Le 18 novembre dernier, à la veille du Sommet de Copenhague, le Fonds des Nations unies pour la population (FNUAP) publiait un rapport sur l’impact de la croissance démographique sur le climat.
A l’époque, Le Monde avait couvert ce rapport, « selon lequel la natalité galopante des pays en développement est l’un des principaux moteurs du réchauffement et l’un de ses premiers risques ». L’article du Monde mentionnait notamment qu’« une autre étude tout aussi récente citée par le Fnuap conclut qu’un dollar investi dans la planification familiale et l’éducation des filles réduit les émissions de gaz à effet de serre au moins autant qu’un dollar dépensé dans l’énergie éolienne ». Malgré les avertissements du FNUAP, le sujet démographique semble cependant être encore tabou. C’est en tout cas ce que regrette amèrement Tom Levitt, journaliste à The Ecologist, dans un article intitulé « Climat : stabiliser la population mondiale » et paru dans le dernier numéro de L’Ecologiste. Il regrette en effet que « les politiques et même certaines grandes associations écologistes ne veulent pas soulever le problème » de la croissance démographique.
En fait, ce n’est pas qu’elles soient en désaccord, mais c’est une question de tactique. Ainsi, pour Tom Picken, des Amis de la Terre, cité par Levitt, « aborder le problème par le biais de l’inégalité dans l’accès aux ressources est la façon la plus efficace de réduire les émissions globales ». Interrogé aussi par The Ecologist, « Greenpeace dit (…) que toute tentative de mettre le sujet de la population sur la table serait contreproductif ». Par ailleurs, Yvo de Boer, le responsable de la Convention-cadre des Nations unies sur le changement climatique « est réticent à aborder le sujet ». Même s’il admet que « la pression démographique est un facteur majeur dans l’augmentation des gaz à effet de serre », Yvo de Boer estime qu’une politique de réduction démographique « mène sur des terrains mouvants en matière morale ». Mais Tom Levitt ne désespère pas pour autant de voir ce tabou levé. Il mentionne le rapport 2008 « Planète Vivante » du WWF et les travaux de l’Optimum Population trust qui, tous deux, ne s’embarrassent pas de considérations morales sur la réduction de la population mondiale. Tom Levitt conclut en affirmant que « la prise de conscience progresse », mentionnant à titre d’exemple John Beddington, nouveau conseiller du gouvernement britannique, qui a récemment évoqué le problème de la croissance démographique.
Et en France…
Aujourd’hui, rares sont ceux qui en France s’avancent sur cette question polémique de la démographie. Dans la tradition de René Dumont, qui déclarait en 1999 que « le XXe siècle est un siècle maudit. Il n’y a jamais eu autant de conneries que durant ce siècle. La première étant l’explosion démographique. », on trouve évidemment la revue L’Ecologiste, mais aussi le député Vert Yves Cochet, l’eurodéputé Europe Ecologie Jean-Paul Besset ou encore le nouvel allié d’Europe Ecologie : Antoine Waechter, président du Mouvement écologiste indépendant (MEI). En effet, dans un communiqué du 24 novembre 2009 concernant le rapport du FNUAP, le MEI « qui se bat depuis des années pour faire reconnaître l’importance du facteur démographique dans la crise écologique, se réjouit de cette prise de position, qui brise le tabou démographique, au plus haut niveau des instances internationales ». Dans ce même communiqué, le MEI « rappelle la position de René Dumont qui est la sienne », en reproduisant une citation de l’agronome écologiste qui conclut : « Des mesures limitatives autoritaires vont donc devenir de plus en plus nécessaires, mais elles ne seront acceptables que si elles commencent par les pays riches et par l’éducation des autres. » Rajoutons que le MEI avait organisé en août 2009 un séminaire sur la démographie et que, dans un texte sur cette thématique, Antoine Waechter affirmait : « Pour stabiliser au niveau de 2005 l’impact de l’Humanité sur les ressources et les écosystèmes de la Terre, tout en permettant à chacun de vivre selon les standards français, la population devrait se réduire à 1,7 ou 2 milliards d’individus. » Réduire la population mondiale de 5 milliards d’individus, en voilà un projet ambitieux !
Enfin, sur le site « planète attitude, la communauté du WWF en France », Michel Tarrier, naturaliste et chroniqueur à la revue du WWF France, a créé un groupe « démographie responsable » dans lequel les débats sur la surpopulation sont absolument décomplexés. Tarrier n’hésite pas à dire qu’« il faut réhabiliter Malthus » ou que « le WWF est une ONG éco-malthusienne parce que lucide et bienveillante ». Il faut dire que Michel Tarrier connaît bien le sujet puisqu’il est l’auteur, avec sa fille Daisy (responsable des partenariats au WWF France), du livre Faire des enfants tue…