Rapport d’expertise remis par le Professeur Robert Faurisson à Maître Damien Viguier, avocat d’Alain Soral, dans l’affaire de l’affiche intitulée Pornographie mémorielle.
Rapport
Par lettre du 7 septembre 2015 vous m’avez sollicité en qualité d’expert, dans le cadre de l’affaire opposant le ministère public à votre client, Monsieur Alain BONNET, devant le Tribunal de Grande Instance de Paris, avec pour mission de vous délivrer une analyse du dessin incriminé.
« Pornographie mémorielle » : l’expression stigmatise l’indécence des écrits, des récits, des faux témoignages dont certains osent faire commerce en exploitant et en vulgarisant les réalités de l’expérience juive de la Seconde Guerre mondiale. Cette exploitation éhontée de réelles épreuves est principalement le fait d’individus ou d’organisations de la communauté juive mais des goïm (ou gentils), eux aussi, y ont leur part de responsabilité. Le phénomène a pris les dimensions d’un commerce ou d’une industrie qui, aux États-Unis, sont appelés, pour l’un, « Shoa[h] Business » et, pour l’autre, « Holocaust Industry ».
La caricature ci-jointe nous montre une prostituée en bas résille avec, à main droite, son soutien-gorge tout juste enlevé et, à main gauche, les pièces de monnaie qu’elle vient de récolter. Sur chacun de ses seins mis à nu se trouve dessinée une étoile juive. Elle sourit de contentement. En arrière-plan, se dessine le portail d’Auschwitz-Birkenau par lequel s’engouffraient les convois de déportés. La créature, elle, danse sur les rails. Elle est heureuse. Sa manière de servir la mémoire de la souffrance juive au temps d’Adolf Hitler est parfaitement obscène et lui permet de s’enrichir. Elle ne sert qu’une « Mémoire » réécrite d’une manière répugnante et à des fins sordides. Avec elle nous ne sommes plus dans la création historique ou historiographique mais dans l’invention pornographique. L’expression nouvelle de « pornographie mémorielle » convient à cette innovation de la propagande et de la publicité modernes qui, on le voit chaque jour, ne s’embarrassent d’aucun scrupule.
À l’instar de cette prostituée, il ne manque pas d’auteurs pour se livrer à une activité aussi dégradante et fructueuse que la prostitution. Au lieu de respecter la mémoire de ceux qui ont souffert ou qui sont morts pour leur appartenance à une foi ou à une communauté ethnique, ils tirent cyniquement profit de la Mémoire juive selon tous les procédés du racolage. Au lieu de servir l’exactitude historique, ils exagèrent les faits et les chiffres quand ils ne les inventent pas de toutes pièces. Ils font étalage des souffrances des morts. Plus ils surenchérissent, plus s’emplissent leurs escarcelles. Ils amassent argent, honneurs et distinctions.
À ce titre, Auschwitz, qui était au centre d’un culte bouleversant pour les cœurs sincères, s’est transformé en un haut-lieu d’attractions malsaines, un Disneyland de l’Horreur. Des millions de touristes y visitent, au camp d’Auschwitz-I, un crématoire doté d’une prétendue chambre à gaz d’exécution mais, en réalité, « Tout y est faux » et il ne s’agit pour une bonne part que de « falsifications » (Eric Conan, « La Mémoire du mal », L’Express, 19-25 janvier 1995, p. 68).
Il peut en coûter cher aux honnêtes gens et aux vrais historiens de mettre en garde contre ce commerce dégradant, contre cette perversion, contre cette Mémoire dénaturée et contre cette « pornographie mémorielle ». En la personne de Ben Zion Dinur, né Dinaburg, l’État d’Israël possédait durant les années 1950 un historien si prestigieux que la tâche lui avait été confiée en 1953 de fonder Yad Vashem (un mémorial et un institut de recherche de « l’Holocauste », situé à Jérusalem). Or, six ans plus tard, le malheureux se voyait contraint à la démission. Son crime ? Dans le souci de sauvegarder l’Histoire des abus de la Mémoire, il avait préconisé une étude sévèrement critique des témoignages rendus par les « survivants ». Le tollé suscité dans certains milieux juifs polonais d’Israël l’avait poussé à quitter Yad Vashem.
