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Quand l’Ordre fait désordre : soutien au docteur Nicole Delépine

Il y a quelques jours, le conseil de l’Ordre des médecins dont on a décidément quelques difficultés à comprendre la mission, voire à se convaincre de la légitimité, a finalement décidé de sortir de sa léthargie, malheureusement pas pour la bonne cause, mais pour inquiéter six médecins sommés de s’expliquer sur des propos jugés outrageux, voire trompeurs ; des médecins qui ont eu l’audace de défendre le soin et la liberté de soigner, la liberté de penser.

 

Parmi ces élus, car finalement il s’agit d’être fiers de cette désapprobation en haut-lieu, il y a un médecin désormais bien connu de France-Soir par ses très nombreuses contributions ces derniers mois : le docteur Nicole Delépine.

J’ai souhaité rebondir sur cette énième provocation de sorte qu’elle soit au contraire l’occasion, le prétexte d’un hommage appuyé, un hommage à la mesure du courage et de l’honnêteté de cette grande dame, cette guerrière du soin, sourde aux compliments, trop pudique souvent pour accepter les éloges. J’espère qu’elle me pardonnera cette entorse ...

Je n’ai pas de lien avec le monde médical ; j’ai eu la chance jusqu’à présent de ne rien lui devoir que de très ordinaire. Cette tribune est donc celle d’une catégorie visiblement marginale voire négligeable pour le conseil de l’Ordre : celle des patients potentiels ou avérés ; c’est aussi celle d’une étudiante en maths qui en rencontrant par hasard il y a presque 20 ans Nicole Delépine au travers d’un livre : Neuf petits lits au fond du couloir (paru chez Michalon en 2000) a regretté pour un instant de ne pas voir fait médecine. Celle enfin d’une enseignante, qui pour ses enfants, n’auraient pas voulu d’autre pédiatre.

Dans Le JDD du 22/12/20, une esquisse de portrait est proposé ; plutôt une caricature. Nicole Delépine est tout d’abord présentée comme « un médecin qui dérange » (Le Monde 2104) ; par les temps qui courent, on envie de dire : « c’est bon signe et même plutôt flatteur ; prometteur tout au moins ».

Et en effet, elle a refusé l’ordre établi, le fameux sérail, quand il lui semblait illégitime, trop rigide pour être vrai, trop rigide pour être sincère ; elle a surtout eu le tort tout au long de sa carrière de tout mettre en œuvre pour rendre ou garantir au patient une autonomie en faisant sienne cette citation de Marie Curie : « dans la vie, rien n’est à craindre ; tout est à comprendre ».

Etre un « patient » (ie « celui sur qui on agit »), c’est presque toujours « subir », et on a trop souvent le sentiment que la blouse blanche est rassurée par ce déséquilibre qu’elle revendique et entretient quand elle ne le provoque pas ; cette distanciation sociale et humaine est peut-être simplement là pour se protéger, éviter d’être submergé, mais elles nous étouffent ...

On se retrouve alors seuls face contre terre au point d’avoir des difficultés à se souvenir de La Boétie quand il nous rappelait : « ils ne sont grands que parce que nous sommes à genoux ».

Mais quand on écoute le docteur Delépine, on comprend au contraire qu’il existe encore des médecins qui n’hésiteront pas une seconde à se mettre à notre hauteur ; ces mêmes médecins qui vont tout mettre en œuvre envers et AVEC nous pour nous aider à nous relever.

Plus loin, on lit aussi :

« Comparée par certains à un gourou en raison de son emprise supposée sur ses patients et leurs familles, elle a dénoncé les essais thérapeutiques pendant près de trente ans, prônant l’individualisation des traitements. »

Étymologiquement, il semblerait que « Gourou » vienne du sanskrit « enseignant », « maître à penser », c’est-à-dire quelqu’un qui, sans vous contraindre, vous encourage à progresser et à comprendre ; un sage qui vous accompagne dans une réflexion, assiste à une sorte de mûrissement sans jamais le précipiter ou l’orienter. C’est donc là encore un compliment. Sauf que tout se gâte malheureusement parce qu’on parle « d’emprise supposée ». Et là pour le coup, on est vraiment dans l’indécence.

Ce type de raccourci linguistique, très en vogue décidément durant cette crise hystérico-sanitaire (on pense au qualificatif de complotiste bien sûr), doit cesser parce qu’il est dévastateur et parce qu’il est mensonger.

Créer un lien, une connivence, une complicité avec un patient, surtout lorsqu’il s’agit d’un enfant, c’est une nécessité. C’est une fatigue aussi, un don de soi, l’acceptation en filigrane de phrases, de mots, de regards qui vont vous hanter des années durant parfois. Mais vous guider, vous défier aussi.

On dit bien « prendre en charge un patient ». On prend tout en charge en réalité quand on est pédiatre-oncologue : la maladie, son nom, la menace, la peur, l’angoisse, la douleur, le découragement, la famille. Il faut imaginer une seconde la charge mentale quand on a en face un bout de chou atteint d’un cancer, quand on a en face de soi rien de moins qu’une aberration, une trahison de la nature, ou de la vie. Quelque chose de révoltant contre lequel il ne faut jamais oublier, jamais se lasser, jamais renoncer à combattre. Dans ces moments-là, il faut de la force pour deux, pour dix. Cette même force qui continue d’animer le docteur Delépine aujourd’hui alors que tout semble se perdre et que rien ne se crée.

Il faut des mots aussi. Il faut du temps.

Être médecin, c’est ça aussi : construire un écosystème pour le soin. Une médecine à taille humaine, une médecine personnalisée parce que c’est idéal tout simplement, parce que chaque corps est un terrain à appréhender, à décrypter ; chaque corps est une histoire aussi, un passé organique et émotionnel qui peut tout changer, qui conditionne l’avenir.

Les familles, en choisissant le service du docteur Delépine, ont toujours fait un choix en conscience, en confiance. Dieu sait que certains ont dû lutter à armes trop souvent inégales pour arriver épuisés, jusqu’à elle.

D’ailleurs, quand on a la curiosité, mais aussi l’honnêteté de regarder les diaporamas sur YouTube puisqu’elle partage tout, elle offre tout de son expérience clinique, on comprend qu’elle ne présente pas seulement des cas de rémissions, des statistiques de guérison, mais bien des histoires de vie avec des petits patients devenus parfois médecins à leur tour ou encore des adolescentes devenues mamans. Des vies sauvées pour de vrai, pour de bon, tout simplement. Des malades qui ont un prénom.

On aurait parfois le sentiment qu’en mettant en garde contre le réflexe des essais thérapeutiques, elle a prôné ou participé à une médecine un peu « louche », de sous-sol. Il faut donc savoir que les chimiothérapies ne relèvent pas à ma connaissance des médecines alternatives, pas vraiment des médecines dites « douces » non plus.

Ce n’est pas qu’elle n’a pas eu l’audace de se ruer vers ces molécules dites innovantes (innovantes pour qui finalement ?) mais plutôt qu’elle n’en a pas eu la faiblesse. Que ce soit un médecin de convictions, un médecin militant ne fait pas débat, mais elle reste ouverte. C’est donc bien en conscience qu’elle a, en première intention, fait le choix de privilégier les traitements éprouvés dont on maîtrise par conséquent la toxicité (existence d’antidotes par exemple).

Lire l’article entier sur francesoir.fr

Delépine, Raoult et l’Ordre

 






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