Une chronique de merde dans une émission de merde sur une chaîne de merde, ainsi pourrait-on résumer cet excellent moment de malaise qui a surgi lundi 5 septembre 2022 sur France 2, chez Julia Vignali, la meuf de Kad Merad. Eh oui, la télé est une grande famille.
« Amateur de salsa et de musculation – pardonnez-moi mais cela ressemble pas mal à mon homme idéal – il semblerait qu’on soit sur le portrait d’un Ricky Martin de la côte d’Azur, on valide. Il était également un mari extrêmement violent, obsédé sexuel et zoophile. Mari extrêmement violent... Elle l’avait peut-être cherché ? En ratant une cuisson ou en donnant son avis. Obsédé sexuel, chacun ses hobbies. Après tout, il y en a bien qui regardent Télématin. Zoophile, en même temps à Nice, il n’y a que des vieilles et des chihuahas, on a le droit de vouloir s’envoyer quelqu’un qui a des dents. »
France Télévisions n’a même plus les moyens de payer des auteurs, c’est vraiment la dèche totale….
— Eric Massaud +(booster) (@EricMassaud) September 5, 2022
Les téléspectateurs ont mal pris la chose et mis la pression sur la chaîne : les uns accusant l’humoriste d’être allée trop loin ou d’être nulle, les autres accusant la chaîne de censure puisque la pub a été envoyée avant la fin du sketch. En réalité, tout étant minuté, la panne de prompteur a plongé la fille dans la vase, elle a pataugé gravement, et la pub est venue comme un couperet. Ou une libération.
La direction de @FranceTele et les équipes de @Telematin regrettent qu’une chronique à vocation humoristique ait heurté à juste titre de nombreux téléspectateurs.
Nous présentons nos excuses et exprimons notre solidarité avec les victimes de l’attentat de Nice et leurs proches.— France Télévisions (@Francetele) September 5, 2022
Alexandra Pizzagali a 34 ans et se veut drôle. L’humour d’aujourd’hui est fait de violence, mais de violence calculée, de violence lâche. Tout le monde parle de pédophilie, de zoophilie, de sexe, c’est devenu bateau, même Gaspard Proust s’y perd, en voulant aller plus loin que les autres. Quand on n’a pas de projet, on atteint vite ses limites.
Le seul humour qui tient la route, c’est celui qui parle du réel et qui le montre sous un autre angle. Il faut de l’imagination pour ça, et Blanche Gardin en a. En réalité, Gardin ne fait pas du trash pour du trash, elle se met à nu. Christine Angot fait pareil mais elle est médiocre, du coup c’est doublement pénible. Il faut donc du talent ET du courage.
Dieudonné, lui, possède les deux. Il a levé un coin du voile sur le pouvoir profond, puis comme un sale gosse a tiré le drap d’un coup sec, mettant la dominance à nu. Et de la réaction violente de ce pouvoir caché, l’humoriste a tiré toute son énergie.
Faire des blagues sur les victimes de terrorisme n’est pas une prise de risque par rapport à un pouvoir : les téléspectateurs n’en ont pas, ils râlent dans le vide, ils n’ont pas les moyens de censurer. Il s’agit juste de se foutre de la gueule de gens qui ont souffert. Dans ce cas, il faut le faire avec talent ET courage.
Sur E&R, on se fout de la gueule des migrants (des hommes jeunes, en général) parce qu’ils ne souffrent pas : ils viennent chez nous pour se les rouler, choyés qu’ils sont par le socialo-sionisme d’État. Ce sont des branleurs qui sont mieux rémunérés que nos agriculteurs : ils méritent donc nos plus sales blagues. Certes, il y en a qui bossent, mais comme dirait Didier Super, ils niquent notre système social.
« Et toi le p’tit Chinois, qui bosse à l’usine
Tu es vraiment in-con-sé-quent
Ton contrat d’travail, tu l’négocies tellement mal
Que du coup ça s’répercute sur mon système social »
Sinon, une famille qui vient de Syrie ou d’Ukraine en guerre et qui s’installe en France avec femme et enfants, on n’a rien à dire, si c’est parce qu’ils aiment la France. Faire une blague sur l’assassin de Nice est possible, même en plein procès, mais alors, il faut qu’elle soit excellente : suffisamment vraie et forte pour s’élever au-dessus de tout le monde, comme un ange... Sinon, ça reste sur le trottoir, comme un cadavre.
Dans ce sketch, Alex n’est pas drôle mais elle est vraie, ça sent le vécu. Sauf que ça tourne toujours autour du cul, et du cul féministo-centré. À quand une humoriste qui change de registre, qui franchit le pas de l’intime au social ?