« Le non des Islandais à un référendum sur une dette bancaire les éloigne de l’Europe » (Le Monde). Précisons : de l’Europe de Maastricht, des fonds de pension et des spéculateurs nord-américains. Et c’est une bonne chose. Mais en refusant de rembourser 10 000 euros par habitant pour la faillite d’une banque, le peuple islandais se rapproche du peuple grec, qui combat contre le pillage de la nation et de tous les peuples d’Europe. Mais comment comprendre que les partis de « gauche » islandais (au gouvernement) aient refusé d’appeler à voter non ?
Sous une autre forme, ces problèmes se trouvent posés chez nous à l’occasion des élections régionales. Tous les partis qui s’y présentent proposent une politique régionale, des objectifs régionaux, acceptant le cadre de « l’Europe des régions ». L’Union européenne,en effet, impose que les nations soient morcelées en « régions », facilitant la privatisation et le démantèlement des conquêtes sociales et des droits ouvriers. La même Union européenne,rappelons-le, interdit d’interdire les licenciements au nom de la concurrence libre et non faussée.
A quelques jours de l’élection régionale, la direction deTotal vient d’annoncer la fermeture de la raffinerie de Dunkerque. A la question : « Total, vous le nationalisez ? », Martine Aubry répond : « Non,bien sûr (…). Total (…) doit mettre tous les moyens pour reclasser ses salariés et recréer sur le territoire autant d’emplois qu’elle en a supprimés » (Paris Match, 3 mars). La même Martine Aubry appelle les Français à « voter pour des régions qui les protègent (…) en matière de formation,d’économie,d’emplois ».
Et du côté du Parti communiste français ? L’éditorialiste de L’Humanité, ce 9 mars, oppose l’annonce de la fermeture du site des Flandres à la promesse faite par le gouvernement d’une « table ronde spécifique à l’avenir de la raffinerie des Flandres ».Comme si cette table ronde annoncée il y a quinze jours n’avait pas pour fonction de faire passer la pilule de la fermeture de la raffinerie ! Pour les élections, le Parti communiste français propose la mise en place de « fonds régionaux pour l’emploi et la formation », chargés de « définir des objectifs sociaux chiffrés de recul du chômage,de création d’emplois » région par région.
Mais les travailleurs de la raffinerie des Flandres exigeaient le redémarrage pour maintenir tous les emplois. Pourquoi les dirigeants du PS et du PCF refusent-ils de dire clairement : aucune suppression d’emploi, retrait du plan, redémarrage ? Pourquoi tournent- ils le dos à la renationalisation ? La seule issue serait-elle d’accompagner les plans de destruction d’emplois ? Certainement pas ! Les travailleurs français, pas plus que ceux de Grèce, d’Islande, d’Allemagne ou d’Italie, ne veulent pas se voir imposer la régression sociale généralisée au compte des multinationales et des fonds de pension. La lutte contre la privatisation, pour la nationalisation et la renationalisation, pour l’interdiction des licenciements, est plus que jamais à l’ordre du jour. La forte abstention pronostiquée par les commentateurs pour l’élection régionale exprimera une exigence de rupture : rupture avec la politique du gouvernement Sarkozy au service des licencieurs et des spéculateurs, rupture donc,aussi,avec le consensus qui,dans tous les domaines,découle de l’acceptation du cadre de l’Union européenne.
Au-delà de l’élection régionale,qui n’ouvrira aucune issue, cette exigence devra bien s’imposer. N’en déplaise au Monde, le peuple islandais semble bien proche aux travailleurs français (et de toute l’Europe) ces jours-ci…