Les USA traversent, non seulement en raison du rachat des dettes des banques par l’Etat, mais aussi de leur dette publique qui avait déjà énormément augmenté – leurs crédits à l’étranger leur coûtent 1 milliard de dollars par jour – leur pire crise financière depuis la Seconde Guerre mondiale. Si les flux financiers cessent ou s’ils se détournent du dollar, les USA sont en faillite.
Pourtant les USA ne font pas un effort d’économie suffisant pour réduire leur dette publique croissante. Ils n’augmentent pas les impôts pour accroître leurs recettes, ne tentent guère de rogner sur les budgets publics, surtout pas sur leur budget militaire, celui qui a le plus augmenté.
Il faut dire que les USA, en divers endroits du monde, ont engagé au total 200 000 soldats. C’est pourquoi personne n’a compris que le plus grand chef de guerre du monde ait reçu le Prix Nobel de la paix bien qu’il ait renforcé ses troupes. Peut-être était-ce une mesure préventive, car la guerre en Iran dépend avant tout de lui.
Les exemples de chefs politiques qui, confrontés à un échec économique, ont choisi la guerre comme dernier recours pour se maintenir au pouvoir abondent dans l’histoire. C’est encore plus vrai lorsqu’un pays connaît des crises économiques successives et que la guerre semble le seul moyen d’en sortir. C’est ainsi que les USA ont surmonté leur plus grave crise économique du XXe siècle en entrant dans la Première Guerre mondiale, la crise économique mondiale en entrant dans la Seconde, et ils pourraient donc être tentés de résoudre la troisième crise économique de la même manière. Les deux guerres mondiales ont en effet permis aux Etats-Unis non seulement de venir à bout de leurs deux plus gros endettements, mais aussi de devenir la première puissance économique mondiale. La tentation est donc forte d’essayer une troisième fois le même remède.
Dans ce contexte toute une série de préparatifs de guerre semblent alarmants :
1. Le Premier ministre israélien, un homme d’extrême-droite, est un va-t-en-guerre imprévisible. Il se plaint constamment d’avoir reçu de la part de l’Iran des menaces variées dont aucune n’a jusqu’ici résisté à l’examen. Mais il hausse de plus en plus le ton et au cours des derniers mois il a fait la tournée des principales capitales mondiales pour y chercher un soutien. Il paraît même que Madame Merkel lui a juré la fidélité des Nibelungen, comme l’avait fait avant les précédentes guerres mondiales Guillaume II aux Autrichiens ou les Anglais et les Français à la Pologne.
2. Israël a déjà positionné les sous-marins nucléaires qu’elle a achetés à l’Allemagne, armés de missiles à ogives nucléaires, en face de l’Iran et, non content d’avoir reconstruit et pointé sur l’Iran la base de lancement géorgienne que les Russes avaient détruite il y a un an et demi, y a fait envoyer un renfort de 90 spécialistes états-uniens.
3. De semaine en semaine la presse, sous l’influence d’Israël, hausse le ton à l’égard de l’Iran pour différents motifs – une campagne de propagande analogue à celle qui a permis de faire accepter, voire soutenir la guerre en Irak dans le monde entier en répandant des affirmations mensongères.
4. Les préparatifs militaires ne chôment pas non plus. Certes les troupes états-uniennes n’ont toujours pas réussi à « pacifier » les deux pays voisins, l’Irak et l’Afghanistan. Mais ils y entraînent à la guerre la plus grosse concentration de troupes au monde. En outre, ils ont regroupé au large de l’Iran la plus grosse flotte militaire qu’ils aient jamais réunie. Le comité du Nobel a donc fait un bon calcul en cette affaire : pas de guerre en Iran sans l’assentiment du Président des USA, surtout s’il s’agit d’un Prix Nobel de la paix. Toutefois la pression des banques, des multinationales, du lobby de l’armement, de l’armée et du lobby israélien pourrait contraindre les USA à entrer en guerre, si Israël menait une première frappe contre l’Iran et que les puissances précitées voulaient protéger leurs intérêts.
