Les Etats-Unis, qui s’inquiètent des manifestations antigouvernementales au Moyen-Orient, exercent leur influence dans la région grâce à un réseau d’installations militaires et un accès privilégié offert par les régimes en place.
La protection des routes maritimes du golfe arabo-persique par lesquelles transitent des milliers de pétroliers chaque année et l’établissement d’un cordon sanitaire à l’ouest du Golfe pour contrecarrer les ambitions du voisin iranien sont au cœur de cette stratégie. Plus que d’énormes bases semblables à celles dont ils disposent au Japon ou en Allemagne, la stratégie des Etats-Unis dans la région s’appuie sur les droits de survol et un maillage de bases dont l’accès a été négocié avec des pays amis comme les Emirats, le Qatar, Oman, le Koweït et l’Arabie Saoudite. Au total, quelque 27.000 militaires américains se trouvent actuellement dans la région, a confié un responsable militaire américain à l’AFP.
A Bahreïn, frappé à son tour par l’onde de choc des manifestations en Tunisie et en Egypte, les Etats-Unis disposent de 4.000 hommes, selon lui. Ce petit royaume du Golfe, où l’opposition réclame la démission du gouvernement après la dispersion par la force d’un rassemblement pacifique, est d’une importance stratégique pour Washington qui y abrite le quartier général de sa Ve flotte, responsable de la mer Rouge, du golfe arabo-persique et de la mer d’Arabie. Si seuls quatre navires démineurs américains sont basés à Manama, au moins un porte-avions, ses navires d’escorte, et les 80 avions et hélicoptères qu’il embarque se trouvent en permanence dans la zone, notamment pour soutenir les opérations en Afghanistan et contrer l’Iran.
La perte des facilités d’accès à un pays à la suite d’un changement de régime ne serait pas en soi catastrophique grâce au réseau tissé dans la région mais la perte de tout ce maillage serait catastrophique, explique David Aaron, un ancien membre du conseil à la sécurité nationale et expert au centre de réflexion RAND. "Avant d’avoir cette base à Bahreïn, nous gérions la (Ve) flotte autrement. C’était dur pour les marins mais ce n’était pas impossible", remarque-t-il.
En 2003, l’armée américaine s’est quasi-totalement retirée d’Arabie Saoudite pour s’implanter au Qatar et à Oman. Mais "ce qui peut être en jeu, c’est la capacité d’avoir des forces dans le Golfe pour rassurer nos alliés" contre l’Iran, située à l’est du Golfe, explique David Aaron. "Si nous perdons tout cela à cause des troubles, ce serait un coup terrible pour notre capacité à dissuader l’Iran", estime-t-il.