Résumons la méthode Bolloré : attendre qu’un organe soi-disant de gauche meure de sa médiocrité pour le racheter et en faire un média soi-disant de droite. Ainsi d’I-Télé et aujourd’hui du JDD.
Un mois de grève en 2016 pour I-Télé (la plus longue grève de l’audiovisuel français depuis 1968 et la plus longue grève d’un média audiovisuel privé en France avec 31 jours de grève) et un mois de grève en 2023 pour le JDD (le plus long mouvement social de l’histoire des médias depuis 1975) mais le résultat est le même : Bolloré place ses pions et constitue son empire.
Bien sûr, la contestation est un obstacle pour le bulldozer breton (attaché à la communauté juive par sa grand-mère Nicole Goldschmidt, ancienne espionne pour les services secrets français issue d’une lignée de banquiers de Francfort, proche d’Edmond de Rothschild et de Léonce Bernheim) : on parle d’un manque à gagner de 1,5 million d’euros pour Lagardère News (structure gérant Europe 1, Europe 2, RFM, Paris Match et donc le JDD), filiale du groupe Lagardère racheté par Bolloré en 2022 via Vivendi, l’hebdomadaire n’étant pas paru durant cinq week-ends. Mais rien d’insurmontable.
- La congruence macrono-zemmouriste en marche ?
Rien d’insurmontable au niveau économique d’autant qu’au niveau politique, le journal bénéficie du soutien complaisant du gouvernement Macron par l’entremise de Sabrina Agresti-Roubache, nouvelle secrétaire d’État à la Ville que la presse présente comme « l’amie des Macron », « une intime du couple présidentiel » et « l’oreille des Macron à Marseille » et qui accorde aujourd’hui au JDD version Geoffroy Lejeune (épouvantail zemmourien en provenance de Valeurs actuelles) son premier entretien politique.
Cet entrevu avec la « copine » de Brigitte Macron remplira donc les pages réduites (20 pages de moins que la dernière édition du 22 juin) de ce premier numéro « de droite » du JDD, initialement annoncé pour la mi-août et dont la une est consacrée à l’insécurité (avec une bourde en couverture)... Essentiellement composé par des piges de journalistes extérieurs à la rédaction (le site internet du JDD est alimenté depuis quelques jours par un prestataire externe : l’agence de presse 6Médias) mais proches de la galaxie Bolloré, ce faux événement donnera à lire des chroniques déjà rébarbatives de Charlotte d’Ornellas, Mathieu Bock-Côté, Éric Naulleau ou encore Pascal Praud.
J'étais à la marche blanche pour Enzo. La photo ne correspond pas à notre marche blanche. Le JDD s'est trompé d'Enzo et a mis une photo concernant un jeune renversé par une voiture dans les Landes en janvier ! pic.twitter.com/W5O64nxLW1
— Philippe Brun (@p_brun) August 6, 2023
Le seul fait remarquable est donc l’indicateur supplémentaire que représente l’invitation en forme de légitimation d’Agresti-Roubache (« Agresti » est le nom de son mari, Jean-Philippe Agresti, actuel recteur de la région académique de Corse et ancien doyen de la faculté de droit et de science politique de Marseille) quant aux rapports prétendument hostiles entre Bolloré et le pouvoir macronien : la ministre de la Culture Rima Abdul Malak et l’ancien ministre de l’Éducation Pap Ndiaye ont manifesté leurs « inquiétudes » pour la forme mais l’empereur Bolloré poursuit bien son entreprise de concentration oligarchique des médias avec la bénédiction de l’empereur Macron, comme le prouve le récent portrait Faits & Documents du « petit frère » Cyril Hanouna.
Un constat encore plus prégnant à l’heure où la crise politique fait rage en Afrique, Bolloré étant extrêmement influent sur le continent via sa multinationale Bolloré Transport & Logistics, qui possède des ports, des concessions ferroviaires et des terminaux de pétrole et de gaz dans quasiment tous les pays africains (plus de deux cents agences au total) tout en bénéficiant, indirectement, de certains programmes d’aide publique pour le développement des infrastructures et, directement, de contrats publics de l’État français (la filiale Bolloré Africa Logistics a d’ailleurs été vendue en décembre 2022 à MSC, multinationale suisse du transport maritime gérée par la richissime famille italienne des Aponte, cousins « éloignés » d’Alexis Kohler, conseiller de l’ombre d’Emmanuel Macron). L’arrestation de Juan Branco au Sénégal, poux dans la tête moumoutée des Macron et gominée de Cyril Hanouna, prouvant peut-être cette congruence...
Ce qui est certain par contre : vous ne lirez pas ce genre d’analyses dans le JDD !
Retrouvez le portrait de Cyril Hanouna et toute la série sur les contrôleurs d’opposition dans Faits & Documents
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