Soral, Cheminade, Asselineau... Pourquoi la résistance peine-t-elle à s’organiser ? Pendant que se joue un acte essentiel en Grèce, la résistance au système est-elle en train de rater le coche ?
Si vous êtes un lecteur d’Agoravox, cela prouve que vous avez probablement compris certaines choses. Que Pujadas n’est pas toujours votre ami, que vous ne pourrez jamais trouver une critique acerbe du système dans les journaux de Dassault ou de Lagardère, que le système marche sur la tête et que son maintien tient au seul intérêt qu’y trouvent les élites dominantes. Des idées simples en somme, accessibles à tous, que probablement 5 à 10% de la population ont comprises. C’est aussi le socle de base de plusieurs mouvement résistants sincères, et le rôle de ces mouvements est d’abord de faire connaître l’état de la situation au plus grand nombre. Pourtant, pendant que se jouent des évènements essentiels en Grèce, c’est la panne de résistance. Retour sur les principaux acteurs de la dissidence.
Alain Soral n’est plus à présenter. Ancien bon client de la télé, passé au parti communiste et au front national, il est un intellectuel intelligent à qui on doit un certain nombre d’analyses pertinentes. Suite à l’affaire Dieudonné et la liste anti-sioniste aux européennes il se concentre sur son mouvement Egalité et réconciliation dont le but, louable, est de réunir les franges que l’élite a décidé d’opposer. En finir, en somme, avec les luttes horizontales et remettre à jour le logiciel de lecture de la lutte des classes.
Jacques Cheminade, énarque s’est illustré en 1995 aux élections présidentielles avec un discours d’avant-garde contre l’empire financier. Une prouesse qui lui a valu d’être blacklisté immédiatement. Sa traversée du désert l’a amené à rejoindre, en créant Solidarité et Progrés, les rangs de Lyndon Larouche dont le mouvement est suspecté d’être une secte. (En bon sceptique, je ne validerai pas cette accusation avant d’avoir de preuve). Depuis ce moment Cheminade accuse la reine d’Angleterre d’être la cause de tous les malheurs du Monde.
François Asselineau, brillant énarque a, quant à lui, lancé l’UPR, mouvement dont la vocation est simplement d’en finir avec l’Europe. Car Mr Asselineau accuse plutôt les américains d’être à l’origine de tous nos problèmes. Il s’inscrit, dans la droite lignée du général de Gaulle, et se pose en chef de la résistance contre l’empire yankee.
Les objecteurs de croissance, dont Paul Aries est un éloquent et charismatique représentant, s’opposent au système dans sa logique de course à la production. Plus de lien social, moins de publicité, plus d’humain et moins de gaspillage. Un mouvement louable aussi, même s’il est parfois parasité par des tendances anti-technologiques ou écologistes extrémistes.
Le mouvement Zeitgeist, basé sur les films de Peter Joseph et sur le Venus Project de Jacques Fresco, c’est un mouvement mondial qui met au pilori le système monétaire dans son ensemble. Le mouvement, non politique, se déclare purement intellectuel et préconise une nouvelle étape de civilisation basée sur l’abondance, la gratuité et la technologie.
Puis, suit un nuage de personnalités, authentiques résistants mais non engagés, pèle-mêle : Marc Edouard Nabe, thierry Meyssan, Annie Lacroix-Riz...
Suit aussi, il faut le signaler, un nuage de faux résistants, placés là par le système, soit pour tuer certaines tendances, soit pour alimenter simplement les luttes horizontales, communautaires religieuses etc... dans lesquelles s’épuisent les classes les plus pauvres sans jamais égratigner l’ordre établi. Pèle-mêle : Olivier Besancenot, Houria Bouteldja et son mouvement des indigènes de la république, le collectif cheikh Yassine, SOS racisme, la LICRA, Cohn Bendit...
Revenons aux vrais résistants. Vous pourriez penser qu’ils se réunissent régulièrement pour discuter leurs stratégies. Eh bien il n’en est rien. Il se passe le contraire. Illustrations :
Cheminade versus Soral : après que Jacques Cheminade soit venu à l’université d’Egalité et Réconciliation, il refuse de soutenir Soral pendant la campagne européenne. Ce dernier en parle ici. (1h06mn)
Asselineau versus Soral : séduits par le mouvement d’Asselineau, des militants d’Egalité et réconciliation lui ont proposé leur soutien logistique, celui ci a refusé, prétextant que leur mouvement était obsédé par les illuminatis...
Zeitgeist versus Soral : s’il est vrai que Soral ne s’est jamais exprimé sur Zeitgeist, il semble qu’Egalité et Réconciliation préfère donner une tribune au très douteux LLP (Le libre penseur), qui lui, a décidé de descendre zeitgeist, puisqu’il y voit une manoeuvre sataniste pour l’écarter de sa religion... Il faut préciser qu’Egalite et Réconciliation est probablement prisonnier de son slogan "gauche du travail, droite des valeurs", ce qui en fait un mouvement qu’apprécient les pieux chrétiens et musulmans. Difficile de leur faire avaler la première partie de Zeitgeist.
LLP versus Lacroix Riz : La brillante historienne qui a fait un remarquable travail sur les élites françaises des années 30, et qui a participé au Zeitgeist Day 2010 à Paris a semblé peu réceptive aux théorie de LLP. Elle a dû penser que l’homme était peu crédible, elle parait cependant, à tort, peu intéressée par les aspects monétaires. Déformation professionnelle sans doute.
En conclusion, il apparaît clairement que ces division font le jeu de l’oligarchie qui avance tranquillement ces pions en Grèce. Il semble urgent que les acteurs de la résistance, s’ils sont de bonne foi, acceptent de discuter ensemble pour agir de concert sur les points de convergence (sortir de l’euro, lutter contre la finance spéculative...). Nous espérons donc voir Asselineau et Cheminade échanger avec Egalité et Réconciliation, voir Egalité et Réconciliation parler du mouvement Zeitgeist dans son site et voir Le Libre Penseur ... se mettre au vert.
La situation est telle aujourd’hui que la résistance ne peut pas se payer le luxe d’une lutte d’orgueil, il est grand temps de jeter des ponts, espérons que cet article soit une première passerelle.