La publication des noms des « parrains » des candidats à la présidentielle est-elle anticonstitutionnelle ? Le Conseil d’Etat a annoncé, jeudi 2 février, qu’il avait transmis au Conseil constitutionnel une question préalable de constitutionnalité sur cette publication, à la demande du Front national.
Les Sages doivent rendre leur décision avant le 22 février, l’envoi officiel des formulaires de parrainage étant prévu à partir du 24 pour une remise au plus tard le 16 mars au soir. Si le Conseil constitutionnel décidait d’imposer l’anonymat des parrainages, on reviendrait à la situation qui existait avant 1976, époque où il fallait seulement 100 parrainages et où ils n’étaient pas publiés. Mais d’autres pistes de réforme existent.
1. La dispense de parrainages
En octobre dernier, le sénateur radical Jean-Louis Masson (qui a accordé son parrainage à Nicolas Dupont-Aignan) a déposé une proposition de loi rétablissant le secret des parrainages, mais dispensant aussi de leur recueil les candidats des partis ayant obtenu au moins 5% des voix au premier tour des législatives précédentes.
Restée dans les tiroirs du Sénat pour l’instant, cette proposition dispenserait cette année l’UMP, le PS et le MoDem, mais pas les communistes et le FN, qui avaient plafonné en juin 2007 au même score, au centième près : 4,29% —le FN avait en revanche largement dépassé les 5% en 2002. Mais il « libèrerait » les signatures normalement destinées aux grands candidats, qui pourraient se reporter sur d’autres.
2. Le double parrainage
L’idée a été avancée par le maire UMP de Lons-le-Saunier Jacques Pélissard, également président de l’Association des maires de France, dans un récent entretien à la revue spécialisée L’Hémicycle:elle donnerait à chaque maire un parrainage « de soutien », pour « un candidat de cœur », et un autre « républicain » pour un candidat « dont il estime la présence ou les idées dans le débat présidentiel normales ». Dans le même temps, afin d’éviter une explosion du nombre de candidats, le nombre de parrainages nécessaires pourrait passer à 1.000.
3. Le parrainage par davantage d’élus
Fin 2007, le comité sur la réforme des institutions présidé par Edouard Balladur pointait l’existence« de véritables campagnes de démarchage, dont le moins que l’on puisse dire est qu’elles ternissent l’image de la démocratie ». Il suggérait donc la suppression des parrainages au profit d’une présélection des candidats à bulletin secret par un collège électoral de 100.000 élus incluant des délégués des conseillers municipaux, un peu à l’image de celui qui élit les sénateurs.
Reste à savoir à quelle hauteur serait fixée la barre. « 5% ? Cela correspondrait à 5.000 voix obtenues. Or, même si le secret du vote protège les membres du collège, on peut se demander si un candidat issu des extrêmes aurait sa place dans le peloton d’arrivée. 1% et trop de candidats seraient susceptibles d’affluer », s’interrogeait en 2008 une constitutionnaliste, Sophie Lamouroux. Rappelons que le FN, par exemple, ne compte qu’environ 180 élus locaux (conseillers régionaux, généraux et municipaux).
4. Le parrainage par les citoyens
Le comité Balladur avait aussi suggéré qu’un candidat puisse se faire parrainer par un certain pourcentage de citoyens qui lui apporteraient leur signature sur Internet (dans un récent entretien, le constitutionnaliste Guy Carcassonne évoquait le chiffre de 500.000 ou 1 million), mais évoquait à l’époque des « obstacles techniques » liés notamment au contrôle des signatures.
Un récent projet de loi voté par l’Assemblée nationale permet cependant ce type de démarche pour soutenir une demande de référendum par des parlementaires, avec une procédure de contrôle : un futur décret pourrait imposer à l’électeur qui veut soutenir une demande de référendum de donner en ligne son nom, son prénom, ses date et commune de naissance et le nom de la commune où il est inscrit comme électeur, et ces informations pourraient ensuite être vérifiées par rapprochement avec le fichier général des électeurs et électrices.