En fouillant dans la vieille malle poussiéreuse au fond du grenier, qu’on transforme actuellement en abri antiatomique en prévision de la déflagration indo-pakistanaise, on a retrouvé une drôle d’archive. Que Thierry nous pardonne à l’avance pour ce qui va venir.

Il s’agit d’une interview millésimée 1993 d’Ardisson, alors homme de presse, puisqu’il dirigeait le brûlot populiste Entrevue qui s’attaquait à la télé et ses animateurs. C’était juste avant que Thierry n’y retourne en 1998 avec son émission pas encore culte Tout le monde en parle. Il avait fait auparavant un passage par TF1, qui l’avait jugé trop provocateur.
TF1, justement, un certain Serge de Beketch en parle à sa façon.

Beketch ? Un drôle de bonhomme, comme tous les Ruskofs, un authentique opposant au Système, un inclassable irrécupérable capable de passer de scénariste de Reiser dans Pilote à rédacteur en chef de Minute, tout en fondant Radio Courtoisie et Le Libre Journal de la France courtoise, un titre royaliste au possible, dont est tirée la double page ici présente (cliquez pour agrandir). Ah, on n’oublie pas son petit cercle réunissant juifs et chrétiens, ou sa défense d’Israël en 67...

Si Ardisson s’est toujours dit royaliste, Beketch en était le principe sulfureux, ne reniant rien de ses croyances et goûts : il était par exemple créationniste. Tenez, voici un extrait brûlant de son Wikipédia, où tout le monde en prend pour son grade. C’est bien simple, il y a un renvoi par ligne, qu’on a ôtés, pour une meilleure lecture.

Selon Le Monde, « ses calembours suintent l’antisémitisme et il ne rate jamais une allusion au génocide juif pour en relativiser l’ampleur ». Emmanuel Ratier le dit « très ami avec les fascistes ». Pour « échapper aux diktats de la pensée unique » et « décaper les neurones », il conseille la lecture du « révisionniste » Robert Faurisson.

Dans son émission de radio, il vitupère « l’État socialiste avorteur », « les territoires occupés » (les banlieues), « la saloperie de Karl Zéro et son émission anal-pute » (Canal +), les « cloportes merdeux » (les journalistes), les « imbéciles qui lisent Libé », les « batteurs d’estrade » (comme Guy Bedos, Jean-Jacques Goldman) auxquels « autrefois on ne donnait même pas une sépulture chrétienne et que le « peuple français, un peuple malade » ose apprécier ».

C’est sûr que c’est pas avec ce genre de sorties qu’il allait gagner du fric sur TF1 ou Canal+. Serge, c’était pas un robinet d’eau tiède, de l’eau froide coupée avec de l’eau chaude...

On sent le gars difficile à tordre [1].

Thierry, à côté, sera tordu début 2000 par BHL, qui saura lui faire miroiter les beautés de son palais de Tanger, et aussi la poursuite de TLMP, alors très attaquée par les sionistes. Puis, une fois arrivé sur Canal en 2006, il basculera carrément dans le camp d’en face. Personnellement, pour cent balles, on crie vive Netanyahou. C’est ça, le drame de la pauvreté.

Thierry, ayant signé son pacte avec BHL, deviendra riche, mais y perdra son âme, l’essence du deal. Nous, on veut bien perdre notre âme, ou la revendre, mais personne n’en veut. BHL ne nous a jamais fait de proposition. Bon, Bercoff en a fait une à Soral, qui a décliné.

Toujours, on en revient au conflit entre révolution et confort, confort dont le besoin augmente avec l’âge. Chacun trouve sa place sur l’axe sécurité-liberté, le curseur étant fonction du courage personnel et de calculs, réussis ou pas. Si on veut avoir un destin, on met le paquet côté liberté, mais ça peut raccourcir la vie, ou la rendre vraiment dure. En ce sens on peut dire que le Diable, c’est la sécurité, c’est-à-dire la peur et son corollaire, la soumission. C’est pourquoi la révolution dans le confort, ce n’est que de la transgression bourgeoise.