En 1950, le professeur Dinur n’était pas le seul juif à s’en prendre au fatras des faux témoignages de « survivants ». À l’époque, le juif américain Samuel Gringauz, un ancien habitant du ghetto de Kaunas (Lituanie) pendant la Seconde Guerre mondiale, dénonçait chez certains de ses coreligionnaires ce qu’il appelait « le complexe de surenchère dans l’histoire » (the hyperhistorical complex) ; il en venait à écrire :
« Le complexe de surenchère dans l’histoire peut se décrire comme judéocentrique, lococentrique et égocentrique. Il ne trouve essentiellement de signification historique qu’à des problèmes juifs liés à des événements locaux, et cela sous l’aspect d’une expérience personnelle. C’est la raison pour laquelle, dans la plupart des souvenirs et des récits, s’étalent une absurde verbosité, l’exagération du graphomane, les effets de théâtre, une présomptueuse inflation de l’ego, une philosophie d’amateur, un lyrisme d’emprunt, des rumeurs non vérifiées, des distorsions, des attaques partisanes et de minables discours. »
(« Some methodological problems in the study of the ghetto », Jewish Social Studies / A Quarterly Journal Devoted to Contemporary and Historical Aspects of Jewish Life, Vol. XII, Edited for The Conference on Jewish Relations, New York, 1950, p. 65)
En 1954, Germaine Tillion, ancienne déportée, a dénoncé le « mensonge gratuit » à propos des camps de concentration allemands. Elle n’a pas craint d’écrire :
« Ces personnes [qui mentent gratuitement] sont, à vrai dire, beaucoup plus nombreuses qu’on ne le suppose généralement, et un domaine comme celui du monde concentrationnaire – bien fait, hélas, pour stimuler les imaginations sado-masochistes – leur a offert un champ d’action exceptionnel. Nous avons connu [c’est G. Tillion qui continue de parler ici] de nombreux tarés mentaux, mi-escrocs, mi-fous, exploitant une déportation imaginaire ; nous en avons connu d’autres – déportés authentiques – dont l’esprit malade s’est efforcé de dépasser encore les monstruosités qu’ils avaient vues ou dont on leur avait parlé et qui y sont parvenus. Il y a même eu des éditeurs pour imprimer certaines de ces élucubrations, et des compilations plus ou moins officielles pour les utiliser, mais éditeurs et compilateurs sont absolument inexcusables, car l’enquête la plus élémentaire leur aurait suffi pour éventer l’imposture. »
(« Réflexions sur l’étude de la déportation », Revue d’histoire de la Deuxième Guerre mondiale, numéro spécial sur « Le Système concentrationnaire allemand (1940-1944) », juillet-septembre 1954, p. 18, note 2)
En 1968, Olga Wormser-Migot, auteur de référence connue pour son histoire du système concentrationnaire nazi notait, y compris dans les témoignages rendus sous serment lors des procès dits de « criminels de guerre » :
« […] la primauté accordée aux faits spectaculaires – et surtout l’exagération : outrance dans les récits d’horreur ou dans les possibilités du sabotage et de la résistance, grossissement du nombre réel des déportés et des victimes et, particulièrement dans les témoignages féminins, raffinement dans le sadisme sur fond de sexualité (caractère beaucoup plus sensible dans les témoignages de 45-47 que dans les témoignages postérieurs). La révélation de l’horreur des camps avait entraîné une telle débauche de récits de cruautés que la plupart des témoins n’ayant pas subi ces sévices ou n’en ayant pas été spectateurs, craignait inconsciemment de ne pas être considéré comme un véritable déporté s’il n’y faisait pas allusion. »
(Essai sur les sources de l’histoire concentrationnaire nazie, thèse complémentaire dactylographiée, 1968, p. 322)
Plus nombreuses qu’on ne le pense généralement ont été les dénonciations de diverses formes de la « pornographie mémorielle ». En 1996, des libertaires et autres représentants de l’ultra-gauche ont écrit :
« La littérature de gare concentrationnaire des Bernadac, Steiner, Gray et compagnie qui fait appel aux plus bas instincts pour se vendre a fait beaucoup de mal à la recherche historique. »
(Collectif Libertaires et “Ultra-Gauche” contre le négationnisme, Reflex, 1996, 111 p.)
