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Les contreparties du renoncement russe à vendre les S300 à l’Iran

Il a fallu quatre années et des dizaines de rencontres bilatérales pour persuader Moscou de ne pas livrer les S300 à Téhéran.

Les Européens,- français, britanniques et allemands- en plus des Américains et des Israéliens s’étant relayés dans des va et vient sans précédent à Moscou. La logique des responsables russes ayant longtemps été qu’ils ne soutiennent pas le même raisonnement quant à la menace iranienne, leur revirement de position laisse croire à un prix qu’ils ont perçus ou devraient percevoir.

Du côté israélien, ils ont déjà obtenu les drones qui faisaient défaut à leur arsenal militaire, et attendent que soit lancée leur fabrication coopérée.

Du côté américain, quoique le discours officiel dédaigne tout marchandage, mettant de l’avant des phrases pompeuses, à l’instar de « rendre les relations des Russes avec les États-Unis plus valeureuses que celles avec Téhéran » ou encore : « l’objectif actuel ne réside pas dans le fait d’édifier de bonnes relations avec la Russie, mais de développer nos propres sécurités, de barricader nos intérêts économiques et de propager des valeurs mondiales », les contreparties se font sentir du côté de la satisfaction de revendications russes.

David Kramer, ancien responsable américain au secrétariat d’état pour les affaires étrangères pendant le mandat de Gorges Bush, se refuse à voir « une décision russe stratégique de renoncer à Téhéran, en faveur de Washington », citant à l’appui le fait que Moscou poursuit sa collaboration avec Téhéran dans la centrale nucléaire de Bouchehr.

Dans un article pour le « Washington Post », il constate également que la direction américaine s’est abstenue de critiquer le Kremlin pour son mauvais registre dans les droits de l’homme. Preuve que les contreparties américaines à la décision russe existent.

Il y a eu également et surtout le renoncement de l’administration d’Obama à l’atlantisation de la Géorgie et de l’Ukraine, (anciennes républiques soviétiques perçues comme zone d’influence de la fédération russe) et l’abandon du déploiement des systèmes anti missiles en Pologne et en République tchèque (soupçonnés de vouloir espionner la Russie).

Mais les Russes semblent toutefois beaucoup plus ambitieux : un réel partenariat après avoir étoffé « une profondeur au dialogue russo-américain » selon les termes d’un analyste de la Ria Novosti, Pavel Andrev : Ils aspirent surtout à une étroite collaboration économique, pour moderniser le pays ; les échanges commerciaux entre les deux pays étant à la médiocre barre des 18 milliards de dollars.

Comme cette démarche devrait d’abord être précédée par l’adhésion de la Russie à l’Organisation mondiale du commerce (OMC) et à l’Organisation de la coopération de développement économique (OCDE), est requise une aide américaine pendant longtemps interdite.

Un responsable américain ayant gardé l’anonymat, et cité par le « Foreign policy », s’attend à ce que les prochaines discussions américano-russes s’y penchent particulièrement.

D’autres contreparties sont quant à elles liées à la collaboration nucléaire : la Russie exigeant que soit ratifié par le Congrès américain l’accord sur la coopération nucléaire pacifique.

En renonçant à la vente des S300 à l’Iran, les Russes semblent vouloir inaugurer une nouvelle orientation de leur politique étrangère, basée sur une ouverture sur les États-Unis et l’Europe qui puisse moderniser le pays.

Jusqu’à s’assurer que les Américains et les Européens sont sur la même longueur d’onde, des hauts et des bas sont à prévoir. Et Moscou de garder en main des cartes de pressions, dont celle de l’Iran, du Moyen Orient et beaucoup d’autres.