seule vraie question de ce débat : la politique des bas salaires pratiquée dans notre pays depuis plusieurs décennies. Politique délétère qui pousse nombre de nos compatriotes à tout sacrifier pour pouvoir boucler un peu plus aisément leur fin de mois.
Des fins de mois qui commencent désormais les trente derniers jours comme disait Coluche.
Le repos dominical reste pour nombre de Français le seul jour où l’on peut se retrouver en famille. Et pour d’autres un jour consacré à l’évasion culturelle, à la découverte, à la promenade, à la littérature etc. Et pour d’autres (encore nombreux), le dimanche demeure le jour de la messe.
Bref, le dimanche est un jour qui logiquement échappe au consumérisme ambiant et à la marchandisation globale de la vie.
Crime de lèse-Marché !
Et c’est en cela que le seul vrai vainqueur de cette affaire est le grand patronat et plus spécifiquement la grande distribution qui est très en pointe dans cette offensive.
Par conséquent, si la grande distribution est grande vainqueur, on en déduit logiquement qu’il y a un autre grand perdant qu’on avait pas cité jusqu’alors : le petit commerce.
Nombre de commerçants de villes moyennes ou de zones rurales vont-ils être condamnés à mettre la clef sous la porte en raison de ces ouvertures dominicales ? C’est un risque réel. Ce qui ne fera que tuer un peu plus la vie des centre-villes et entraînera des pertes d’emploi.
Alors où est le gain au final ?