N’oublions pas que les USA ne sont pas seulement la nation la plus endettée du monde, mais aussi que l’effondrement de leur devise signifie celui de leur empire. La soi-disant « unique puissance hégémonique mondiale » implose en ce moment exactement comme l’a fait l’URSS il y a vingt ans. Les Chinois ont déjà fait comprendre qu’ils ne reconnaissent plus son hégémonie. Le Président des Etats-Unis se trouve donc, si Israël frappe, face à un dilemme désespéré : doit-il continuer à s’enliser dans les sables mouvants de la crise financière, économique et sociale ou chercher le salut dans une guerre mondiale, qui a déjà permis deux fois aux Etats-Unis d’en sortir gagnants.
Le danger d’une nouvelle guerre mondiale n’a jamais été aussi grand depuis la fin de la Seconde. C’est à juste titre que depuis un an les mises en garde aux USA se sont accrues, venant surtout de certains milieux intellectuels européens. Mais nous ne pourrons pas l’empêcher.
Une guerre en Iran ne resterait pas un événement limité, même si au départ il ne s’agissait que de missiles.
Aux côtés de l’Iran se rangeraient les Chinois, directement ou indirectement, et probablement les Russes, pour ne pas laisser les troupes états-uniennes s’approcher de leurs frontières et la puissance des USA devenir excessive.
Les membres de l’OTAN seraient contraints de se ranger aux côtés d’Israël et des USA, surtout s’ils avaient auparavant prêté le serment des Nibelungen. Il faut donc nous attendre à voir l’Europe participer, elle aussi, à la guerre.
Quelles seraient pour nous les conséquences d’une troisième guerre mondiale en Iran ?
1. Toute guerre avec l’Iran entraînerait la fermeture immédiate du détroit d’Ormuz et un dramatique renchérissement du pétrole, et ceci d’autant plus que la guerre se prolongerait. Du pétrole plus cher, c’est toujours des coûts plus élevés pour l’économie et les consommateurs. Nous devons donc nous attendre à des pénuries, des restrictions et des augmentations de prix pour les biens de consommation.
2. Toute guerre nécessite un surcroît d’armement. L’industrie mondiale de l’armement – et en particulier aux USA – se frottera les mains, elle sera utilisée à pleine capacité et pourra se développer. Il y aura des retombées dans les secteurs annexes, par exemple l’automobile, le textile, les chantiers navals, l’aéronautique et d’autres encore. La production augmentera, même si les prix en font autant.
3. Les grands gagnants seront les banques. On ne parlera plus de produits financiers toxiques et de banquiers gangsters ; les banques centrales devront financer la guerre par la création de monnaie. Les banques pourront de nouveau accorder des crédits. Dans un premier temps l’inflation maintiendra le dollar jusqu’à la fin de la guerre. C’est seulement après la guerre, comme d’habitude, que l’on procédera au grand nettoyage et qu’on expiera les péchés de la finance de guerre.
Les vassaux des USA doivent casquer pour les besoins financiers du maître, on l’a déjà vu avec les guerres d’Irak et d’Afghanistan. La guerre n’appauvrira donc pas seulement Israël et les USA, mais nous tous. Comme il n’y a pas d’argent pour financer une guerre, on devra recourir à l’inflation, comme lors des deux premières guerres mondiales ; nous devons donc nous attendre à une inflation vertigineuse.
S’ils entrent en guerre avec l’Iran, les USA mobiliseront aussi l’OTAN (« clause de défense collective »). Le gouvernement devra alors expliquer à nos soldats pourquoi ils ne doivent plus seulement s’acquitter de leur tâche en Afghanistan, mais aussi en Iran, et réunir une majorité au Bundestag pour voter son budget de guerre. Le SPD et les Verts (Fischer) ont déjà voté une entrée en guerre sous le prétexte fallacieux d’un « maintien de la paix ». Une troisième guerre mondiale, malgré la pression états-unienne, rencontrera plus de réticence. Et dans la population le refus devrait être massif et peut-être mener à la démission du gouvernement trop docile.
Mais peut-être le gouvernement Merkel voit-il lui aussi dans une guerre une issue politique à sa situation bloquée par l’aide aux banques, le surendettement public, le collapsus financier qui menace les systèmes de protection sociale et les troubles sociaux que risquent d’engendrer de véritables redressements de cap.
La guerre est à nos portes. Les mois qui viennent nous diront si nous allons être entraînés dans une troisième guerre mondiale ou si nous y échapperons encore.