Le Jour de Martin Luther King Jr. a été promulgué jour férié fédéral en 1983. Loin de moi l’idée de banaliser cet exploit. Pour y arriver, les groupes de la société civile ont fait preuve de beaucoup de persévérance et ont dû surmonter une forte opposition. Sauf que cela a eu pour effet de créer un paradoxe indigeste dans la liste des saints et de héros du pays [les conclusions du procès civil de 199, en anglais, NDLR].
Car il faut se rappeler que le jury au procès civil de 1999 qui s’est penché sur l’assassinat est parvenu à une conclusion renversante le 8 décembre 1999, à savoir que des agences du gouvernement des USA avaient conspiré à l’assassinat du Dr King.
Les médias de masse, qui ont fait peu de cas de ce procès et de son verdict en 1999, continuent aujourd’hui de s’enfermer dans leur mutisme.
Lorsqu’ils sont sommés de s’expliquer, ils disent que les témoignages étaient nébuleux, confus et facilement réfutables. En réalité, les prétentions des plaignants étaient légitimes et le jury, après avoir entendu les témoignages et la présentation de la preuve du 15 novembre au 8 décembre, est parvenu rapidement à un consensus quant au verdict. Les éléments de preuve variés présentés par maître William Pepper tendaient vers la réfutation de la thèse de l’assassin isolé (James Earl Ray) et l’existence d’une conspiration impliquant plusieurs parties, dont la police locale (le service de police de Memphis), la mafia (le représentant local Frank Liberto) et des éléments de la police fédérale, des services secrets et des forces armées. Autrement dit, les forces combinées qui ont fomenté le meurtre n’étaient pas très différentes de celles qui ont tué le président Kennedy. La planification, la volonté et la détermination des assassins étaient telles qu’il aurait été étonnant que le Dr King survive à ce jour funeste. Perché du haut d’un balcon du motel Lorraine, il était comme un agneau à l’abattoir.
La lecture de la transcription du procès est assez longue (elle fait environ 2 700 pages), mais ce faisant j’ai été impressionné par la ténacité de maître Pepper et sa capacité à aller au fond des choses. Mais pour que les conclusions aient un poids politique, surtout si les médias de masse persistent à nous faire croire que le procès n’a jamais eu lieu, les citoyens engagés doivent faire leur part pour faire connaître le procès et ses conclusions. Ils doivent en parler aux gens, les encourager à lire la transcription, en citer des extraits et souligner son importance. Ils doivent lutter contre sa banalisation (comme ll’article de Wikipedia sur Martin Luther King tente de le faire) par des prétentions que les allégations de conspiration sont faibles et qu’elles ont été réfutées (ce qui est faux).
On a tué King non seulement parce qu’il était un militant des droits civils, mais aussi parce qu’il planifiait sa campagne pour les pauvres, qui prévoyait une perturbation non violente des activités commerciales à Washington au nom de tous les pauvres du pays, peu importe la couleur de leur peau, ce qui rendait le 1 % mal à l’aise. On a aussi tué King pour son ardente critique de la poursuite de la guerre du Vietnam par son pays. Sa dénonciation la plus vive de cette guerre a eu lieu à l’église Riverside de New York un an jour pour jour avant la veille de sa mort. Son discours éloquent et sans compromis en avait ébranlé plus d’un, du président Johnson aux militaires et aux services secrets des USA.
Loin d’être nébuleux et confus, les arguments de fond présentés en 1999 sont, selon moi, bien étayés. De plus, on n’a pas très subtilement tenté d’acheter et de menacer James Earl Ray, de dissuader et même de tuer des témoins, et de prétendre malgré les preuves du contraire que les enquêtes gouvernementales ont été faites de façon exhaustive et qu’elles n’ont rien trouvé pour remettre en cause sérieusement les accusations contre Ray.
La vérité, c’est que la théorie du tireur isolé a mordu la poussière en 1999. Quiconque tente de la ressusciter devra être en mesure de réfuter chaque chapitre et chaque phrase de la transcription de ce procès civil.