En réalité, l’information biaisée est la marque d’un mépris total pour le destinataire final – c’est-à-dire, vous. Mais « l’information » est-elle réellement produite pour lui ? La réalité est bien plus crue que tout ce que vous pouvez imaginer, au moins aux États-Unis, comme le révèle un ex-journaliste dans un article sans détours, Confessions d’un ex-journaliste sur le milieu corrompu des médias, dont voici une traduction.
Je doute que quiconque ait besoin qu’on lui rappelle que les médias sont pourris jusqu’à la moelle ; même les personnes les plus réticentes et à l’esprit le plus fermé tiennent désormais cela pour acquis. Mais bien que les médias soient largement condamnés de nos jours (mes remerciements aux Allemands pour avoir ramené le mot Lügenpresse dans le discours public), peu de gens savent ou comprennent ce qui se passe réellement dans la cuisine journalistique, où se concocte la potée de mensonges dont les gens sont quotidiennement nourris. Cependant, il y a toujours un moyen de le découvrir, par une infiltration délibérée du milieu ou, dans mon cas, par accident.
J’ai un vieil ami – appelons-le Sven – que j’ai toujours tenu pour être un homme bienveillant et sincère. Cependant, ces traits étaient également tempérés par une vision optimiste et quelque peu naïve des gens. Pour cette raison, il se retrouvait régulièrement embarqué dans des situations difficiles et parfois même dangereuses. L’une d’elle s’est révélée être un bref passage en tant que journaliste pour un journal en ligne à succès. Il maintint à peine contact au cours de son emploi et finit par décrocher complètement. Environ un mois plus tard, il refit surface – un homme changé, et pas en mieux. Comme il l’expliqua, il démissionna de son travail et se renferma sur lui-même un certain temps, sans autre arme que l’alcool, pour faire face à la dépression dans laquelle l’avait plongé ce travail de journaliste.
Cette réaction doit probablement paraître excessive à beaucoup d’entre vous, comme elle le parut à moi-même. Les hommes tombent rarement en dépression ainsi et ne se sortent pas de leurs problèmes en buvant. Si j’accordai à mon ami la clémence de lui expliquer ses manquements, je reconnus aussi l’utilité de son expérience et commençai à l’interroger sur ce qu’il avait vu et entendu durant son emploi. Je transmettrai ses conclusions ci-après ; cependant, je ne révélerai ni son vrai nom ni celui de son employeur, sachant que dans le pays « libre » où nous vivons, cela pourrait l’amener en eaux troubles.
Qui vous paie, vous possède
Sven rejoint les rangs des journalistes pour apporter la vérité aux gens. À son crédit, il croyait vraiment qu’il ferait exactement cela. Sa première mission semblait si simple, après tout : parler à une personne, enregistrer la conversation, écrire un article, le publier. La réalité se révéla diamétralement opposée. Une fois notre journaliste fraîchement émoulu revenu de sa première entrevue, on lui ordonna de retranscrire l’enregistrement immédiatement et de l’envoyer par courriel au gestionnaire de contenu. Une demi-heure plus tard, Sven reçut une version fortement modifiée de la transcription, avec les éléments qu’il jugeait les plus significatifs remplacés par des tournures dénuées de sens ou complètement supprimées. Quand il alla voir le directeur pour exprimer son indignation, celui-ci lui répondit simplement : « Cet homme ne nous a pas payés pour un article qui le dénigre. Retournez à votre bureau. »
Ce fut loin d’être le seul cas où Sven fut témoin de sommes d’argent tirant le journalisme. Ses nombreux collègues ne produisaient presque jamais du contenu indépendant – ils étaient trop occupés à publier des articles payés les uns après les autres. Lorsque Sven demanda si ces articles devaient être indiqués comme du contenu sponsorisé, la seule réponse qu’il obtint fut un rire amer. Très souvent, le gestionnaire de contenu venait à son bureau et disait quelque chose comme « Savez-vous le gars sur lequel vous écrivez est un ami proche du boss ? Ne vous plantez pas sur cet article ». Sven fut également surpris de voir que de nombreuses personnes interrogées (habituellement les politiciens) ne se donnaient même pas la peine de répondre à ses interviews, déléguant à la place leurs secrétaires ou assistantes. L’une d’elle alla même jusqu’à lui remettre un discours pré-écrit en main en lui disant de travailler à partir de cela avant de s’en aller.
Cependant, notre Sven possédait aussi un sens aigu de la justice, qui l’amena plusieurs fois à ignorer les « recommandations » données par son gestionnaire de contenu, à s’écarter de l’histoire officielle et à permettre à de petits extraits de vérité de faire leur chemin aux yeux du public. Pour chacune de ces transgressions, il fut convoqué au bureau du directeur, sévèrement admonesté, et se vit amputé d’une partie de son salaire mensuel. Tout fragment « non autorisé » qu’il avait écrit fut rapidement édité après coup – même si l’article avait déjà été lu par des milliers de personnes. Et ceci était censé être un média « neutre et objectif » !
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