Après avoir détruit l’armée de l’air libyenne, les Etats-Unis ont remis le commandement de la guerre de Libye à l’OTAN. Ainsi, le débarquement —s’il doit avoir lieu— incombera aux Alliés. Déjà embourbé en Afghanistan et en Irak, Washington entend partager le fardeau de sa troisième guerre en terre musulmane.
Depuis que l’OTAN, le 31 mars 2011, a pris le commandement de la guerre en Libye, rebaptisée « Opération protecteur unifié », sa force d’intervention conjointe, dont le quartier général est à Naples, a effectué plus de 1 500 raids aériens, c’est-à-dire plus de 150 par jour. Y participent — avec les chasseurs bombardiers anglais Typhoon, les français Mirage et Rafale, et d’autres avions — des aéronefs étasuniens passés de l’US Air Force à l’OTAN. Parmi ceux-ci les A-10 Thunderbolt et AC-130 Specter, dotés de canons qui tirent jusqu’à 6 000 projectiles à la minute, en majorité à l’uranium appauvri.
Participe aussi à l’opération, avec le bombardier stratégique B-2 Spirit d’attaque nucléaire qui a frappé Tripoli avec des bombes non-nucléaires d’une tonne chacune, le sous-marin USS Florida de la classe Ohio : doté de 24 rampes de lancement pour missiles nucléaires Trident, il est maintenant armé de 154 missiles Tomahawk non-nucléaires (mais avec une tête à l’uranium appauvri) et transporte 100 commandos qui effectuent des incursions en mini-sub.
Tout cela pourtant ne suffit pas. Le contre-amiral britannique Russell Harding, commandant-adjoint de l’opération, a déclaré dans une conférence de presse à Naples que les bombardements aériens et navals ont réduit de 30 % la capacité militaire libyenne, rendant l’aviation inopérante, et réduisant fortement les défenses anti-aériennes. Mais il a ajouté que les forces gouvernementales ont recours à des « tactiques non conventionnelles », en se mêlant au trafic routier. Les accusant ainsi d’être eux-mêmes les responsables du fait que les avions OTAN ont touché des forces rebelles, en les prenant pour ennemies.
Dans une audition au Sénat, à Washington, le général Carter Ham, chef de l’AfriCom qui a conduit l’opération avant que le Pentagone ne la passe à l’OTAN, a confirmé que les USA ont mis à disposition de l’Alliance des avions de combat, comme les puissantes canonnières volantes AC-130 : mais malgré tout cela, la situation sur le terrain reste bloquée. Les attaques aériennes et navales de l’OTAN en soutien aux forces rebelles n’arrivent pas à permettre à celles-ci d’avoir le dessus sur les forces gouvernementales, car elles sont numériquement et militairement inférieures. En même temps, les préoccupations vont croissant quant à la fourniture d’armes aux rebelles, étant donnée la présence de groupes d’Al Qaeda dans leurs rangs. Le général Ham retient ainsi que « l’utilisation d’une force terrestre internationale constitue un plan possible pour soutenir les rebelles libyens ».
Mais, prévient le général Ham, les conditions ne sont pas idéales pour envoyer des troupes étasunienes sur le sol libyen : le président Obama a exclu à plusieurs reprises cette possibilité, et cet envoi susciterait des réactions dans le monde arabe. Il convient en outre de considérer que, si des forces étasuniennes étaient employées trop longtemps en Libye, cela aurait des effets négatifs à long terme pour d’autres missions. Nombre de ces troupes se préparent à partir en Afghanistan, ou en sont à peine revenues.
Le général Ham conclut donc : « Il est important que les USA donnent cette charge à l’OTAN ». Nous sommes donc avertis : sous peu l’appel aux armes pourrait arriver aussi aux troupes italiennes. Fassent nos « volontaires » à nous, ceux qui soutiennent la guerre, que les troupes italiennes débarquent à Tripoli le 5 octobre : elles pourront ainsi célébrer le centenaire de l’entreprise coloniale italienne en Libye.