En 1999, l’historien Tim Cole a publié Selling the Holocaust, from Auschwitz to Schindler. How History Is Bought, Packaged, And Sold [Holocauste à vendre, d’Auschwitz à Schindler. Comment l’histoire est achetée, empaquetée et vendue], New York, Routledge, Paperback Edition, 2000, XX-214 p. En 2000, Norman Finkelstein frappe un grand coup avec la publication de The Holocaust Industry. Reflections on the Exploitation of Jewish Suffering (Londres et New York, Verso Books, 150 p.). En 2001, paraîtra la traduction française aux éditions de La Fabrique sous le titre de L’Industrie de l’Holocauste : réflexions sur l’exploitation de la souffrance des juifs. Ses compatriotes et coreligionnaires Noam Chomsky et Raul Hilberg (le plus prestigieux historien en la matière), exprimeront leur admiration pour cet ouvrage. Il est intéressant de noter que, selon Wikipedia, « En France seulement, le livre fera l’objet d’un procès pour “diffamation raciale” et “incitation à la haine raciale” intenté par “Avocats sans frontières”, que Norman Finkelstein et son éditeur gagneront en première instance et en appel [Cour d’appel de Paris, 4 mai 2006] ». Ce n’est pas un juif mais un prêtre catholique romain qui ira peut-être le plus loin dans les pratiques que dénonçait N. Finkelstein : le Père Patrick Desbois, l’auteur de Porteur de mémoires / Sur les traces de la Shoah par balles, Michel Lafon, 2007, 335 p. Pendant quelques années, il a été en France la coqueluche des médias jusqu’au jour où des historiens français ont procédé à des mises au point qui semblent avoir été fatales au bon Père, lequel a disparu de nos écrans.
Le Père Desbois s’était fait fort d’avoir découvert, principalement en Ukraine, quelque 800 charniers contenant 1 500 000 cadavres de juifs fusillés par les Allemands. Il choisissait un village, en invitait les habitants à se faire photographier devant un coin de campagne d’apparence inoffensive, puis débitait un discours devant un pré ou un boqueteau et révélait ou faisait révéler par de braves gens aux yeux emplis de larmes que là gisaient tant de cadavres, mais jamais on ne procédait à une exhumation ni même on ne montrait un charnier, pour la « bonne » raison qu’un rabbin anglais avait fait savoir que ces cadavres étaient ceux de saints à ne déranger sous aucun prétexte dans leur dernier sommeil. Le Père Desbois avait été jusqu’à découvrir que pendant la guerre les Allemands, soucieux de discrétion, ne communiquaient à Berlin le résultat de leurs exploits meurtriers que sous l’apparence d’annonces météorologiques dans lesquelles « le nombre de nuages indiquait le nombre de fosses ouvertes et la hauteur de la pluie, le nombre de corps qu’ils avaient brûlés » (p. 227) ! Auparavant il nous avait expliqué pourquoi il avait chargé un homme circulant avec un détecteur de métaux de découvrir des douilles allemandes : autant de douilles relevées, autant de juifs fusillés (p. 76-80) ! Mais il y a mieux : le Père Desbois avait découvert toute une nouvelle face de la Shoah, « la Shoah par étouffement ». Cet étouffement se pratiquait sous édredons ou coussins (p. 304-307) !
Bref, notre bon Père s’était fait l’émule de l’Abbé Georges Hénocque (1870-1959), ancien Saint-Cyrien, aumônier militaire, résistant, qui a laissé son nom à un square du 13e arrondissement de Paris. Interné à Buchenwald, il avait voulu, une nuit, voir, de ses yeux voir, la chambre à gaz d’exécution. « À quatre pattes » (sic) il s’était glissé vers son emplacement. Il nous l’avait décrite avec ses « quatre boutons, placés l’un au-dessous de l’autre : un rouge, un jaune, un vert, un blanc ». Et il ne s’était pas montré avare d’autres précisions imprécises (Les Antres de la Bête. Fresnes, Buchenwald, Dachau, Paris, G. Durassié et Cie, 1947, p. 112-119). Le malheur veut que, quelques années plus tard, en 1960, les historiens allaient découvrir que ce camp comme bien d’autres n’avait jamais possédé de chambre à gaz d’exécution.
Conclusion
Tant d’élucubrations qui, soixante-dix ans après la guerre, continuent de proliférer sont intolérables. Au lieu d’attraire en justice ceux qui recherchent l’exactitude, il conviendrait de les soutenir dans leur dénonciation de la « pornographie mémorielle ». Pour reprendre ici une expression en vogue, ils sont des « whistle blowers » ou des « lanceurs d’alerte ». C’est peut-être ce que confirmerait la lecture de l’arrêt susmentionné du 4 mai 2006.
Fait à Vichy, le 15 septembre 2015
Professeur d’université à la retraite,
spécialiste de « Critique de textes et documents (littérature, histoire, médias) »